L’Inspection générale dresse des pistes pour améliorer l’orientation

Éléonore de Vaumas Publié le
L’Inspection générale dresse des pistes pour améliorer l’orientation
Le rapport de l'IGESR préconise une meilleure coordination des acteurs de l'orientation. // ©  Rawpixel.com/AdobeStock
Dans son rapport annuel, l’IGESR (Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche) s’est penchée sur l’orientation de la quatrième au master. Elle y recommande notamment une réelle relance du parcours Avenir et une meilleure coordination des acteurs, mais pointe aussi des carences dans le système actuel d’orientation.

"Un rapport d’une telle envergure sur l’orientation est assez exceptionnel", reconnaît Delphine Riccio, vice-présidente de l’APSYEN (association des psychologues et de psychologie dans l’Éducation nationale), à propos de la publication du rapport thématique annuel de l’IGESR (Inspection générale de l’Éducation, du Sport et de la Recherche) en octobre dernier.

Une démarche éducative individualisée

Cette édition 2020, se prête à une analyse approfondie de l’orientation, de la quatrième au master. Le premier constat est celui d’un changement structurel important : en deux décennies de politiques publiques, l’approche de l’orientation est en effet passée d’une gestion de flux entre les différentes voies de formation hiérarchisées (générales, technologiques et professionnelles) à une démarche éducative individualisée qui s’inscrit au cœur des apprentissages.

"C’est une évolution considérable qui permet de proposer un accompagnement continu destiné à permettre aux élèves de développer leur aptitude à s’orienter tout au long de leur scolarité", se réjouit Caroline Pascal. La cheffe de l’Inspection générale fait aussi état de "réelles avancées en matière d’information, de développement d’outils et de dispositifs d’accompagnement des élèves et des étudiants ou encore de lutte contre le décrochage".

Problème : ces réformes successives n’ont pas encore produit tous les effets escomptés. Les choix d’orientation restent encore très liés à la situation géographique, économique et sociale des familles et au genre des élèves. De même, si le rôle des professeurs principaux et des psy-EN (ex-conseiller d’orientation) est reconnu comme incontournable, il est "limité dans le processus décisionnaire" de nombre d’élèves et d’étudiants qui continuent à s’appuyer majoritairement sur leur sphère familiale pour faire leurs choix d’orientation. "C’est vrai que, malgré un système largement pris en charge par les collectivités publiques, le rôle éducatif et de modélisation des familles reste primordial, d’où l’importance de travailler avec elles et sur leurs représentations, en leur apportant une information qui ouvre les horizons", prêche Caroline Pascal.

Mieux former les enseignants à l'orientation

Autre biais identifié : l’absence de collaboration entre les différents acteurs de l’orientation, et ce "malgré l’existence d’initiatives locales encourageantes". Un constat qui conduit les auteurs à préconiser notamment d’identifier, recenser et valoriser "les bonnes pratiques mises en œuvre concernant l’aide à l’orientation" à tous les niveaux, du collège aux études supérieures.

Une requête également exprimée de longue date par les professionnels de l’orientation. Pour Delphine Riccio, psy-EN à Loches (37), "cela fait des années qu’on voudrait disposer d’un lieu qui nous permettrait de mutualiser et partager les supports pour qu’ils puissent être réappropriés par d’autres, mais, pour l’instant, nous attendons toujours".

Notre activité seule ne peut suffire pour accompagner les jeunes de manière satisfaisante, et c’est pour cela qu’il est nécessaire d’avoir le soutien de la communauté éducative (D. Riccio, psy-EN)

Des outils plus lisibles, mais aussi des enseignants qu’il faut mieux former, c’est là une autre préconisation du rapport. L’IGESR propose d’intégrer des modules de formation à l’orientation dans le cadre de leur formation initiale et continue. "Ces modules pourraient donner lieu à la délivrance d’une attestation qui serait prise en compte dans le déroulement de carrière des personnels", complète la cheffe de l’IGESR.

Mais pour les psy-EN, à qui incombent la mission de les former, se pose un problème de disponibilité. "Tout en étant rattachés au CIO (centre d’information et d’orientation, NDLR), nous effectuons des permanences en moyenne sur trois établissements. Nous avons aussi d’autres missions qui sont tout aussi importantes, comme notre contribution pour l’inclusion scolaire et la prévention du décrochage scolaire. Aussi, au vu de notre temps de présence, notre activité seule ne peut suffire pour accompagner les jeunes de manière satisfaisante, et c’est pour cela qu’il est nécessaire d’avoir le soutien de la communauté éducative", illustre Delphine Riccio.

Mieux faire avec autant

De façon générale, le rapport appelle surtout à davantage de clarté dans le pilotage des instances. Cela implique, selon les auteurs, la nécessité de "définir dans un texte de politique générale les attendus ministériels en matière d’orientation".

Nos autorités doivent réaffirmer ce qu’elles attendent précisément des nombreux acteurs qui interviennent auprès des élèves et des étudiants (C. Pascal, IGESR)

"Nos autorités doivent réaffirmer ce qu’elles attendent précisément des nombreux acteurs qui interviennent auprès des élèves et des étudiants afin que leur coordination fasse système, insiste Caroline Pascal. Il convient, par exemple, de réaffirmer les objectifs du parcours 'Avenir' dans l’enseignement secondaire, et de persévérer dans la lutte contre les stéréotypes qui entourent les métiers et les formations, afin qu’aucun élève ne s’interdise, a priori, certaines voies de la réussite."

Des vœux pieux qui ne prennent pas en considération une autre réalité vécue par les professionnels de l’orientation, regrette la vice-présidente de l’APSYEN. "On a bien compris que le rapport essaie de proposer des choses tout en se montrant réaliste quant à l’absence de moyens supplémentaires. Mais c’est précisément ce qu’on attend pour pouvoir mettre en œuvre ces préconisations et dépasser les impasses dans lesquelles nous nous trouvons aujourd’hui."

Éléonore de Vaumas | Publié le