La mobilisation étudiante contre Parcoursup gagne du terrain

Laura Taillandier Publié le
La mobilisation étudiante contre Parcoursup gagne du terrain
La prochaine mobilisation contre la réforme aura lieu le 3 avril. // ©  Nicolas Tavernier / R.E.A
Alors que le mouvement étudiant prend de l'ampleur, s'opposant à la fois à la loi ORE et aux violences dans les établissements, blocages, assemblées générales et rassemblements se succèdent à Bordeaux, Lille, Nancy, Montpellier et Toulouse. Et les tensions montent.

Les violences à la faculté de droit de Montpellier seront-elles l'étincelle qui met le feu aux poudres ? Depuis l'agression de plusieurs étudiants dans un amphithéâtre de l'établissement, le 22 mars 2018, les assemblées générales et les rassemblements se multiplient dans les universités. Lentement, le mouvement étudiant contre la réforme de l'entrée à l'université gagne du terrain.

Paralysie dans deux universités

C'est à Montpellier 3-Paul-Valéry, l'établissement voisin de la faculté de droit, que le premier blocage permanent a été voté. Selon l'Unef, plus de 2.500 étudiants réunis en assemblée générale ont choisi à main levée d'inscrire le mouvement dans la durée, mardi 27 mars 2018. "Il y a eu du débat, mais les deux tiers des étudiants ont souhaité poursuivre le blocage. Et il continuera tant que la loi ORE ne sera pas retirée", affirme le responsable de la section locale de l'organisation, Baptiste Arnoux.

"L'occupation, et donc l'impossibilité de faire cours, va créer troubles et inquiétudes chez une majorité d'étudiants", regrette le président de l'établissement, Patrick Gilli, dans un communiqué. L'Unef souhaite que des solutions soient trouvées pour permettre aux étudiants d'obtenir leur année mais, pour l'établissement, il n'est pas question de "semestre gratuit". Les examens seront bien maintenus et porteront sur les enseignements déjà dispensés.

Cette question va également se poser à Nancy, où les étudiants de la fac de lettres ont aussi voté le blocage "illimité", mardi 28 mars. Sur les 1.000 étudiants rassemblés, selon l'Unef, 600 se sont prononcés en faveur de la poursuite du mouvement.

"Le mouvement monte"

D'autres universités sont touchées par la mobilisation. À Toulouse 2, Paris 1 ou encore Bordeaux 2, les blocages s’enchaînent au rythme des assemblées générales. "Les modes d'actions varient selon les établissements contre la loi ORE et pour mettre la pression sur les discussions sur l'arrêté licence. Le mouvement monte", souligne Lilâ Le Bas, la présidente de l'Unef.

Les mobilisations se multiplient au risque de voir éclore les tensions. "Après 10 jours d'occupation, nous sommes face à une situation de plus en plus tendue, avec des enjeux qui dépassent notre établissement", alerte l'université de Bordeaux. À Lille 2, des étudiants ont été "victimes de violences de la part de l’extrême droite", selon l'Unef, lundi 26 mars, aux alentours de l’université. Plus récemment, mercredi 28 mars, c'est à l'université de Strasbourg que des étudiants et des lycéens ont été victimes d’actes de violence sur le campus.

"Ni flics, ni fachos"

Ainsi, devant certaines universités bloquées, des pancartes "Ni flics, ni fachos" ont fait leur apparition. Plusieurs manifestations se sont déroulées à l'appel des étudiants de Lille pour dénoncer les violences dans les établissements. Mais pour l'instant, à Paris, le mouvement n'a pas pris. Sur l'esplanade de l'université Paris 7, mercredi 28 mars, ils étaient à peine une quarantaine mercredi à s’être rassemblés contre les "interventions fascistes et policières".

"Il y a plus de monde dans la file pour acheter des sandwichs", ironise Lorraine. "Après, ce n'est pas une fac très engagée", relativise-t-elle dans un sourire. Comme elle, Rebecca, et Amandine, étudiantes à Paris-Nanterre, sont venues dénoncer "les patrouilles de flics dans les établissements et les coups de matraque". Pour ces jeunes femmes, comme pour Arthur*, étudiant en droit à Paris 1, "les universités souhaitent tuer le mouvement étudiant dans l’œuf".

Ils sont rejoints sur ce point par la présidente de l'Unef. "La montée de la contestation s'accompagne d'incidents violents car certains, des groupuscules d'extrême droite notamment, s'en servent pour décrédibiliser la mobilisation, regrette-t-elle. Certaines universités tentent aussi de l'étouffer. Dans plusieurs établissements les forces de l'ordre sont intervenues."

Une accusation que réfute le président de la CPU. "Nous ne faisons pas ce choix de gaieté de cœur. Lorsque ces interventions ont eu lieu, c'était pour répondre à un problème de sécurité et protéger de l'irruption de personnes extérieures à l'établissement qui voulaient en découdre", rappelle Gilles Roussel.

La colère après l'agression de Montpellier

Pour le président de la CPU, les mobilisations sont aujourd'hui "essentiellement liées à l'émotion légitime après les événements à Montpellier". "L'émotion joue beaucoup dans la construction d'un mouvement", observe également Jimmy Losfeld. Pour le président de la Fage, qui fait partie des soutiens à la loi ORE, cette "montée de la violence est perceptible et n'est pas saine". "L'agression révoltante des étudiants à la fac de droit attise la colère sur d'autres campus. Il faut appeler au calme et empêcher les blocages tout en laissant les étudiants librement s'exprimer", déclare-t-il.

La montée du mouvement dans les établissements se traduira-t-elle dans la rue ? Réponse mardi 3 avril 2018, prochaine date de mobilisation nationale contre la réforme.


Paris 1 : le local de l’Union des étudiants juifs de France saccagé

Le local utilisé par l’Union des étudiants juifs de France, installé au sein du Centre Pierre-Mendès-France de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne a été saccagé, mercredi 28 mars. La ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, condamne "avec la plus grande fermeté ces dégradations honteuses" à caractère antisémite. Le président de l’établissement, George Haddad a porté plainte.

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