Les moyens de l'Education nationale en débat

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« Peut-on faire mieux avec moins ? ». A  l’heure des 16 000 suppressions de postes annoncés pour la rentrée 2011 , le thème du « rendez-vous de l’éducation » organisé par l’AEF était de circonstance. Ce mercredi 26 janvier quatre tables rondes ont réuni au lycée Louis Le Grand à Paris des acteurs politiques et de l’enseignement pour débattre des conséquences de la réduction des moyens sur la qualité du système éducatif. Echos des débats.

Du « toujours plus » au « toujours mieux »

En introduction, le ministre de l’Education nationale, Luc Chatel , a expliqué que « la contrainte budgétaire actuelle doit permettre « d'ouvrir les yeux et de changer de regard et d’esprit » en soulignant que  « depuis vingt-cinq ans dans l'Éducation nationale et quel que soit le gouvernement, la principale politique a consisté à ajouter des moyens aux moyens. ». Comment passer du « toujours plus » au « toujours mieux » ? En dégageant des marges de manœuvre pour se concentrer sur quelques objectifs précis, a proposé le ministre, citant la lutte contre le décrochage scolaire, l’accueil des élèves handicapés, la refonte de l’éducation prioritaire… et « un chantier sur l’évaluation et la mobilité des enseignants ».

Pas de dépenses nouvelles sans contrepartie

« La tension sur les moyens est une contrainte nouvelle qui s’impose sur le long terme », a reconnu pour sa part Claude Thélot, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, rappelant, en référence aux résultats PISA qu’en terme de résultats, « notre système dérive doucement » et que cet « affaissement est grave. » Estimant qu’« il y a une certaine fécondité dans la contrainte », cet ancien directeur de l’évaluation et de la prospective au ministère de l’Education nationale a proposé de « mieux typer les priorités », c’est à dire « éviter de diminuer les moyens à l’aveugle ». Exemple : « On a fait trop peser la tension sur les collèges, pas assez sur les collèges à qui il faudrait redonner des moyens ». Aussi, Claude Thélot a suggéré de ne pas faire de dépenses nouvelles sans contrepartie. « Il n’est pas normal d’augmenter le salaire des enseignants sans contre partie » a-t-il déclaré avant de proposer des mesures structurelles : « Tout le monde dit : on est à l'os. Mais c'est en faisant l'hypothèse que l’on garde tous les collèges, tous les lycées, toutes les séries et toutes les options » Plaidant pour des regroupements ou des réaménagements de l’espace scolaire », ce fin connaisseur du monde éducatif milite pour la diversification : « Evitons de remplacer à l’identique lors des départs en retraite » ou encore « fermons des écoles maternelles dans le 16ème arrondissement de Paris pour en ouvrir dans le 20ème. »

Des rendements de l’éducation qui se mesurent

En réponse à Claude Thélot qui estime que « la liaison entre les moyens et la réussite est faible, pas nulle mais faible », Eric Maurin, économiste de l’éducation à l’EHESS a rappelé qu’« il ne faut pas croire que donner plus de moyens sur telle ou telle action éducative ne donnent rien. Il y a des rendements de l’éducation qui se mesurent ».Une analyse partagée par Thierry Cadart, secrétaire générale du Sgen-CFDT : « L'affaiblissement des résultats du système éducatif est très important. Pourquoi s'interdirait-on de faire le lien entre une baisse des résultats et une baisse des moyens ? » Et tandis que ce responsable syndical pointait quelques incohérences (« Comment peut-on payer les enseignants en heures supplémentaires et, dans le même temps, les encourager à plus s'impliquer dans leur métier ? »), Jean-Michel Blanquer, directeur général de l’enseignement scolaire, a défendu ce principe des heures supplémentaires qui a selon lui permis « d’améliorer l’accompagnement des élèves ».

La formation des enseignants en priorité

Rappelant que "les ressources ont un caractère fini", Laurent Bigorgne, directeur de l’Institut Montaigne s'est interrogé sur la manière de « fixer les priorités » : « Je suis frappé de constater que les dépenses en France pour le secondaire sont de 20 % supérieures à la moyenne de l'OCDE et de 10 % de moins pour le primaire. L'enseignement secondaire et le lycée captent des moyens et bénéficient d'une attention politique disproportionnée par rapport à ce qui se joue dès la maternelle ». Au-delà des moyens, le directeur de ce think tank a mis en avant quelques chantiers jugés prioritaires, notamment la formation initiale et continue des enseignants et la recherche en sciences psycho cognitives. Pour Jean-Michel Blanquer il faut mettre des moyens sur trois facteurs de réussite : des « professeurs formés et heureux », un « pilotage offert aux chefs d'établissements » et « un climat scolaire correct ». Sur la formation, le directeur général de l’enseignement scolaire a proposé de lancer « une conférence de consensus pédagogique ».

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