L'Institut catholique de Paris se positionne sur les bachelors

Sarah Nafti Publié le
L'Institut catholique de Paris se positionne sur les bachelors
L'ICP s'associe à deux lycées privés parisiens pour créer deux bachelors à la rentrée 2024. // ©  Frédéric Albert
À la rentrée 2024, l'ICP va ouvrir deux bachelors. Une première pour l'établissement catholique, qui souhaite ainsi élargir le public visé par ses formations.

En annonçant l'ouverture de deux bachelors à la rentrée 2024, l'Institut catholique de Paris (ICP) se positionne sur un créneau nouveau, mais avec le crédit de l'institution :  l'ICP a le statut d'établissement d'enseignement supérieur privé d'intérêt général (Eespig). Un label du ministère de l'Enseignement supérieur qui assure notamment que l'établissement remplit des missions de service public.

Un bachelor "pour ceux qui hésitent entre la prépa et l'université"

Le premier bachelor, Science politique, Géopolitique et Humanités, élaboré en collaboration avec les lycées privés Saint-Jean-de-Passy et Stanislas s'adossera à une licence de l'ICP, au choix celle d'histoire-science politique ou celle de philosophie. Sur le papier, il promet d'allier "le meilleur de la pédagogie universitaire aux exigences des classes préparatoires".

"Concrètement, cela signifie que les étudiants du bachelor auront des cours en plus avec les enseignants de classe préparatoire des lycées partenaires", explique Pauline Piettre, directrice des Affaires Académique de l'ICP.

Si l'étudiant du bachelor est en L1 Histoire Science politique, il assistera à tous les cours magistraux et au cours de méthodologie universitaire comme les autres étudiants de la licence. Il sera en revanche dispensé des TD de science politique et de certains TD d'histoire, ce qui lui permettra d'assister aux 15 heures hebdomadaires du bachelor.

Pour ces étudiants, l'ICP promet un suivi personnalisé, avec des classes de 40 maximum, "des examens réguliers, une demande de travail qui ressemble aux classes prépas sans être aussi exigeant", précise Pauline Piettre. Le public visé est "celui qui hésite entre la prépa et l'université", estime la chercheuse.

Attirer un public qui ne va pas en CPGE

Le créneau "permet [à l'ICP] d'attirer un public qui ne vient pas chez nous", remarque Christine Pires, enseignante en classe prépa et vice-présidente de l'Association des professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales (APHEC).

Dans la doublette de terminale, 28.000 élèves prennent maths et SES (sciences économiques et sociales) quand 58.000 optent pour HGGSP (histoire, géographie, géopolitique et sciences politiques) et SES. "Parmi eux à peine 10% demanderont une classe prépa ECG (économique et commerciale générale), car ils ne font plus de maths".

Et Christine Pires de regretter que "de bons étudiants, qui pourraient aller en classe prépa, optent pour des formations coûteuses". "Nous avons un travail à faire là-dessus pour réfléchir sérieusement à ce vivier perdu et l'attirer vers les classes prépas". Pour l'enseignante, l'offre privée, payante et donc "réservée seulement à une partie de la population", n'est pas la solution.

Nous avons un travail à faire là-dessus pour réfléchir sérieusement à ce vivier perdu et l'attirer vers les classes prépas. (C. Pires, APHEC)

Pour Pauline Piettre, en revanche, "il manque d'offre pour répondre aux besoins des nombreux étudiants intéressés par la science politique et la géopolitique".

La prépa ECG demande des maths et la prépa B/L (lettres et sciences sociales) ne propose pas de géopolitique. Quant aux IEP, ils n'ont que peu de places. D'ailleurs ce bachelor est bien prévu pour ouvrir à des études longues et donner accès "à un large choix de masters".

Des frais de scolarité plus élevés qu'en prépa

Comme les autres formations proposées par l'ICP, le tarif variera en fonction du quotient familial, entre environ 5.000 et 11.000 euros l'année. Les boursiers du Crous ont droit à une réduction en fonction de leur échelon.

Et l'ICP propose également des bourses en interne. "L'accessibilité sociale est importante pour nous", précise Pauline Piettre, qui rappelle que la politique sociale de l'établissement rentre en compte dans l'attribution du label EESPIG.

Une réflexion générale de l'écosystème

Cette réflexion sur les parcours de trois ans est aussi en cours dans les établissements du Réseau national d'enseignement supérieur privé (Renasup), qui regroupe de nombreux lycées catholiques proposant des formations à bac+2 ou 3 (prépas, BTS), comme l'explique son délégué général Jean-Marc Petit.

"Les IUT sont passés en trois ans, et cela renforce l'idée qu'il faut que nos établissements puissent avoir des propositions diplômantes ou certifiantes à bac+3 car c'est le segment cible des bacs généraux et technologiques, qui délaissent de plus en plus les BTS."

Mais pour pouvoir proposer des formations visées ou gradées, les lycées, qui ne sont pas des lieux de recherche, doivent passer des accords avec d'autres établissements du supérieur.

L'autre solution est d'aller vers la certification RNCP, en visant le niveau 6, qui correspond à un bac+3/+4. Renasup a, par exemple, développé le bachelor "responsable de mission en cabinet d'expertise comptable", sous l'impulsion de l'ordre des experts comptables pour répondre aux besoins du secteur. Le format études courtes et professionnalisantes semble être un créneau d'avenir.

Un bachelor avec l'Isep dans le domaine de la santé

L'ICP développe d'autres collaborations. Ainsi, le bachelor "système numérique pour la santé", a été construit avec l'école d'ingénieurs Isep et s'intègre à l'école de santé de l'ICP. Ce cursus, qui aura le grade de licence, vise à former des techniciens employables dès leur sortie.

"L'originalité est d'apporter des compétences techniques, tout en convoquant les SHS pour assurer une parfaite connaissance de l'environnement hospitalier et du système de santé, explique Claudine Travier, directrice du Pôle prépas, accessibilité académique et sociale de l'ICP. Cette vision globale doit permettre aux étudiants d'être au plus près des besoins des usagers, pour lesquels ils vont créer des objets connectés par exemple".

Sarah Nafti | Publié le