Université : le top 10 des pédagogies innovantes

Sylvie Lecherbonnier, Sophie Blitman Publié le
Université : le top 10 des pédagogies innovantes
Learning Lab de l'École Centrale et l'EM de Lyon - Le robot de téléprésence Beam permet à des personnes extérieures d'intervenir pendant les cours, comme si elles étaient présentes. // ©  ECL
Classe inversée, fablabs, design thinking... Si les pédagogies innovantes n'ont pas forcément recours au numérique, toutes se développent à partir des bouleversements qu'il opère. À l'occasion du colloque de la CPU, qui se tient du 27 au 29 mai 2015 à Strasbourg sur le thème "Université 3.0 : nouveaux enjeux, nouvelles échelles à l'ère numérique", EducPros fait l'inventaire des nouvelles manières d'apprendre.

#1 La classe inversée : le cours avant le cours

Faire travailler les étudiants en amont du cours, pour consacrer le temps du cours à d'autres activités : approfondissement de certaines notions, réponse aux questions des étudiants, mais aussi mise en commun des productions, échanges et débats... Tel est le principe de la pédagogie inversée, qui se répand dans les universités et grandes écoles.

Si la méthode n'est pas nouvelle, les outils numériques facilitent ce type de pratique. Les enseignants mettent des documents à disposition des étudiants sur les ENT (Espaces numériques de travail) : des textes classiques, des images, mais aussi bien sûr des vidéos. Les Mooc (Massive Online Open Courses) qui se transforment alors en SPOC (Small Private Online Courses) peuvent également servir de supports.

Résultat : les étudiants s'approprient souvent mieux le contenu du cours que s'ils avaient seulement écouté de manière passive. 

#2 Des amphis plus interactifs

Les amphis aussi entament leur révolution. Avec un mot d'ordre : interactivité.

L'UPMC, les universités de Strasbourg, du Maine, de Bretagne-Sud (Vannes) ou encore de Joseph-Fourier (Grenoble), ainsi que des écoles d'ingénieurs comme Polytech Nice Sophia-Antipolis ou l'Insa de Lyon expérimentent les boîtiers électroniques qui permettent aux étudiants de montrer s'ils ont bien compris telle ou telle notion. 

Autre technique : les buzz groupes. Certains enseignants font travailler les étudiants par équipes sur une question précise, à charge pour un rapporteur de présenter la synthèse à l'ensemble de l'amphi. À partir de leur restitution peut s'élaborer une discussion collective.

#3  Les fablabs ou la pédagogie de la bidouille

Scies, perceuses, mais aussi fraiseuses à commande numérique, découpeuse laser, et bien sûr imprimantes 3D. Ateliers ouverts et collaboratifs, les fablabs recèlent d'outils divers permettant d'imaginer et de réaliser des prototypes.

Après l'université de Cergy-Pontoise en 2012, plusieurs établissements d'enseignement supérieur se sont lancés : Télécom Bretagne, l'UTC (Université de technologie de Compiègne), l'UPMC (Université Pierre-et-Marie-Curie), Polytech Orléans…

Les étudiants viennent fabriquer des objets dans le cadre de leurs cours mais y ont aussi accès librement, pour mener leurs projets personnels. Leur but : décloisonner les enseignements et encourager la créativité.

Préparation du Game of Drones, au PMClab, le fablab de l'UPMC

 #4 Les learning labs, ces salles de cours 3.0

À côté des traditionnels amphis ou salles de TD, de nouveaux espaces, plus ouverts et plus modulables, font aujourd'hui leur apparition dans les écoles et universités. Objectif de ces learning labs : favoriser le développement de pédagogies alternatives, fondées sur l'interactivité et la créativité.

Concrètement, cela passe par des tables et chaises sur roulettes, facilement déplaçables, que l'on peut rapprocher pour mener des travaux en groupe, puis organiser en cercle pour lancer une discussion collective.

À Centrale et l'EM Lyon, une salle a été dotée de grands murs écritoires où les étudiants sont invités à griffonner leurs idées lors de séances de brainstorming, tandis que des Post-it électrostatiques peuvent être affichés puis déplacés au gré de l'avancement de la réflexion. Sans oublier, bien sûr, les nombreux ordinateurs, tablettes et autres écrans tactiles connectés entre eux et reliés à un vidéoprojecteur, afin de susciter des échanges avec les autres étudiants et l'enseignant.

#5 Penser design 

Né dans la Silicon Valley, le design thinking a investi les écoles et universités françaises depuis cinq ans. Fondée sur une approche pluridisciplinaire, cette méthode d'innovation consiste à apporter une réponse techniquement réalisable et économiquement viable aux attentes des utilisateurs.

Emblématique de ce courant, la d.school de Stanford a fait des émules, à commencer par la Paris-Est d.school, qui associe l'École des ponts ParisTech, l’ESIEE Paris (École supérieure d’ingénieurs en électrotechnique et électronique), l'ENSAVT (École nationale supérieure d’architecture de la ville et des territoires), l’EIVP (École des ingénieurs de la Ville de Paris) et l'UPEMLV (Université Paris-Est Marne-la-Vallée). Les étudiants travaillent en équipes mixtes sur des projets qui vont de la conception d'un meuble de salle de bain pour les seniors à une caméra infrarouge pour faciliter le travail des pompiers. Leur credo : ne pas se contenter d'avoir des idées, mais les concrétiser.

Design thinking - Paris Est D.school © Ecole des ponts 2013

#6 Téléprésence : être en cours sans y être

Suivre le cours d'un enseignant situé dans une ville voisine ou sur un autre continent, tout en ayant l'impression d'être assis juste en face de lui ? C'est désormais une réalité, permise par les salles de téléprésence immersive, comme celles du campus numérique que construit l'université européenne de Bretagne. Grâce à des outils de partage de documents en direct et des interfaces tactiles, couplés à une sonorisation spatialisée et des images haute définition, l'objectif est de relier entre eux les 76.000 étudiants des 28 établissements membres.

À Lyon, l'EM et Centrale Lyon ont fait l'acquisition d'un robot de téléprésence qui permet à des élèves hospitalisés de suivre leur scolarité presque normalement. "On a l'impression d'être là en personne", témoigne Jeanne, qui a utilisé le robot pendant trois mois.

#7 Twitter en cours

De plus en plus d'enseignants du secondaire, mais aussi désormais du supérieur, expérimentent Twitter en classe.

Qu'il s'agisse de mutualiser des prises de notes grâce à un hashtag commun à l'université Lille 3 ou de poser en direct des questions à un camarade qui fait un exposé à Audencia Nantes, les étudiants disent apprécier ces cours devenus plus collaboratifs.

 #8 La réalité virtuelle ou l'enseignement augmenté

Grandes écoles et universités commencent à tester les possibilités offertes par l'Oculus Rift et les Google Cardboard.  Grâce à ces casques de réalité virtuelle, Audencia propose ainsi une visite de son campus pour les étudiants étrangers présents sur les campus du monde entier.

Le projet Virtualiteach du centre de recherche Clarte explore, lui, les nouvelles pratiques pédagogiques que ces outils peuvent apporter. Visualiser des figures géométriques ou des environnements professionnels fait partie des expérimentations en cours. "La réalité virtuelle permet d'explorer de nouvelles façons d'apprendre, et de travailler sur la mémoire kinesthésique, la mémoire du ressenti, explique Thomas Lopez, chef du projet Virtualiteach chez Clarte. Elle a un autre atout : son côté attractif pour les élèves."

Dispositif V-Station de 3D immersive conçu par le laboratoire Virtualiteach

#9 Les serious games, apprendre en jouant

Les jeux vidéo ne sont plus réservés aux loisirs : ils ont fait leur entrée dans le monde de l'enseignement supérieur depuis quelques années, sous la forme de serious games. Pour le chercheur Julian Alvarez, "ils permettent de contextualiser les enseignements théoriques avec des cas concrets".

L'École des mines de Saint-Étienne a ainsi recours à un jeu sérieux spécialement conçu pour reproduire les situations d'entretien d'embauche et d'entretien annuel d'évaluation. Grenoble École de management a même créé un laboratoire dédié aux serious games.

#10 en Médecine, des centres de simulation pour s'exercer

S'entraîner à perfuser, intuber, réanimer un mannequin avant d'exercer ces gestes sur de véritables patients : voilà l'objectif des centres de simulation en santé qui se développent un peu partout en France.

Les facultés de médecine de Paris-Descartes, Angers ou Brest ont le leur depuis plusieurs années. Fin 2014, c'est au tour de l’université de Nantes d'ouvrir l’École de chirurgie du Grand Ouest. Doté de matériel haut de gamme, celle-ci propose des formations au cours desquelles l'apprentissage se fait sur des simulateurs informatiques, mais aussi sur des cadavres humains et des cochons vivants.

Les universités présentent leurs innovations numériques en deux minutes 
Dans le cadre de son colloque "Université 3.0 : nouveaux enjeux, nouvelles échelles à l'ère numérique", du 27 au 29 mai à Strasbourg, la CPU (Conférence des présidents d'université) a demandé aux universités de réaliser des vidéos de deux minutes pour présenter une ou plusieurs de leurs innovations numériques. Le laboratoire d'autoformation à la pédagogie numérique de Paris-Diderot, la fabrique à Mooc du Cnam, un jeu sérieux en sociologie à l'université de Lorraine... Une soixantaine d'initiatives sont présentées. Des prix récompenseront les meilleures, mercredi 27 mai.
Sylvie Lecherbonnier, Sophie Blitman | Publié le