Violences en collèges et lycées : un quart des personnels de direction s’estiment peu soutenus par leur hiérarchie

Fabienne Guimont Publié le
Alors que Luc Chatel déplorait le manque d’indicateurs sur la violence scolaire lors de ses états généraux sur la sécurité à l’école au printemps 2010, un rapport (1) de l’Observatoire international de la violence à l’école de novembre 2010 donne de précieuses indications statistiques sur la façon dont les personnels de direction des collèges et lycées perçoivent le climat scolaire. Au-delà de l'image renvoyée par les faits divers, puisque cette enquête concerne 20% des établissements.

Proviseurs et principaux trouvent à 73% que le climat dans leur établissement est bon – contre 82% six ans plus tôt - et 6% qu’il est médiocre ou exécrable. Les plus sereins sont ceux exerçant en collèges ruraux classiques (80%) et les moins sereins en établissements classés « ambition réussite » ou en zone urbaine sensible (59%).

Ce qui est très net, c’est la dégradation qu’ils perçoivent dans la relation entre les élèves et les enseignants : un sur quatre en fait mention contre un sur dix dans l’enquête précédente. Les auteurs de l’étude notent également une forte dégradation des relations entre l’établissement et les parents (sans que le nombre d’agressions n’augmente drastiquement) alors que les relations entre élèves ont tendance à s’améliorer. Un quart des personnels de direction déclarent ne pas être soutenus par sa hiérarchie alors qu’ils sont neuf sur dix à se sentir respectés par les parents. Ils se disent respectés par les élèves (à 95 %) et « valorisés par les enseignants » (à 70 %). L’amélioration la plus significative est leur relation avec les corps d’inspection académique : +15% en six ans.

Violences scolaires : de l’inégalité des sanctions

Les personnels de direction ont aussi été interrogés sur les agressions et atteintes subies en 2009-2010. Les violences graves à leur encontre sont rares. En revanche, l’enquête met en évidence des difficultés de gestion des équipes alors que 40% des personnels de direction s’estiment insuffisamment formés à ces tâches, notamment avec des tensions à gérer entre adultes dans les établissements, encore très taboues. « Le problème très particulier du « harcèlement » ou plus prosaïquement des tensions entre les adultes dans les établissements scolaires est plus présent que les difficultés relationnelles avec les parents… qui sont, elles, largement médiatisées et étudiées », écrivent Eric Debarbieux et Georges Fotinos.

Les deux auteurs révèlent aussi que les chefs d’établissement sanctionnent les actes de violence qu’ils enregistrent de manière plus générale, différemment selon que leur établissement accueille des élèves de familles favorisées ou non. « Un directeur d’un établissement situé en « réseau ambition réussite » signale près de trois fois plus de faits de violence qu’un autre. Il organise deux à trois fois plus de conseils de discipline et les élèves de son établissement courent en moyenne trois fois plus de risque d’être exclus temporairement et deux à trois fois plus de risque d’être exclus définitivement », constatent les auteurs. Ce qui contribue, selon eux, à « la dégradation du contrat social de certains milieux populaires avec l’école, voire à sa rupture. Il est probable que cette inégalité renforce les violences «anti-scolaires» ».

(1) Le rapport est intitulé Violence et climat scolaire dans les établissements du second degré en France. Une enquête quantitative auprès des personnels de direction des lycées et collèges de Eric Debarbieux et Georges Fotinos, novembre 2010.

Collèges et lycées : les violences recensées en 2009-2010 sont stables

Les résultats de l’enquête nationale SIVIS (Système d’information et de vigilance sur la sécurité scolaire) montrent une stabilité des actes de violence recensés par les personnels de direction des collèges et lycées en 2009-2010. Si en moyenne 11,2 incidents sont recensés pour 1000 élèves, les différences restent marquées selon le type d’établissement : les lycées professionnels déclarent plus d’actes de violence (17,2) que les collèges (12,2) et les lycées d’enseignements généraux et technologiques (4,3). Un quart des établissements concentrent 70% des actes de violence recensés au cours d’un trimestre.
Trois quarts des actes recensés sont des atteintes aux personnes. Les actes graves relèvent de la violence verbale (à 38 %) - en hausse significative dans les lycées professionnels -, et physique (30 %) - en baisse dans les collèges et lycées professionnels. Les atteintes à la vie privée, le racket et la violence à caractère sexuel sont très minoritaires (entre 1,6 % et 2,6 % chacun). Très médiatisés, le happy slapping (film d’une agression physique) ou l’intrusion d’armes restent marginaux.
Les élèves restent les principaux auteurs (85 %) et victimes des violences scolaires, devant les personnes extérieures à l’établissement (14,5 %). Les personnels des collèges et lycées sont un peu plus agressés et les enseignants restent les principales cibles de ces violences essentiellement verbales. Les garçons sont plus auteurs ou victimes de ces violences que les filles. Les personnels représentent 55% des personnes agressées par les garçons contre 62% pour les filles.

Fabienne Guimont | Publié le