Un "établissement d’enseignement supérieur privé délivrant des formations universitaires à distance". Voilà comment se présente la FOP (Faculté ouverte de Paris). Ce nouveau venu dans le paysage de l'enseignement supérieur a fait sa première rentrée en septembre 2014 avec une particularité : outre des formations certifiantes et professionnelles, la FOP délivre une L3 d'AES (administration économique et sociale) et un M1 C3S (cadres du secteur sanitaire et social), grâce à un partenariat avec l'UPPA (Université de Pau et des pays de l'Adour).
"Ces cursus diplômants s'adressent notamment à de jeunes salariés ou à des étudiants francophones, souligne Jean-François Pradeau, responsable des formations de la FOP. De fait, cette année, sur la quinzaine d'étudiants de L3, on compte de nombreux titulaires de BTS qui travaillent et ne trouvent pas de cours du soir à l'université adaptés à leurs besoins. Quant aux 56 inscrits en M1, il s'agit en majorité d'infirmières qui souhaitent continuer à se former."
Jusqu'à dix fois le prix d'une formation universitaire en présentiel
Concrètement, ces cours à distance prennent la forme de contenus multimédias diffusés sur une plate-forme spécifiquement conçue pour la FOP : après une introduction en vidéo, le texte du cours magistral est disponible en totalité au début du semestre, tandis que des séquences de deux heures correspondant aux TD sont mises en ligne au fur et à mesure.
Par ailleurs, l'étudiant peut échanger avec l'enseignant en dehors des cours via la plate-forme. Il a aussi "accès à un outil de création : il est par exemple possible de s'enregistrer ou se filmer pour faire un exposé que l'enseignant pourra valider et mettre à disposition de toute la promo", précise Jean-François Pradeau.
Un service qui a un prix : "De 900 à 1.800 euros pour la L3 et de 1.500 à 3.000 euros pour le M1", annonce Jean-François Pradeau, qui explique que "les prix sont indexés sur les revenus de référence".
Si ces tarifs vont bien au-delà des montants fixés par le ministère de l'Enseignement supérieur (184 euros en licence, 256 en master), ils rejoignent ceux pratiqués par certaines universités, comme Assas, qui demande pour sa licence de droit en e-learning ouverte en 2013 des frais spécifiques à l’enseignement à distance liés à l’enregistrement des cours et au développement de la plate-forme.
À la tête de l'UPPA, Mohamed Amara assume le partenariat. "Il n'y a pas de concurrence avec l'offre de l'université en tant que telle car la FOP n'inscrit pas d'étudiants présents sur notre territoire, fait valoir le président. C'est un service supplémentaire que nous offrons, et visiblement, il y a une demande de la part de jeunes qui ont besoin de maîtriser leur emploi du temps."
Visiblement, il y a une demande de la part de jeunes qui ont besoin de maîtriser leur emploi du temps.
(M.Amara - UPPA)
Une "opportunité" pour Pau
Par ailleurs, ce type de convention n'est pas nouveau : les universités catholiques ont mis en place de tels partenariats depuis de nombreuses années – et demandent elles aussi des frais d'inscription majorés. Cependant, misant sur l'encadrement personnalisé des étudiants, les facs cathos recrutent, au moins en partie, leur propre équipe pédagogique.
La FOP, en revanche, n'a pas de corps enseignant : ce sont les personnels de l'UPPA qui dispensent les cours, activité pour laquelle ils sont rémunérés dans le cadre d'un contrat de vacations, le cumul ayant été autorisé par l'université.
En effet, celle-ci trouve plusieurs avantages à ce partenariat : outre le fait que la plate-forme est gratuitement mise à disposition des étudiants inscrits à l'UPPA sous le régime classique, les frais d'inscription universitaires proprement dits sont reversés à la faculté de droit. "Une source financière non négligeable en ces temps d'austérité", reconnaît Mohamed Amara.
Mais plus que ce bénéfice direct, le mathématicien se dit surtout "intéressé par l'expérience acquise par les équipes pédagogiques". Les enseignants-chercheurs ont été accompagnés sur les aspects techniques par l'équipe de la FOP, et le président espère renouveler ensuite l'expérience en interne avec les moyens de l'université. Développer des plates-formes de e-learning semble d'autant plus important que l'UPPA est un établissement multi-sites, dont certains sont confrontés à une pénurie d'enseignants. Dans ce cadre, la FOP est apparue comme une opportunité pour "faire bouger le droit" et inciter les enseignants à s'investir dans les cours en ligne. Alors que la convention de partenariat est signée pour un an, le président de l'université entend proposer son renouvellement au conseil d'administration au printemps 2015.
"Externaliser des formations à distance peut être une manière de se faire la main en limitant les risques, pourquoi pas, mais ce n'est pas une stratégie astucieuse à long terme", estime Sylvain Vacaresse, maître de conférences associé à Rennes 1, responsable d'un master et consultant en e-learning. Pour ce spécialiste, "les universités ont intérêt à récupérer la gestion de ces services d'enseignement en ligne : le e-learning représente de réelles ressources financières et est au cœur de leur métier. Sinon, prévient-il, elles ne feront que s'appauvrir et ne serviront qu'à tamponner les diplômes…"
Créée en 2013 sous la forme d'une association loi 1901, la Faculté ouverte de Paris propose, depuis la rentrée 2014, des formations entièrement à distance, dont les deux diplômes de L3 et M1 en partenariat avec l'UPPA (Université de Pau et des pays de l'Adour).
"Administrée par un conseil d’administration", elle compte une petite dizaine de salariés et est "dotée d'un conseil scientifique", indique le site Internet qui en affiche les quatre membres : Monique Labrune, directrice éditoriale des Presses universitaires de France, Olivier Faron, directeur général du Cnam, le politologue de Sciences po Dominique Reynié, directeur général de la Fondation pour l’innovation politique, et Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des économistes. Des noms prestigieux qui visent à asseoir la crédibilité scientifique de la FOP. Mais aux dires de plusieurs de ses membres, le conseil n'a pas été réuni depuis sa création.
Sur le plan financier, "il faut trois ans avant d'atteindre l'équilibre", estime Jean-François Pradeau, qui détaille les objectifs de développement : étendre l'offre de formation en ouvrant une L1 en 2015, suivie d'une L2 l'année suivante. À plus long terme, il s'agit aussi de commercialiser la plate-forme fabriquée par Épiméthée, une société qui appartient aux fondateurs de la FOP.