C. Deumié (Centrale Marseille) : "Nous avons besoin de former davantage d'ingénieurs sur notre territoire"

Clément Rocher Publié le
C. Deumié (Centrale Marseille) : "Nous avons besoin de former davantage d'ingénieurs sur notre territoire"
Centrale Marseille souhaite accroître son rayonnement en France et à l'international. // ©  Centrale Marseille
L'école Centrale de Marseille souhaite accroître son rayonnement sur le territoire d'Aix-Marseille mais aussi à l'international en incitant les échanges académiques et les partenariats économiques. Carole Deumié, directrice de l'école d'ingénieurs, évoque son projet de transformation pour l'établissement.

L’école Centrale de Marseille est la plus grande école d'ingénieurs de la région. Comment maintenir ce haut niveau d'attractivité et d'excellence ?

En quinze ans, Centrale Marseille a effectué une progression extrêmement rapide après son entrée dans le groupe des écoles Centrale. L'établissement a convaincu par son dynamisme, par la qualité de son offre de formation et de son environnement de recherche. L'école s'est ancrée sur l'ensemble de son territoire avec des partenaires académiques - École de l'Air, Sciences po Aix - et du monde socio-économique afin de créer une offre de formation attractive.

Carole Deumie-Centrale Marseille
Carole Deumie-Centrale Marseille © Centrale Marseille

L'idée est de miser sur cette dynamique acquise et accélérer le développement de l'école sur l'ensemble de la région. Cela passe par le recrutement de plus d'étudiants, pas seulement sur le diplôme d'ingénieur, mais en ouvrant aussi des diplômes complémentaires, de manière à construire une offre de formation attractive. Il faut continuer à déployer l'école pour lui donner encore plus de visibilité.

Vous souhaitez donc accueillir plus d'étudiants dans les années à venir. Comment envisagez-vous cette évolution ?

Nous avons besoin de former davantage d'ingénieurs et de managers scientifiques sur notre territoire. L'ensemble de la région forme près de 6.000 étudiants au niveau ingénieur, c'est largement insuffisant. Centrale Marseille contribue à hauteur de 250 diplômés ingénieurs par an. On va chercher à augmenter les effectifs sur le diplôme d'ingénieur, ce qui va nous amener à déployer d'autres partenariats, pour atteindre au moins 300 diplômés par an, voire plus. Cela si l'école arrive à mobiliser les moyens pour se développer sans dégrader sa qualité d'encadrement.

Sur les formations de masters, nous avons pour objectif d'avoir une centaine de diplômés d'ici cinq ans. Nous allons chercher à développer des masters internationaux pour attirer un public étranger mais aussi travailler à développer la formation continue de manière plus offensive.

Pouvez-vous nous parler de la nouvelle identité que vous voulez donner à Centrale Marseille ?

Nous avons établi une plateforme de marque qui nous guide. Cette nouvelle identité permet de nous affirmer sur les enjeux de responsabilité sociétale et environnementale. Nous portons des valeurs qui restent inclusives et très à l'écoute de la diversité de notre territoire et de nos publics. Nous travaillons cette notion d'ouverture avec des partenariats locaux pour avoir une offre plus dynamique, notamment avec Sciences po Aix pour développer les aspects sociologiques. Il faut ouvrir les consciences et apporter dans la formation des sciences sociales, des sciences de gestion, etc.

Nous devons aussi être attentifs aux besoins de nos entreprises pour déployer une offre de formation adaptée et qui soit capable d'apporter des compétences dans le champ du management et du leadership. Sur les enjeux organisationnels, nous avons un double diplôme avec l'IAE Aix-Marseille. Nos ingénieurs doivent être capables de développer des programmes qui ont du sens et évaluer l'impact de leurs actions. Ils ont besoin d'être armés et éduqués pour devenir plus tard des acteurs des transformations des industries de notre monde. Notre marque porte ce sens des responsabilités.

On retrouve cette notion d'ouverture dans votre nouvelle organisation en interne...

Tout à fait. A Centrale Marseille, nous partageons une forte volonté de changer le mode de fonctionnement de l'organisation interne. Nous souhaitons développer une forme d'intelligence collective et partager les enjeux le plus largement possible. Nous avons mis en place au sein de la gouvernance un pôle de prospective qui va nous donner la possibilité de regarder loin devant.

Nous avons déployé un ensemble de comités qui vont contribuer aux axes stratégiques de l'établissement; Ils vont aussi apporter des pistes de réflexion sur l'aménagement du campus. On a ouvert une cellule d'open innovation dans laquelle nous souhaitons embarquer l'ensemble de la communauté et où chacun peut apporter ses idées. Cette belle dynamique lancée en pleine période de crise sanitaire a mobilisé pour l'instant près de 80 personnes.

Comment se présente actuellement la stratégie d'internationalisation de l'établissement ?

Centrale Marseille bénéficie d'un réseau de partenaires avec plusieurs ancrages dans le monde. Nous assurons une mobilité internationale - six mois minimum à l'étranger - à tous nos étudiants grâce au réseau T.I.M.E. (Top International Managers in Engineering) avec le groupe des écoles Centrale. Nous profitons de cette dynamique du groupe qui a lui-même une forte stratégie de développement à l'international, notamment sur les doubles diplômes de niveau master.

Centrale Marseille dirige par ailleurs le réseau méditerranéen des écoles d'ingénieurs (REMI) qui rayonne sur toute la Méditerranée – environ 150 membres dans 20 pays. On développe avec ce réseau des partenariats à mission, des programmes qui permettent de faciliter l'accès aux stages en entreprise pour les étudiants issus du bassin méditerranéen.

On travaille aussi actuellement sur des partenariats stratégiques pour développer la dimension internationale de l'école. Nous avons 25% d'étudiants étrangers sur l'ensemble de nos promotions, un chiffre qu'on souhaite faire augmenter significativement pour avoir un rayonnement beaucoup plus large. On va surtout miser sur nos diplômes de masters internationaux (un en environnement et un en bio-ingénierie). On est en train de développer un accord de double diplôme avec l’université du Caire en Égypte pour augmenter significativement le flux d'étudiants étrangers.

Vous renforcez la dimension recherche de l'école avec la création de cinq nouvelles chaires dans ces prochaines années. Quels sont vos objectifs en matière de recherche ?

L'établissement possède un fort ancrage recherche sur le site d'Aix-Marseille : l'école est co-tutelle - avec Aix Marseille Université et le CNRS - de huit laboratoires qui couvrent un grand nombre de secteurs. Cette dynamique de site permet d'associer nos forces. Notre ambition en tant qu'école d'ingénieurs est de contribuer à développer la qualité de la recherche. Elle vise également à mettre en relation l'excellence scientifique de nos chercheurs et des laboratoires avec les besoins des entreprises et des partenaires. Cela se traduit notamment par la création de programmes de chaire pour augmenter la production scientifique sur notre territoire.

L'école va s'engager dans une définition de politique de recherche de manière à mieux percevoir les besoins de son territoire. Nous allons préciser les thématiques de recherche. Actuellement, l'école se positionne sur des sujets clés comme l'énergie, la mer, l'aérospatiale, l’imagerie et la biotechnologie. Nous sommes aussi en train de créer un espace de 4.000 m2 – appelé creativity center – avec un pré-incubateur pour donner aux étudiants la confiance et l'accompagnement dont ils ont besoin pour lancer des projets d'innovation.

Clément Rocher | Publié le