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Grandes écoles : l'insertion et les salaires des diplômés atteignent des records mais les écarts femmes-hommes persistent

Étienne Gless Publié le
Grandes écoles : l'insertion et les salaires des diplômés atteignent des records mais les écarts femmes-hommes persistent
Les écarts salariaux entre les hommes et les femmes restent le point mort de l'insertion professionnelle des jeunes diplômés. // ©  DEEPOL by plainpicture/Daniel Ingold
EMPLOI. La 31e enquête d’insertion des diplômés de la Conférence des grandes écoles (CGE) affiche des résultats meilleurs que jamais sur nombre d’indicateurs. Seule ombre persistante au tableau : les conditions d’entrée dans la vie active restent moins bonnes pour les femmes que pour les hommes.

Taux d’emploi, salaires, conditions de recrutement, taux de satisfaction de l’emploi… Quand tous les indicateurs d’insertion des diplômés de grandes écoles sont au vert, le risque de verser dans l’autosatisfaction n’est jamais loin : "Nombre de résultats de cette enquête sont les meilleurs jamais obtenus, se félicite Laurent Champaney, président de la Conférence des grandes écoles (CGE). Les grandes écoles demeurent un modèle fiable, solide, une garantie d’excellence des apprentissages et de débouchés intéressants dans la vie professionnelle."

La 31e enquête d’insertion des diplômés de grandes écoles, publiée mercredi 14 juin 2023, affiche cette année encore des indicateurs très flatteurs, sauf sur un point, les inégalités de genre qui persistent. Les femmes diplômées de grandes écoles démarrent à nouveau leur carrière dans des conditions d’emploi plus précaires et continuent d’être moins bien rémunérées que les hommes.  

90,5% des diplômés de grandes écoles en emploi

Le taux net d’emploi de l’ensemble de diplômés – déjà élevé en 2022 – progresse encore de 0,7 point dans l’enquête 2023 et s'élève désormais à 90,5%. Mais seuls les ingénieurs voient leur taux net d’emploi progresser sensiblement, de +2 points sur un an pour atteindre 93, 1%. Pour les diplômés d'école de management, il présente un léger recul (87,7%, -0,9 point) tandis que pour ceux issus des 27 écoles d’autres spécialités (arts, architecture, IEP, ENS, etc.), il reste stable à 86% (+0,1 point).

Les conditions de recrutement progressent elles aussi. L’embauche ultra rapide en moins de deux mois après la sortie de l’école concerne huit diplômés sur dix. Plus de deux élèves sur trois (68,6%) décrochent même leur contrat de travail avant d'obtenir leur diplôme.

La part d’emplois en CDI progresse de 3,7 points cette année après une hausse de 4,7 points l’an passé. Elle s’élève à 88,1% pour les managers, 87,1% pour les ingénieurs mais seulement à 65,2% pour les diplômés d’écoles d’autres spécialités.  

Dernier indicateur de la qualité de l’insertion des diplômés de grande école, la part d’emplois cadres progresse de 1,3 point pour atteindre 87,4% – dépassant même les 90%, pour les ingénieurs.  

Des salaires hors primes au plus haut, en hausse de 4,5% sur un an

Pour les diplômés travaillant en France, le salaire brut annuel moyen (hors primes) s’établit à 38.184 euros, soit +4,5% sur un an. Les jeunes managers sont recrutés à un salaire de 39.332 euros (+3,1%), les diplômés des écoles d’autres spécialités à un salaire de 38.249 euros (+5,7%) tandis que les ingénieurs ferment la marche avec un salaire de 37.601 euros (+4,9%).

Pourtant, on peut noter que l’écart de salaire annuel brut moyen entre les managers et les ingénieurs se réduit : il n’est plus que de 1.700 euros en 2023 en faveur des managers contre 2.300 euros l’an passé.  

Ces excellentes rémunérations en début de carrière méritent d’être nuancées : interrogés sur leur taux de satisfaction de leur emploi, les jeunes diplômés de grandes écoles sont assez nombreux à ne pas être satisfaits de leur niveau de salaire. Si le taux de satisfaction dépasse les 80% voire les 90% pour l’autonomie, les conditions de travail ou les relations avec les collègues, il n’est que de 64,4% pour le niveau de salaire.

L’entrée dans la vie active des femmes reste moins facile que celle des hommes

Les femmes sont les plus nombreuses à se déclarer insatisfaites de leur salaire. Logique : l’écart de salaire moyen annuel entre hommes et femmes diplômés en 2022 est de 5,5%, stable par rapport à la promotion précédente. Il ressort à 39.000 euros pour les hommes et à 36.949 euros pour les femmes. Un écart qui a peu varié depuis 15 ans, oscillant chaque année entre 5 et 7%.

Si la situation ne se dégrade pas pour les jeunes femmes diplômées de grandes écoles, elle ne s’améliore pas non plus. Outre leurs salaires, leurs conditions d’entrée dans la vie active restent moins bonnes que celles des hommes. Pour les femmes diplômées en 2022, l’accès au graal du CDI pour un premier emploi est plus difficile. Elles sont 19% à travailler en CDD alors que les hommes ne sont que 9,4%. C'est plus du double.

Des carrières internationales en recul ?

Fini le manager international ou l’ingénieur qui s’expatrie en tout début de carrière ? Pas complètement mais la page de la "mondialisation heureuse" semble définitivement tournée. Les jeunes diplômés sont toujours moins nombreux à débuter leur carrière à l'international : ils ne sont que 11,1% à décrocher leur premier poste hors de France en 2023 contre 11,7% l'an dernier.

Seuls 8,3% des ingénieurs démarrent leur carrière hors de France contre 14,1% des managers. Le contexte géopolitique explique ce repli dans les frontières de l'Hexagone : fermeture totale de la Chine durant la crise sanitaire, préférence pour les compétences nationales aux États-Unis, guerre en Ukraine depuis 2022 et retrait d'entreprises françaises en Russie.

Le premier pays où les jeunes diplômés de grandes écoles démarrent leur carrière est actuellement... la Suisse ! En tout, 13,9% des diplômés y démarrent leur carrière, loin devant le Royaume-Uni qui n'en finit pas de payer l'addition du Brexit (8,6% des diplômés).

La politique RSE de l’entreprise, un critère marginal de choix d’un emploi

Protection de l’environnement, lutte contre les inégalités, ouverture sociale sont dans toutes les têtes. Pourtant, la politique RSE de l’entreprise n’est que le 9e critère de choix, cité par 8% des sondés. Néanmoins, ce pourcentage est en hausse de deux points sur un an. Les principaux critères de choix d'un emploi restent le contenu des missions proposées (71,6%), l’adéquation du poste avec le projet professionnel (50,6%) et le niveau de salaire proposé (40,4%).

"Il nous faut collectivement soutenir les efforts engagés pour combattre les biais femmes-hommes qui persistent en matière d’insertion." Nicolas Glady, vice-président de la CGE chargé de la formation et des carrières

La RSE n’est néanmoins pas absente de leur premier job : elle est même la mission principale de 15,6% des jeunes diplômés. Elle figure aussi comme mission complémentaire hors de leur fonction principale pour 22, 8% d’entre eux. Au total, quatre diplômés sur dix s'occupent donc de RSE. Enfin, huit diplômés sur dix en poste estiment que leur entreprise actuelle se préoccupe de la transition écologique.

"Nous devons dans nos écoles poursuivre nos efforts qui permettent à nos étudiants d’aborder les enjeux liés aux transitions en cours et d’acquérir toutes les compétences nécessaires pour y faire face et trouver des solutions", convient Nicolas Glady, vice-président de la CGE chargé de la formation et des carrières. Comme la lutte contre les inégalités de genre, la transition vers des formations plus soucieuses du développement durable est une longue marche !

Méthodologie de l'enquête insertion 2023 de la CGE

Réalisée avec l'ENSAI, l'Ecole nationale de la statistique et de l'analyse de l'information, l'enquête annuelle insertion de la CGE a été réalisée entre décembre 2022 et mars 2023. Près de 194 établissements membres de la CGE sur 199 ont répondu à cette 31e édition de l'enquête et transmis le questionnaire à leurs diplômés des trois dernières promotions (2020, 2021, 2022). Au total, 100.557 questionnaires étaient exploitables.

Étienne Gless | Publié le