Enseignement supérieur : les chantiers de Najat Vallaud-Belkacem

Camille Stromboni Publié le
Enseignement supérieur : les chantiers de Najat Vallaud-Belkacem
Universite de Reims Champagne-Ardenne - CStromboni fev2013 // © 
Nommée à la tête du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Najat Vallaud-Belkacem n'aura pas seulement la rentrée scolaire parmi ses dossiers urgents. Les tensions et demandes sont également nombreuses dans la communauté universitaire. Quels sont les chantiers qui attendent la nouvelle ministre, accompagnée sur ce volet par la secrétaire d'État Geneviève Fioraso ?

Najat Vallaud-Belkacem - Education nationale - ©Yves Malenfer/MatignonLe budget, toujours au cŒur des préoccupations

C'est le premier sujet d'inquiétude des universitaires : le manque de moyens financiers. Les nouvelles coupes budgétaires annoncées dès 2014 et pour les trois années à venir promettent une situation de plus en plus tendue. Najat Vallaud-Belkacem, numéro 4 du gouvernement, sera donc, avant tout, attendue sur sa capacité à défendre le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Avec la multiplication des déficits et des plans d'économies budgétaires, les universités voient en effet leur situation financière se dégrader un peu plus chaque année. L'augmentation des coûts pour les établissements – principalement due à la masse salariale – n'étant pas compensée par le maintien d'un budget stable sur l'enseignement supérieur et la recherche.

Université Versailles - Saint-Quentin - Reunion président-personnels - ©C.Stromboni-Nov2013

Avec un cas extrême : l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, qui a frôlé la cessation de paiements à la fin de l'année 2013. Elle n'a pu équilibrer ses comptes qu'avec un soutien supplémentaire de l'État de 800.000 euros, sous peine de ne plus pouvoir verser les salaires de ses personnels, puis encore de 2,6 millions d'euros. Il s'agit d'avances "remboursables", a bien précisé le ministère, bien qu'un remboursement à court terme semble peu probable.

Une crise a également touché l'université Montpellier 3, qui menaçait de fermer son antenne de Béziers, dénonçant une situation catastrophique due au manque de moyens de la part de l'État.

De manière globale, beaucoup d'universités ont "gelé" des postes – c'est-à-dire qu'elles ne les ont pas pourvus – et effectué des coupes dans les enveloppes des services et des composantes. Une situation que les universitaires jugent intenable à long terme. Avec une crainte particulière concernant l'emploi scientifique, qui pourrait vivre des années "blanches" en termes de recrutement dans certaines disciplines. Le CoNRS s'est réuni en juin 2014 pour alerter sur la dégradation de la situation.

Fusions, associations, communautés : les regroupements universitaires en construction

Les regroupements universitaires font partie des chantiers sensibles en cours. La loi sur l'enseignement supérieur et la recherche, votée à l'été 2013, a prévu trois modes de rassemblement pour les universités et les écoles d'un territoire : la fusion, la communauté et l'association. Avec pour objectif de limiter à une trentaine de pôles le paysage universitaire français.

Résultat : la nouvelle carte des universités est presque stabilisée, malgré la protestation d'un certain nombre d'acteurs de l'enseignement supérieur au début de l'été 2014. Une majorité de sites ont clairement fait leur choix, avec des jeux d'imbrications parfois complexes, tandis qu'un petit nombre poursuivent encore leur réflexion (voir notre carte de France des regroupements universitaires). Une fois les statuts adoptés et les décrets parus, il faudra mettre en place ces nouvelles structures.

Universités - Ecoles - Carte de France des regroupements universitaires - été 2014

L'heure est également à la mise en œuvre, pour les diverses autres mesures de la loi ESR, par exemple la licence progressive avec une nouvelle nomenclature des diplômes. Plusieurs décrets sont également en attente, notamment sur le futur HCERES (Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur), qui doit succéder à l'Aeres (lire notre dossier : Les points essentiels de la réforme Fioraso).

La sélection à l'université : vers une clarification ?

Benoît Hamon s'est prononcé contre la sélection en master, lors d'une passe d'armes avec Patrick Hetzel à l'Assemblée nationale. Sans pour autant annoncer de mesures particulières pour y mettre fin. Plusieurs acteurs, comme la CPU (Conférence des présidents d'université) et les syndicats étudiants, notamment l'Unef, ont de leur côté exprimé leur souhait d'ouvrir le débat et de clarifier la situation.

La question se pose également de plus en plus à l'entrée de la licence : outre les doubles licences, qui opèrent une sélection sur dossier, plusieurs licences demandent des prérequis, ce qu'a dénoncé l'Unef dans son enquête annuelle sur les frais illégaux et la sélection à l'université. Sans oublier l'afflux dans certaines filières, comme les Staps, qui donne lieu à une sélection par tirage au sort.

Université Paris 4 Sorbonne - Clignancourt - Pré-rentrée - Licence 1 Histoire © E.Vaillant-C.Stromboni sept2013

Et aussi...

#Idex2. La course aux millions est relancée, pour les universités qui avaient été recalées lors de la saison 1 des Investissements d'avenir, lancés sous le ministère de Valérie Pécresse. Une nouvelle compétition s'ouvre en 2014, dotée cette fois-ci de 3,1 milliards d'euros de capital. Dossiers des candidats, oraux, résultats... les deux années qui viennent devraient se dérouler au rythme de la sélection des Initiatives d'excellence, sur laquelle les orientations du futur ministre pourront avoir toute leur importance.

#Sympa2. Sujet épineux : une réforme est en cours concernant le modèle d'attribution des moyens aux universités, dénommé "Sympa".

Lire aussi
- La biographie EducPros de Geneviève Fioraso
- La biographie EducPros de Benoît Hamon

- Notre bilan des deux premières années de Geneviève Fioraso à l'Enseignement supérieur et à la Recherche
- Les chantiers sur l'enseignement supérieur qui attendaient Benoît Hamon , lorsque celui-ci a pris la tête du ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche en avril 2014.

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