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En Bourgogne Franche-Comté, la Comue se scindera en deux EPE début 2025

Camille Jourdan Publié le
En Bourgogne Franche-Comté, la Comue se scindera en deux EPE début 2025
Après l'échec de la Comue Bourgogne Franche-Comté, deux universités portent leur propre projet d'établissement.t // ©  David CESBRON/REA
Après l'échec de la Comue Bourgogne Franche-Comté, deux universités portent leur propre projet d'établissement public expérimental (EPE) pour début 2025. EducPros fait le point sur la situation.

À compter du 1er janvier 2025, il y aura deux établissements publics expérimentaux (EPE) en Bourgogne Franche-Comté : le premier, porté par l'université de Bourgogne (UB) et le second, emmené par l'UFC (université de Franche-Comté).

L'échec de la Comue Bourgogne Franche-Comté

Le regroupement de ces deux universités au sein d'une Comue (communauté d’universités et établissements) s'était soldée par la sortie de l'UB et d'un autre établissement dijonnais, la Burgundy School of Business (BSB), après un vote fin 2022.

Bien qu'annulé par le tribunal administratif, pour des questions de procédure, ce vote du conseil d'administration de l'UB a finalement été réitéré pour acter une sortie effective fin mars 2024.

Aux origines de cette rupture : un déséquilibre numéraire entre les personnels dijonnais moins nombreux que les bisontins, un différend autour du siège de la Comue – décrété à Besançon –, et en toile de fond, des tensions politiques historiques entre les deux ex-régions réunies en une.

Le coup de grâce, pour Vincent Thomas, président de l'université de Bourgogne, arrive en 2021, avec la perte du label I-site. "La Comue avait été créée pour obtenir ce label, donc elle n'avait plus d'objet", justifie-t-il.

Un premier projet porté par l'université de Bourgogne

C'est dans ce contexte que naît le premier projet d'établissement public expérimental, l'EPE Université Bourgogne Europe, avec l'UB en tête de file.

À ses côtés, l'École nationale supérieure d'art (ENSA) et l'École supérieure de musique de Bourgogne Franche-Comté (ESM) seront des composantes de l'établissement expérimental.

De son côté, BSB sera un membre associé, "mais le président de l'UB nous a toujours considérés comme un membre fondateur", remarque Stephan Bourcieu, directeur général de l'école de management.

Trois écoles d'ingénieurs dijonnaises (le Cesi, l'Eseo et l'ESTP), l'École supérieure des arts appliqués de Bourgogne (ESAAB) basée à Nevers, ainsi que le CHU de Dijon et le Centre de lutte contre le cancer Georges-François Leclerc (CGFL) seront également des membres associés, tandis que le Crous de Bourgogne Franche-Comté et le campus dijonnais de Science po Paris seront intégrés en tant que partenaires.

Soit au total douze entités, en grande majorité dijonnaises.

Avec la disparition de la Comue, un autre EPE menée par l'UFC en construction

En parallèle, la Comue, toujours active, a annoncé sa future disparition pour laisser place à un autre EPE, emmené par l'UFC (université de Franche-Comté).

Trois écoles d'ingénieurs se trouvent parmi les partenaires déjà annoncés :  l'université de technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM), SupMicrotech-ENSMM et Arts et Métiers Campus de Cluny, tous trois membres de la COMUE.

Contactées par EducPros, les directions de l'UFC, de l'Ensam Campus de Cluny, de l'ENSMM, ainsi que l'administrateur provisoire de la Comue BFC n'ont pas souhaité répondre à nos questions, préférant attendre le retour du ministère sur le projet de l'EPE emmené par l'UFC.

L'Institut Agro, dernier pilier de la Comue, a fait le choix, lui, de "n'intégrer aucun des deux EPE", rapporte Delphine Ancien, directrice de cabinet d'Anne-Lucie Wack, directrice générale de l'établissement. L'école préfère établir "une convention d'association avec chacun des deux EPE", dans une "perspective de poursuite d'une collaboration étroite" avec chacun d'entre eux.

Quels impacts sur les financements pour l'EPE Université Bourgogne Europe ?

Pour Stéphanie Benoist, responsable de la section Sgen-CFDT de l'Université de Bourgogne, cette future configuration s'annonce "déséquilibrée". Elle craint en effet que la force de frappe pour obtenir des financements pour la recherche soit amoindrie pour l'EPE Université Bourgogne Europe, dont le nombre de chercheurs sera diminué par rapport à l'ex-Comue et par rapport au futur EPE de l'UFC.

"Et les domaines de la culture et de la musique ne sont pas les priorités du gouvernement", remarque Stéphanie Benoist, faisant référence aux écoles partenaires de l'UB. Vincent Thomas défend au contraire une "augmentation de 35% des signatures scientifiques" de l'UB, ainsi que "des formations et des compétences dans la recherche que nous n'avons pas aujourd'hui."

Le président a également l'ambition d'ancrer son EPE sur le plan international, notamment grâce à son intégration à l'Alliance FORTHEM, qui regroupe neuf universités européennes.

Un pilotage facilité pour l'université de Bourgogne

Stephan Bourcieu, à BSB, se réjouit surtout de "l'unicité territoriale" que permettra ce nouvel EPE. "Il y a de véritables synergies à établir en termes de vie étudiante, de recherche, ou de politique internationale", estime-t-il, citant déjà un diplôme commun avec l'Eseo et l'intégration du laboratoire BSB dans l'école doctorale droit-économie-gestion-sciences politiques de l'UB.

"L'EPE favorise les coopérations et pourra être porteur de réponses à des appels d'offres ou à des appels à manifestation d'intérêt, et donc à des financements", assure le directeur général de BSB.

Ceci ne suffit pas à rassurer Stéphanie Benoist, qui note cependant "qu'avec seulement deux écoles composantes, la prise de décision sera plus fluide qu'au sein de la Comue. L'UB ne se fera plus imposer des décisions".

Pour BSB, la "proximité" et le "leadership" de l'UB seront, sur ce point, un avantage. "Avec la Comue, il y avait deux universités têtes de file qui n'étaient pas toujours en ligne, et qui n'avaient pas les mêmes priorités que peuvent avoir les établissements dijonnais", note-t-il.

Le Sgen-CFDT aurait toutefois préféré que ces tensions se résolvent à travers un EPE avec deux universités composantes, en fusionnant ou non. "Pourquoi la Bourgogne Franche-Comté serait-elle la seule région de France où il y aurait un seul établissement ?", tranche Vincent Thomas, pointant le vaste territoire de cette région.

Une convention de coordination territoriale entre les deux EPE

Le président de l'université de Bourgogne affirme toutefois que les deux EPE signeront une "convention de coordination territoriale". "Elle aura vocation à piloter les objets communs", notamment certains programmes d'investissements d'avenir (PIA) ou des graduate schools… "Nous continuerons à travailler ensemble, autour de laboratoires, d'appels à projets communs", assure-t-il.

"Ce n'est pas parce qu'il y a deux EPE qui répondent à deux logiques territoriales différentes qu'on ne doit pas se parler, au contraire", renchérit Stephan Bourcieu.

Ce nouveau départ suffira-t-il à effacer les tensions passées ? Les échelles choisies seront-elles un frein au rayonnement national et international des deux nouveaux établissements ? Premières réponses prévues à compter du 1er janvier 2025, sous réserve de la validation des deux projets par le ministère.

Camille Jourdan | Publié le