L. Adoui (université de Caen) : "L'attractivité est une question quotidienne"

Camille Jourdan Publié le
L. Adoui (université de Caen) : "L'attractivité est une question quotidienne"
UFR Santé de l'université de Caen // ©  Université de Caen Normandie
Membre de la Comue de Normandie, l'université de Caen accueille plus de 30.000 étudiants, sur 13 campus et sites, dans trois départements. Pour mettre en œuvre son projet d'établissement 2022-2026, elle multiplie les projets, notamment avec les acteurs du territoire. Son président, Lamri Adoui, répond aux questions d'EducPros.
Lamri ADOUI
Lamri ADOUI © Normandie Université

Le pôle universitaire d'innovation (PUI), porté par la Comue de Normandie, a été retenu pour entrer en phase d'amorçage cette année. Quels en sont les principaux axes ?

Ce PUI vise à coordonner les efforts d'innovation au niveau régional. Il a notamment permis de développer plusieurs dispositifs, dont Normandie Valorisation, un modèle innovant auquel les établissements d'enseignement supérieur de la Communauté d'universités et établissements (Comue) ont confié leur stratégie d'innovation et de transfert d'innovations issues de leurs laboratoires de recherche.

Un incubateur de start-up, Normandie Incubation, a également été lancé dans le cadre de ce PUI. La validation de la phase d'amorçage permettra de poursuivre ces différents projets.

L'université de Caen vient également de signer une convention avec l'association Normandie Web Experts. Dans quel contexte ce partenariat a-t-il vu le jour ?

Dans le domaine de la cybersécurité, l'université de Caen est lauréate d'un appel à projets Compétences et Métiers d'Avenir (CMA). Les cinq millions d'euros accordés permettront de financer d'une part des formations, destinées à des spécialistes, et d'autre part, des actions d'acculturation, visant le grand public.

C'est dans ce cadre qu'a été signée la convention avec l'association Normandie Web Experts, un collectif régional des professionnels de la filière numérique.

Ce partenariat servira à proposer aux acteurs régionaux des actions de formation continue à leurs collaborateurs.

En effet, les appels à projets Compétences et Métiers d'Avenir impliquent des liens forts avec le monde économique. Or, les enjeux de cybersécurité concernent tant les grandes entreprises que les plus petits entrepreneurs.

Ce partenariat servira notamment à proposer aux acteurs régionaux des actions de formation continue à leurs collaborateurs.

De quelles autres manières peuvent se traduire ces programmes Compétences et Métiers d'Avenir ?

Ils peuvent prendre des formes variées : écoles d'été, formations de formateurs, nouveaux modules de formations au sein de masters existants, ou même création de masters ex-nihilo.

Au total, l'université de Caen a été lauréate de sept projets, dans la cybersécurité, mais aussi la santé, le nucléaire… Ils permettront de financer des actions susceptibles modifier l'offre de formations.

Quelles sont vos relations avec l'école d'ingénieurs Ensicaen, alors même que l'université de Caen abrite sa propre école, l'ESIX ?

Nous ne sommes pas concurrentes. Nos deux écoles d'ingénieurs ne proposent pas des formations dans les mêmes domaines. De plus, l'ESIX est présente à Caen, mais aussi à Cherbourg.

D'ailleurs, le site de Cherbourg sera renforcé à compter de la rentrée 2024, grâce à l'ouverture de deux nouveaux parcours d'ingénieurs – il y en a actuellement trois – en génie énergétique et en génie nucléaire.

Il apparaît indispensable de renforcer notre capacité à former des ingénieurs dans notre région.

En effet, les majors de l'énergie nucléaire, éolien, ou encore hydraulique sont présents sur notre territoire, où de grands projets sont engagés. Il apparaît donc indispensable de renforcer notre capacité à former des ingénieurs dans notre région.

En outre, une réflexion sur des parcours intégrés post-bac est également en cours, ce qui nous distinguera encore de l'Ensicaen. Quoi qu'il en soit, au regard des besoins sur le territoire, il y a de la place pour tout le monde !

Face à la multiplication de l'offre de formations, est-il difficile, pour une université comme la vôtre, de conserver son attractivité ?

Nous bénéficions d'une image de marque et nous jouissons d'un positionnement singulier sur le territoire. En effet, nous avons identifié des filières d'excellence dans les domaines de l'intelligence artificielle, du nucléaire ou encore de la santé numérique. Ces filières sont accompagnées financièrement par les enveloppes des appels à projets CMA que nous avons remportés.

La montée en puissance de l'offre d'acteurs privés sur le territoire peut s'avérer plus problématique.

L'attractivité n'en reste pas moins une question quotidienne. La montée en puissance de l'offre d'acteurs privés sur le territoire peut s'avérer plus problématique. Dans la mesure où certains acteurs ont compris que l'enseignement supérieur pouvait être un marché, la concurrence se diversifie.

Dans ce contexte, il faut que le ministère et les acteurs publics veillent à garder une formation de qualité, avec des professionnels reconnus, une insertion avérée, et des diplômes également reconnus au niveau national.

Par ailleurs, on ne peut pas reprocher aux étudiants d'être mobiles. Au niveau des masters, notre université peut ainsi subir une concurrence d'autres établissements, notamment parisiens.

Nous devons alors réussir à nous positionner, en équilibrant les flux. Pour rester attractifs sur la mobilité entrante, les expertises de niche sont utiles, mais elles ne répondent pas à des enjeux de nombre. Ainsi, ces enjeux d'attractivité concernent l'université, mais aussi les collectivités et le développement économique du territoire.

Camille Jourdan | Publié le