D. Marchand (Cnous) : "Les missions du réseau sont plus que jamais indispensables"

Éléonore de Vaumas Publié le
D. Marchand (Cnous) :  "Les missions du réseau sont plus que jamais indispensables"
La cité universitaire de Monbois à Nancy l'une des priorités de réhabilitation du Cnous. // ©  Fred MARVAUX/REA
Présidente du Cnous (Centre national des œuvres universitaires et scolaires) depuis presque six ans, Dominique Marchand quittera ses fonctions le 30 décembre. Logement, bourses, précarité étudiante : l'occasion d'évoquer les priorités qui ont marqué ses deux mandats et les défis actuels.
Dominique Marchand, présidente du Cnous
Dominique Marchand, présidente du Cnous © Photo fournie par le témoin

Alors que la crise du logement est toujours très forte, quelles sont les priorités du Cnous en la matière ?

Cette rentrée est effectivement plus compliquée que les années précédentes, parce qu'elle s'inscrit dans une problématique générale du logement social, qui, par effet de chaîne, a un impact sur les étudiants.

Il manque aujourd'hui 35.000 logements, et le réseau des Crous a sa part à jouer, aux côtés d'autres acteurs tels que les bailleurs sociaux ou ceux du logement intermédiaire.

En 2024, 66,30% de notre budget d'investissement sera consacré au logement.

En 2024, 66,30% de notre budget d'investissement sera consacré au logement. Sont ainsi prévus 19 projets de construction et 28 projets de réhabilitation. Pour cela, nous avons pu exceptionnellement bénéficier de 25 millions d'euros supplémentaires, en plus des 90 millions qui nous sont habituellement alloués chaque année.

Nos priorités en termes de réhabilitation vont aux Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) de Lorraine à Nancy, celui d'Orléans-Tours ou celui de Bourgogne Franche-Comté. Quant aux nouvelles places, nous en avons déjà identifiées 5.000 à Nantes, Lyon ou encore Nice.

Autre chantier en cours : la réforme des bourses. Comment s'est déroulée la première étape ? Le nouveau modèle porte-t-il ses fruits ?

Il est encore un peu tôt pour faire un bilan précis des résultats de la réforme, ce d'autant plus que la campagne de bourse ne se terminera qu'en début d'année prochaine, notamment pour les étudiants en situation de handicap ou aidants pour lesquelles les mesures ont été annoncées plus tardivement.

Y aura-t-il plus de boursiers du fait de la modification des critères, sachant qu'un certain nombre d'entre eux ne sont pas éligibles parce qu'ils se sont tournés vers une formation privée ou en apprentissage ?

Les facteurs, qui ont parfois des effets contraires, sont multiples et il faudra attendre encore quelque semaines pour avoir une idée plus claire de la situation.

Côté mise en œuvre en revanche, le bilan est très positif : tout s'est parfaitement bien déroulé. La preuve : malgré un retard de six semaines sur le calendrier habituel, nous sommes parvenus à avoir un meilleur taux de paiements anticipés que l'année dernière. C'est dire la mobilisation de l'ensemble du réseau des Crous !

Comment le Cnous s'empare-t-il de la lutte contre la précarité étudiante, et notamment alimentaire ?

Servir des repas de qualité fait partie de notre cœur de métier. D'année en année, le nombre d'étudiants qui en bénéficient ne cesse d'augmenter, qu'ils aient accès aux repas à 1 euro ou à 3,30 euros.

Cela montre l'importance de proposer des repas à 1 euro pour les boursiers mais aussi l'intérêt de la procédure dématérialisée permettant aux étudiants non-boursiers précaires d'en profiter également.

Malgré l'inflation, nous sommes fiers de pouvoir continuer à proposer une restauration à tarif social. Cela est possible grâce à la grande performance de notre centrale d'achats nationale mais aussi au soutien ministériel qui, chaque année, assume le différentiel entre les repas à 3,30 et 1 euros ainsi que l'augmentation du coût de production.

Qu'en est-il de l'expérimentation menée entre le Cnous et France Services pour accompagner les démarches des étudiants ?

Cette expérimentation a été lancée en mars 2023. Pour l'instant, les premiers échos sont très favorables, notamment sur la qualité de la mise en lien entre les référents nommés par les Crous volontaires (Toulouse, Amiens, Hautes-Pyrénées, Lot, Aveyron) et les opérateurs de France Service.

Ce dispositif vise trois objectifs : améliorer l'accessibilité des services publics pour les étudiants, lutter contre le non-recours au droit et combattre l'autocensure pour permettre à chacun d'accéder à l'enseignement supérieur.

Cela ne peut se faire qu'à travers un dialogue renforcé entre les différents acteurs. Ainsi, si un jeune hésite à se lancer dans l'enseignement supérieur le but est qu'il soit informé via France Services des aides auxquelles il peut avoir droit et s'il rencontre des difficultés, que son dossier puisse obtenir une réponse rapidement du Crous concerné.

L'expérimentation va encore se poursuivre pendant quelques mois. Si elle est concluante, elle pourrait essaimer à travers tout le réseau.

Votre mandat touche à sa fin. Avant de réintégrer l'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (Igésr), quel bilan tirez-vous de vos années à la tête du Cnous ?

Je suis convaincue que ce sera l'étape de ma carrière la plus marquante. J'ai découvert et appréhendé un environnement où le sens de l'action est partagé par tous.

Pourtant, les six dernières années ont été denses, entre la mise en œuvre de la Contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) en mai 2018, celle de la fonctionnarisation des personnels ouvriers, le drame de l'étudiant qui s'est immolé en novembre 2019, la crise sanitaire à partir de 2020 et la concrétisation de la réforme des bourses en 2023.

Chaque fois que le ministère a demandé de mettre en place des actions, nous l'avons fait. Je suis fière que nous ayons tenu tout en conservant la convivialité et la solidarité des équipes en interne.

Quels sont les résultats qui vous semblent les plus significatifs ?

Ma plus grande réussite ? Avoir renforcé le Cnous en compétences et en ressources humaines supplémentaires. Sans cela, nous n'aurions certainement pas pu obtenir les 80 millions pour compenser les pertes d'exploitation de la crise sanitaire par exemple.

Autre grande satisfaction : avoir œuvré pour améliorer la qualité de vie au sein du Cnous en mettant une série d'actions en place, telles que des vacations de psychologue, des séances de sophrologie, une newsletter...

Je suis très heureuse de ce que j'ai vécu ces six dernières années. Je ne suis pas inquiète sur l'avenir du Cnous parce que le soutien ministériel est évident, que les missions du réseau sont plus que jamais indispensables. Mes fonctions sont très attractives, et il reste un certain nombre de dossiers stratégiques à mener. De quoi être bien occupé pour celui ou celle qui prendra ma suite.

Vers une diminution de 4,7% des émissions de gaz à effet de serre des Crous

En septembre dernier, le Cnous a présenté sa stratégie nationale de transition écologique du réseau des Crous. Mise en place à partir de cette année, elle vise à réduire de manière significative l'impact environnemental du réseau notamment en matière de restauration et de logement.

Son objectif d'ici 2030 : une diminution chaque année de 4,7% de ses émissions de gaz à effet de serre.

La stratégie se décline autours de cinq axes.

  • - Pilotage, organisation et financement de la transition écologique

  • - Création et exploitation d’un patrimoine responsable

  • - Réduire l’impact environnemental de la restauration

  • - les Crous s’engagent pour une consommation responsable : marchés publics et du réemploi

  • - développement des mobilités décarbonées et du numérique

Éléonore de Vaumas | Publié le