L'université Gustave Eiffel, malgré un budget contraint, renforce sa stratégie

Sarah Nafti Publié le
L'université Gustave Eiffel, malgré un budget contraint, renforce sa stratégie
L'université Gustave Eiffel a présenté son axe de développement stratégique lors de sa conférence de presse de rentrée. // ©  MESR/Picture Tank
Lors de sa conférence de rentrée, Gilles Roussel, président de l'université Gustave Eiffel, et Corinne Blanquart, première vice-présidente, détaillent les ambitions stratégiques de l'établissement, qui vise à acquérir une reconnaissance nationale et internationale de son expertise sur la ville durable.

L'université Gustave Eiffel, établissement public expérimental créé en 2020, envisage sa sortie de l'expérimentation au 1er janvier 2025, pour pérenniser sa structure.

"Ce processus devrait démarrer cet automne, explique Corinne Blanquart, première vice-présidente de l'université lors d'une conférence de presse mardi 12 septembre 2023. Nos statuts sont largement stabilisés". La demande devrait être discutée en Conseil d'administration d'ici la fin de l'année, pour une visite du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Hcéres) avant l'été.

Née de la fusion entre une université (UPEM), un organisme de recherche (Ifsttar), trois écoles d'ingénieurs (Esiee, ENSG, EIVP) et une école d'architecture (École d’architecture de la ville et des territoires), l'université Gustave Eiffel affiche une ambition stratégique tournée vers la ville et les territoires durables. Elle a pour objectif de devenir incontournable dans les enjeux autour de la ville de demain, au niveau de la recherche comme de la formation.

Mise en place du contrat d'objectifs de moyens et de performance

L'établissement fait partie de la première vague des COMP (contrat d'objectifs de moyens et de performance) et a obtenu à ce titre un financement de 2,5 millions d'euros sur trois ans, qui sera soumis à la tenue de certains indicateurs.

Ces objectifs "sont alignés sur nos ambitions stratégiques", souligne Corinne Blanquart. Ils seront déclinés "avec l'ensemble de nos composantes de recherche et de formation", dans le but de donner aux chercheurs "des moyens en temps pour l'investissement pédagogique et pour la recherche internationale".

"Nous avons une volonté affichée d'être en appui des politiques publiques", ajoute Gilles Roussel, le président de l'université. L'établissement porte de nombreux projets autour du développement durable et des métiers d'avenir.

Nous avons une volonté affichée d'être en appui des politiques publiques. (G. Roussel, président)

Il est d'ailleurs lauréat de l'appel à manifestation d'intérêt "Compétences et métiers d'avenir" pour son projet Avid (Apprendre pour des villes durables), qui vise à faire évoluer les formations de 1er cycle pour sensibiliser les étudiants aux enjeux du développement durable. Le projet City Fab est, lui, lauréat d'un des appels à projet du PIA (Plan d'investissement d'avenir), et va aider certaines collectivités locales à réaliser leur transition écologique.

"Nos formations sont largement engagées sur ce sujet mais nous souhaitons aller encore plus loin en développant des ressources pédagogiques s'adossant sur les travaux de recherche menés dans l'établissement", précise Corinne Blanquart. Par exemple, les étudiants pourraient découvrir certains équipements de recherche, comme la chambre climatique (Sense-City) à Marne-la-Vallée.

L'université Gustave Eiffel, tournée vers l'apprentissage

En ce qui concerne les effectifs de rentrée, Gilles Roussel a remarqué "une légère diminution" des candidatures sur Parcoursup, en baisse de 4% après une forte hausse de plus de 17% l'an dernier. "Nous restons une université attractive en premier cycle, qui recrute majoritairement sur son territoire", remarque-t-il. La capacité d'accueil est atteinte en moyenne à 96%.

L'université a noté une forte augmentation des candidatures en master (41%), avec la mise en place de la plateforme Mon Master. Le taux de remplissage atteint les 90%, mais certaines formations, comme les masters Meef semblent moins attractifs qu'auparavant.

Nous avons quelques inquiétudes sur le niveau de prise en charge de l'apprentissage et sur la collecte de l'ancienne taxe d'apprentissage. (G. Roussel)

L'université Gustave Eiffel est celle qui compte le plus d'apprentis parmi ses étudiants : ils sont 4.100 pour un total de 17.000 étudiants, soit plus d'un quart. "Nous avons quelques inquiétudes sur le niveau de prise en charge de l'apprentissage mais aussi sur la collecte de l'ancienne taxe d'apprentissage", constate le président.

La collecte du solde de la taxe d'apprentissage est désormais réalisée par l'Urssaf, alors qu'elle était auparavant directement versée aux établissements par les entreprises. "Pour l'instant, elle n'atteint que 20% de ce qu'elle était l'an dernier. Or, il s'agit d'une ressource importante pour boucler les budgets, notamment dans nos filières ingénieurs", précise Gilles Roussel.

Une situation budgétaire "préoccupante"

Plus largement, Gilles Roussel, ancien président de France Universités (2016-2020), fait état d'une situation budgétaire "préoccupante" dans une vision pluriannuelle.

"Nous construisons un budget compliqué, avec une augmentation du point d'indice qui n'est pas compensée et une hausse du prix de l'énergie. Même si nous obtenons des financements complémentaires - du COMP ou des appels à projets -, ils sont là pour réaliser des objectifs supplémentaires."

La hausse du point d'indice des fonctionnaires représente une dépense supplémentaire d'environ 2 millions d'euros. L'université a pioché dans le fonds de roulement pour boucler son budget. Mais "cette ressource n'est pas inépuisable", rappelle le président, redoutant que la situation budgétaire n'affecte certains projets liés au PIA, "car nous n'aurons plus assez de gens pour les réaliser".

En outre, l'université a lancé plusieurs chantiers de rénovation énergétique des bâtiments. Mais là aussi, "les coûts explosent". Le budget global de l'université atteint 250 millions d'euros, dont 80% correspond à la masse salariale, 16% à l'énergie, "il ne reste plus beaucoup de marge".

Sarah Nafti | Publié le