F. Fleury (Lyon 1) : "Nous voulons sortir d’un système cloisonné pour aller vers la transdisciplinarité"

Amélie Petitdemange - Mis à jour le
F. Fleury (Lyon 1) : "Nous voulons sortir d’un système cloisonné pour aller vers la transdisciplinarité"
L'université Claude-Bernard de Lyon au centre du consortium Lynx. // ©  Université Claude Bernard - Lyon 1
L’établissement expérimental qui devait réunir les universités Claude-Bernard (Lyon 1), Jean-Moulin (Lyon 3) et l'ENS lyonnaise a été abandonné en octobre 2020 se soldant par la fin de l'Idex. Les trois universités lyonnaises - Lyon 1, Lyon 2 et Lyon 3 - se réunissent finalement au sein du consortium Lynx (Lyon excellences) avec plusieurs écoles d’ingénieurs. Frédéric Fleury, président de l’université Claude-Bernard-Lyon 1 et coordinateur du projet, en détaille les enjeux.

L’établissement expérimental Lyon-Saint-Etienne n’a finalement pas vu le jour. Quelles sont les différences avec cette nouvelle structure Lynx ?

Cela fait dix ans que nous essayons de construire un projet de transformation et d'organisation des établissements du site lyonnais. Malheureusement, le projet [de regroupement, NDLR] n'est pas allé jusqu’au bout. Nous portons donc cette nouvelle approche avec une organisation différente mais un objectif commun : valoriser le potentiel extraordinaire de Lyon en termes de formation et recherche. Nous sommes un des dix sites d'enseignement supérieur les plus importants de France, il faut les moyens d'accompagner les étudiants, de bien les former et de développer une recherche de meilleur niveau international.

Frédéric Fleury, président de l'université Lyon 1-Claude-Bernard.
Frédéric Fleury, président de l'université Lyon 1-Claude-Bernard. © Eric le Roux/direction de la communication/université Lyon 1

L’ancien projet était dans le cadre d’un Idex labellisé en 2017 pour construire un établissement expérimental. Là, c’est complètement différent. Nous voulons toujours transformer le territoire mais avec l'Idex c’était un seul ensemble, là c'est un projet académique d'établissements et ceux qui le souhaitent peuvent s’y associer comme partenaires. Le périmètre d’établissements est beaucoup plus large car nous avons trois universités, six écoles, trois centres hospitaliers et six organismes de recherche.

Lynx est très simple et très agile, c’est un consortium avec un conseil des membres. Nous ne voulons pas une structure supplémentaire mais un service inter-universitaire qui gère le programme, les ressources humaines et le budget. Ce service sera porté par les établissements et coordonné par l’université Lyon 1 qui est porteuse du projet.

Quels sont les objectifs de ce consortium ?

Nous voulons sortir d’un système cloisonné pour aller vers la transdisciplinarité. Le cœur du projet, c'est de faire travailler les établissements en synergie pour lancer des programmes de recherche, transformer nos formations et offrir de nouvelles formations co-accréditées. C’est ce que les étudiants attendent mais aussi les entreprises, par exemple des gestionnaires qui ont une approche scientifique et vice versa.

Des équipes pédagogiques travaillent ensemble pour développer cette transversalité en irriguant les formations existantes et en pensant de nouvelles formations sur des questions à enjeux : santé, changements environnementaux, société en mutation, matériaux et ingénierie.

Ce sont les grandes thématiques mais nous allons identifier des sujets plus précis pour créer des formations. Il s’agit par exemple de l’économie circulaire pour la thématique matériaux, de l’organisation du travail pour la société en mutation. Il y a aussi un gros sujet sur le numérique et la santé aussi, avec des questions d'éthique et de philosophie.

L’autre objectif, c’est d’organiser le site lyonnais pour développer sa visibilité à l'international. Un établissement expérimental sera par ailleurs créé en 2023, au sein du projet Lynx. Pour l’instant, il regroupe l'université Lyon 1 et l’école d'ingénieurs CPE Lyon. Nous développerons nos formations en santé par rapport à ces enjeux de multidisciplinarité : apport des sciences humaines et sociales et de la recherche en médecine et en santé, constitution de doubles parcours médecins et sociologues, médecins et philosophes...

Vous présentez un dossier dans le cadre de l’appel à projet PIA4 "Excellence sous toutes ses formes". Si votre projet est retenu, quels programmes et formations verront le jour ? A quelle date ?

Il faudra déjà être retenu et labellisé. Nous n’avons pas de date précise mais a priori nous devrions avoir le résultat de l’appel à projets courant septembre/octobre. Les formations seraient lancées dès 2022 pour être disponibles en 2023-2024. Ce sera plus rapide de transformer les formations actuelles, ensuite viendront les nouveaux programmes avec des formations transdisciplinaires sur des métiers prometteurs pour demain.

L'objectif c'est d'organiser le site lyonnais pour développer sa visibilité à l'international.

Il s'agira majoritairement de formations de masters, avec un volet formation à la recherche. Mais cela concernera aussi les étudiants de premier cycle. Les établissements développeront des modules de formation qu’on pourrait proposer à l'ensemble des étudiants du site, voire les essaimer au niveau national. Ils porteront sur des sujets que tout étudiant doit connaître. L'intelligence artificielle est par exemple développée dans tous les domaines. Il s’agirait de présenter les enjeux de l’IA pour les élèves qui entrent à l’université, que ce soit l'IA en santé, en SHS… Nous pouvons imaginer la même chose pour la thématique du développement durable.

Ça peut être des modules complémentaires ou intégrés dans des formations que nous avons déjà dans nos établissements, qui permettraient qu'elles soient moins restreintes dans un domaine disciplinaire.

Vous attendez 140 millions de financement pour ce projet Lynx. Quels seront vos premiers projets ?

Notre premier projet sera de lancer des programmes transdisciplinaires ambitieux en termes de périmètre, à la fois en formation et en recherche. Nous voulons rassembler sur la santé, ingénierie, SHS… pour avancer sur le développement des connaissances mais aussi identifier des verrous et mettre en place des actions concrètes.

En infectiologie, par exemple, nous avons une approche de santé globale qui traite de l’émergence des maladies. Ensuite, les disciplines travaillent ensemble afin de mieux gérer l’émergence des maladies infectieuses. La même approche est applicable aux SHS. Par exemple, en urbanisation, nous pouvons réfléchir à concevoir la ville de demain en y intégrant des approches d’ingénierie, de transport, de santé…

Le résultat, c’est de proposer de nouvelles thérapies en santé, des actions pour protéger l'environnement. Et nous adosserons un volet formation à ces recherches.


Les participants au projet Lynx
Le projet Lynx regroupe 5.700 enseignants-chercheurs, plus de 110.000 étudiants et 170 unités de recherche.
Dans le cadre de l’appel à projet PIA4 "Excellence sous toutes ses formes", il réunit neuf établissements : Université Claude Bernard-Lyon 1, Université Lyon 2, Université Lyon 3, CPE Lyon, VetAgro Sup, INSA Lyon, Centrale Lyon, Mines Saint-Étienne et ENTPE - Ecole de l’Aménagement Durable des Territoires. Ce projet rassemble également le CHU/Hospices Civils de Lyon, le Centre Léon Bérard, le Centre Hospitalier le Vinatier et le Centre International de recherche sur le cancer (CIRC). Les organismes de recherche CNRS, INSERM, INRAE, INRIA et l’IFPEN sont partenaires, ainsi que l'Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Lyon (ENSAL).

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