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Comment l'AAP Excellences apporte légitimité et reconnaissance aux lauréats ?

Malika Butzbach Publié le
Comment l'AAP Excellences apporte légitimité et reconnaissance aux lauréats ?
Aix-Marseille université, lauréate d'une AAP Excellences, pour son projet de Cité de l'Innovation et des Savoirs. // ©  ERIC/Adobe Stock
Trois ans après la première vague de l'appel à projets Excellences, il est encore trop tôt pour analyser les impacts profonds des projets sur les établissements lauréats. Toutefois, plusieurs d'entre eux évoquent une forme de reconnaissance et de légitimité. La question de la pérennité des projets, une fois les financements de l'AAP terminés, demeure.

"Nous faisons un pari et nous misons sur vous", lançe Anne-Sophie Barthez, directrice générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (Dgesip), aux 46 lauréats de l'appel à projets (AAP) Excellences lors d'un séminaire dédié, le 22 septembre.

L'occasion de revenir sur ce que permet aux établissements cet appel à projets, constitué de trois vagues pour un budget total de 800 millions d'euros.

"Les financements Excellences contribuent à installer ou conforter une signature de site, ou bien à agir comme un accélérateur de la stratégie de l'établissement et ainsi impulser un nouvel élan, que ce soit sur la forme même de l'établissement, sur sa structuration scientifique ou la transformation de l'offre de formation", déclare Sylvie Retailleau, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, en conclusion de ce temps d'échange.

Trois ans après la première vague de l'AAP, quel est l'impact d'Excellences sur les universités lauréates ? Le pari du ministère est-il gagné ?

Les retombées de l'AAP Excellences difficiles à analyser

Pari gagné, estiment certains des lauréats les plus anciens, notamment ceux issus de la première vague en 2021. C'est le cas du projet Cisam+, Cité de l'Innovation et des Savoirs Aix-Marseille, projet porté par Aix-Marseille université, dont la première antenne a été inaugurée en février dernier, cite Sylvie Retailleau.

Dédiée au développement des projets d'innovation dans les économies verte et bleue, cette antenne comprend une salle de formation équipée d'outils numériques et collaboratifs ainsi que d'une salle de démonstration de réalité virtuelle et augmentée. D'ici dix ans, 12.000 étudiants auront suivi ces cours, selon les objectifs de l'université.

Outre ces grands projets, la plupart des acteurs interrogés estiment qu'il est encore trop tôt pour analyser des retombées de l'AAP sur leurs établissements.

Toutefois, beaucoup perçoivent déjà des effets et évoquent une forme de légitimité qu'instaure cette labellisation par un jury international. "Quand on est une université qui a tout à construire, à partir du moment où il y a un jury international qui se prononce sur notre projet, cela génère tout de suite une attention différente", témoigne Guillaume Gellé de l'URCA (Université de Reims Champagne-Ardenne), lauréat de la 2e vague, et président de France Universités.

"Cet aspect peut être très différent d'un établissement à un autre. Pour les universités Idex, Excellences est un projet parmi d'autres. Mais pour les autres universités, c'est quelque chose qui change tout."

Une légitimité dans la recherche de partenaires et de financements

Du côté de l'université Polytechnique des Hauts-de-France, cette labellisation Excellences "donne une légitimité bienvenue pour la recherche de partenaires", explique le vice-président Arnaud Huftier.

Son projet Euro-Tell prévoit la création de trois graduate schools interdisciplinaires pour former et répondre aux défis de la transition en s'appuyant sur l'expertise des acteurs du territoire. "C'est dans la nature même du projet de nouer des partenariats avec les acteurs locaux, d'où l'intérêt de la reconnaissance de l'appel à projets."

Nous avons des aides assez importantes de mécènes pour la construction et l'installation car justement les fonds Excellences étaient déjà sanctuarisés. (E. Kaminski, université Paris Cité)

Un aspect que partage Édouard Kaminski, de Paris Cité. Pour la construction de l'atrium Santé des femmes, destiné à devenir un lieu d'échange entre chercheurs, étudiants et associations de patients, l'université a obtenu des "aides assez importantes de mécènes pour la construction et l'installation car justement les fonds Excellences étaient déjà sanctuarisés. On apparaît beaucoup plus sérieux et convaincant", rapporte le président de l'établissement.

Un levier de recrutement

De nombreux porteurs de projets soulignent que Excellences a été un coup d'accélérateur plus que bienvenu. "Ces moyens ont été déterminants pour mettre en œuvre une trajectoire que nous avions dessinée bien avant l'appel à projets", explique Amélie Antoine Audo, chargée du projet Tiered.

Dans le cadre du projet, cinq académiques ont été recrutés en poste. "Il n'y a pas de différenciation de recrutement entre les professionnels embauchés dans le cadre du projet et les autres : le contrat est identique".

Ce sujet du recrutement est d'ailleurs un aspect important de la pérennisation du projet. Quels types de contrats sont utilisés ? "Les CDD seront sur une longue période, voire transformés en CDI puisqu'ils seront amenés à être pérennisés, répond Arnaud Huftier. Les recrutements seront assurés à 50% par l'enveloppe de Excellences, et 50% par l'université."

Pour autant, ces recrutements semblent n'avoir aucun impact sur le taux d'encadrement. Julien Gossa suggère que les PIA n'ont pas d'effets visibles sur ce taux au sein des universités lauréates : ces dépenses concernent avant tout la recherche ou des réorganisations administratives*.

Articuler financement pérenne et AAP

Le maître de conférences à l'université de Strasbourg montre qu'il n'y a pas de corrélation visible entre les taux d'encadrement et l'attribution d'un financement d'excellence. "Il ne faut pas confondre AAP et financement de fonctionnement des universités", prévient Anne Fraïsse, présidente de Montpellier-III dont le projet a été sélectionné pour la 3e vague.

Nous pourrons dire dans dix ans que notre projet Excellences est une réussite si nous avons trouvé le modèle économique. (A. Huftier, Université Polytechnique des Hauts de France)

Car la question qui demeure est celle de la pérennisation des projets qui doivent perdurer après les enveloppes de l’AAP censées durer dix ans. "Nous y avons réfléchi dès l’élaboration du projet et nous continuons aujourd’hui", explique Arnaud Huftier. "Nous pourrons dire dans dix ans que notre projet Excellences est une réussite si nous avons trouvé le modèle économique. Avec la fin des crédits, il faut trouver un nouveau modèle qui implique des synergies fortes avec le territoire."

* "Avez-vous déjà vu. . . La distribution du PIA ? Le PIA, des moyens en plus ou un moyen de plus?", intervention de Julien Gossa lors du le colloque RESUP-ENS LYON le 14 octobre 2021.

Malika Butzbach | Publié le