B. Angrand (Agence du service civique) : "Le service civique européen doit permettre de généraliser les mobilités"

Pauline Bluteau Publié le
B. Angrand (Agence du service civique) : "Le service civique européen doit permettre de généraliser les mobilités"
Près de 3.000 jeunes en France ont participé au Corps européen de solidarité en 2020. // ©  Agence du service civique
Le 9 décembre 2021, Emmanuel Macron annonçait la création d'un service civique européen. Un nouveau programme qui s'inspire des différents dispositifs déjà existants en France. Un gage de reconnaissance et de légitimation, comme l'explique Béatrice Angrand, présidente de l'Agence du service civique depuis 2019.

Le service civique européen existe déjà en France, en quoi l'annonce du président de la République est-elle une réelle nouveauté ?

Effectivement, l'Agence du service civique a déjà plusieurs programmes comme Erasmus+ Jeunesse & Sport, le Corps européen de solidarité et le service civique "Europe". L'objectif est de permettre aux jeunes de se rencontrer mais selon les dispositifs, les modalités sont différentes (formations, indemnités…).

Béatrice Angrand, présidente de l'Agence du service civique
Béatrice Angrand, présidente de l'Agence du service civique © Photo fourni par le témoin

Nous sommes assez légitimes pour accompagner le service civique européen qui a été présenté par le président de la République. On s'inspire du modèle français, un modèle qui fonctionne puisque les jeunes gagnent en compétences, développent un sentiment d'appartenance, de solidarité, ce que l'on veut retrouver aussi à l'échelle européenne. La France ne va pas imposer un modèle mais l'idée est de s'en inspirer pour le déployer collectivement en Europe.

Derrière cette annonce, je vois surtout une légitimation de ces programmes de mobilités, une volonté de démocratiser les expériences et de les généraliser, de créer un lien intergénérationnel pour construire l'Europe de demain. On reconnaît que ces missions sont d'intérêt général, elles ont su prouver leur efficacité pour inspirer l'Europe.

Dès 2019, vous aviez la volonté d'axer, entre autres, votre mandat sur les mobilités internationales, est-ce qu'il y a eu des avancées ?

En effet, mon expérience fait que j'ai beaucoup œuvré en faveur des mobilités européennes mais je dois rappeler que sur mes trois années de mandat, deux se sont déroulées avec le Covid en fond ce qui n'est pas idéal pour mettre en place une stratégie internationale.

On s'inspire du modèle français, un modèle qui fonctionne puisque les jeunes gagnent en compétences, développent un sentiment d'appartenance, de solidarité, ce que l'on veut retrouver aussi à l'échelle européenne.

Nous avions déjà bien sûr des partenariats avec certains pays notamment l'Italie ou l’Allemagne, nous échangions nos pratiques mais nous n'avons rien concrétisé jusqu'à présent, c'est vrai.

La PFUE va-t-elle accélérer les échanges au sein de l'Union européenne autour du volontariat ?

Nous avons trois pistes sur lesquelles nous souhaitons avancer. D'abord, renforcer la coopération entre les Etats membres qui ont déjà un service civique national. En France, nous avons environ 25.500 jeunes qui ont bénéficié d'Erasmus+ Jeunesse & Sport en 2020, 3.000 volontaires au Corps européen de solidarité mais seulement 300 pour le service civique en Europe.

Cette coopération permettrait aussi d'obtenir des fonds supplémentaires pour faire des expérimentations, financer le logement et le transport des volontaires car cela reste le principal frein au développement. Enfin, nous aimerions aussi entraîner d'autres pays à s'engager pour être interopérables. Cela risque de prendre plusieurs années.

Le Corps européen de solidarité ne risque-t-il pas d'être mis de côté au profit du service civique européen ?

Nous n'allons pas privilégier l'un ou l'autre. Le but va être d'articuler les deux pour les jeunes et pour donner une impulsion politique. Nous nous sommes aussi réorganisés en interne pour que chaque équipe se concentre sur un dispositif.

Je suis optimiste car les partenaires comme les jeunes s'emparent du sujet européen. Par exemple, le service civique propose environ 1.100 missions "Citoyenneté européenne", nos partenaires sont incités à créer des missions autour de cette thématique en France.

Cette coopération entre Etats membres permettrait d'obtenir des fonds supplémentaires pour faire des expérimentations, financer le logement et le transport des volontaires.

À terme, mon rêve serait de pouvoir proposer aux jeunes un service civique de six mois en France et d'accompagner une mobilité pour un volontariat de trois mois en Europe ensuite. On pourrait davantage jongler sur les durées avec le service civique européen. Mais, cela nécessite aussi des moyens financiers, nous avons, aujourd'hui, plus de demandes pour le Corps européen de solidarité que de moyens. Or, l'ambition de la Commission européenne est d'avoir environ 270.000 volontaires (dont environ 10% donc 27.000 Français) à l'horizon 2027.

Quelles sont vos attentes pour le service civique en cette année européenne de la jeunesse, de PFUE et d'élection présidentielle ?

Nous avons déjà notre feuille de route pour développer nos dispositifs. Pour cette année particulière, j'attends une valorisation de ces avancées, notamment en matière de communication. Nous aimerions aussi améliorer la reconnaissance des dispositifs vis-à-vis des employeurs. Il y a déjà eu des évolutions du côté des formations qui le prennent en compte mais nous devons avancer sur la connaissance fine. Faire comprendre que les volontaires développent aussi des compétences sociales pendant leur service civique par exemple. Nous devons progresser là-dessus, c'est un travail permanent.

Aujourd'hui, le Youthpass permet de valoriser ces acquis au niveau européen et je pense que c'est le sens de l'Histoire car les jeunes attendent cela, plus d'interculturalité. Mais ils ne veulent pas bouger pour rien, ils attendent une reconnaissance.

Plus globalement, nous voulons accompagner la montée en charge du service civique, qu'il soit bénéfique pour les jeunes et pour l'ensemble de la société car le service civique répond à une politique publique.

Pauline Bluteau | Publié le