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Marc Sellam : “Il faut multiplier par trois les moyens pour l’orientation”

Propos recueillis par Ariane Despierres-Fery Publié le
Marc Sellam : “Il faut multiplier par trois les moyens pour l’orientation”
Marc Sellam répond aux trois questions d'EducPros. // ©  Ionis
Enjeux du supérieur, paroles de dirigeants, Marc Sellam, président du groupe Ionis, répond aux trois questions d’EducPros. Il partage son regard et son analyse sur la coexistence de deux modèles dans le supérieur, l’un tiré par la tradition, l’autre par le devenir de la société.

Marc Sellam, président du groupe Ionis défend un modèle qui, au-delà du développement des connaissances, s’attache à former des personnes, à développer leurs aptitudes, leurs personnalités, et à soutenir leur engagement. Des éléments indissociables de la connaissance des métiers et de l’entreprise. Il évoque également la nécessité de former et recruter plus de responsables orientation pour lutter contre les inégalités sociales et l’échec dans le supérieur.

Quels verrous faudrait-il lever pour permettre un développement plus rapide et plus harmonieux du supérieur ?

Je me mets à la place des jeunes et de leurs familles. Je cherche à comprendre en permanence les transformations du monde, des domaines et des métiers, des entreprises, des mentalités, des priorités. C’est dans cette perspective que nos modèles d’enseignement sont évolutifs et adaptatifs.

Par ailleurs, et plus encore dans un monde qui vit dans de changements majeurs et rapides, nous ne sommes pas des machines à donner des quantités de savoirs mais des femmes et des hommes qui formons des personnes.

La mission du supérieur ne se limite pas donner des savoirs, mais également à enrichir les aptitudes, à aider à l’émergence de personnalités.

Cela, ce n’est peut-être pas une priorité pour un modèle tiré davantage par le passé et la tradition que par le devenir et la transformation de nos sociétés. L'enseignement supérieur doit lever ce verrou lourd et envahissant.

L'enjeu est de considérer que sa mission ne se limite pas à donner des savoirs et des connaissances mais également à enrichir les aptitudes, à consolider des caractères et finalement à aider à l’émergence de personnalités.

Quel impact concret de la réforme du lycée sur le supérieur voyez-vous ? Quels aménagements pourraient être apportés ?

Cette réforme ne peut se limiter à une machine nommée Parcoursup mais à une responsabilisation forte des lycées dans l’orientation des jeunes. Car nombre d’échecs dans le supérieur, pénalisants pour les gens comme pour les écoles, viennent d’une mauvaise orientation, d’une incompréhension des métiers, d’une inadéquation entre envies et réalités en termes d’enseignement. Cela est lié à la fois à une information insuffisante des jeunes et à une formation insuffisante des responsables.

Il faut recruter plus de responsables de l’orientation dans les lycées, les former, favoriser les rencontres avec les écoles du supérieur pour mieux comprendre les secteurs et les métiers.

La réussite dépend de la qualité des responsables de l’orientation. Il faut donc en recruter plus, leur apporter plus de formations, favoriser les rencontres avec les écoles du supérieur pour mieux comprendre les transformations des secteurs, des métiers. Pousser également à des rencontres avec les entreprises.

Entendre que les métiers technologiques sont pour les garçons et que le marketing sied bien aux filles est insupportable. Ce n’est pas qu’une question de sexisme mais aussi de méconnaissance.

Tant que les moyens, les personnels, les actions de formation n’auront pas été multipliés par trois, nous souffrirons d’un déséquilibre qui favorisera le fossé social et qui débouchera mécaniquement sur plus d’échecs.

Les transitions écologiques, économiques et sociétales sont au cœur des préoccupations, comment nos institutions d’enseignement supérieur peuvent-elles/doivent-elles y répondre ?

Je vous dirai simplement ce que nous faisons. Depuis dix ans, nous menons chaque 1er décembre "Ionis en Veille contre le Sida" et le premier jour du Printemps "Le Printemps du Sang" pour l’EFS.

L’engagement sportif, culturel, associatif, militant est pour nous un pan essentiel de la formation de la personnalité d’un jeune.

Dans nos 25 écoles, 200 associations engagées permettent aux jeunes de mener à bien des projets. Nous multiplions ces initiatives, ces mobilisations caritatives. C’est l’ADN de nos écoles et l’engagement sportif, culturel, associatif, militant est pour nous un pan essentiel de la formation de la personnalité d’un jeune.

Cette importance n’est pas toujours partagée par ceux qui considèrent qu’une école est un lieu de savoirs et de connaissances. Je dirige des centaines de femmes et d’hommes qui ont pour responsabilité d’aider des jeunes à devenir et là est l’essentiel.

Quant à nos institutions, nous sommes les seuls en France à disposer de quatre écoles d’ingénieurs devenues des entreprises à mission avec des engagements sociétaux accrus que nous assumons avec fierté et volonté.


EducPros poursuit sa série d’interviews pour donner la parole aux dirigeants du supérieur. Objectif : évoquer avec eux les enjeux qui animent leur secteur, en matière d’enseignement, de recherche, de relations avec le monde économique, de développement et de structuration à l’échelle nationale et internationale. Retrouvez tous les 15 jours, le vendredi, l’analyse d’un dirigeant du sup’ :
– Eric Lamarque
– Pierre Mathiot
– Delphine Manceau
– Philippe Choquet
Alain Joyeux
– Patrick Vermay-Musset

Propos recueillis par Ariane Despierres-Fery | Publié le