Témoignage

Entre "chance" et déception, des étudiants témoignent de l'état de leur logement Crous

Avec 20m2 pour 407 euros, Ludivine, étudiante au Havre estime être "bien tombée".
Avec 20m2 pour 407 euros, Ludivine, étudiante au Havre estime être "bien tombée". © Photo fournie par le témoin
Par Amélie Petitdemange, publié le 05 février 2024
1 min

Les résidences du Crous permettent aux étudiants de se loger à des prix plus abordables que dans le privé. Néanmoins, une étude de la Fage souligne la vétusté de certains logements. Trois étudiants à Lyon, à Amiens et au Havre, témoignent.

Avantageux en termes de prix et de proximité avec les lieux d’études, les logements Crous sont très recherchés par les étudiants. L'offre peine d'ailleurs à suivre la demande :  173.430 places étaient disponibles en résidence Crous en 2022-2023, pour 2,93 millions d’étudiants, dont 675.420 boursiers.

Une étude de la fédération étudiante Fage, publiée en janvier 2024, alerte cependant sur la vétusté de ces logements. Ainsi, 32% des étudiants interrogés ne pas souhaitent pas rejoindre un logement CROUS à cause de l’état du bâti. De nombreux résidents pointent d’ailleurs l'état délabré de leur logement.

Des logements Crous pas tous rénovés

Victor* loge dans 9 m2 pour 254 euros par mois. Il habite en résidence Crous car "c'est le moins cher" : "Je ne suis pas aidé par mes parents, donc c'était la seule solution pour avoir un toit. J'ai eu de la chance, à Amiens (80), c'est assez galère d'avoir une place", explique l'étudiant en licence de sciences politiques.

Marie, en licence de STAPS, a réussi à décrocher un logement Crous à Lyon (69). L'étudiante est à dix minutes à pied de son université. Malgré cet avantage, elle prévoit de retourner chez ses parents, à une heure de route.

"Je paie 400 euros par mois pour un 15 m², dans un bâtiment de la résidence qui n'a pas été rénové. Les étudiants n'en peuvent plus d'avoir des logements aussi chers pour si peu d'espace, affirme-t-elle. Il y avait des cafards et des fourmis dans l'appartement quand je suis arrivée. J'en ai parlé au Crous mais personne n'est venu. Mes parents m'ont aidé à m'en débarrasser."

De son côté, Ludivine, en école d'ingénieurs au Havre (76), a obtenu un logement de 20m2 pour 407 euros. Elle est satisfaite de sa résidence en termes de propreté. "Je ne m'attendais pas à ça, car des étudiants se plaignent à ce sujet. Moi, je suis bien tombée !" Elle se réjouit aussi d'être à 35 minutes à pied de son école, en face de la station de tram et de la bibliothèque.

Des espaces communs peu utilisés

La satisfaction des étudiants dépend grandement de leur résidence, certaines étant rénovées, et de la taille de leur logement. Ainsi Ludivine, qui vit dans 20m2, est plus à l'aise que Victor, contraint de vivre dans 9m2. Les petites surfaces manquent de meubles et de rangements, et ne disposent pas de cuisine.

Si les résidences proposent souvent des espaces communs (cuisine, salle de travail, salle de détente), les étudiants n'y ont pas toujours accès. Selon l'étude de la Fage, 60% des résidents en logements Crous n’ont pas accès ou ne savent pas s’il y a un accès à un espace de détente. Et 44% n'accèdent pas à un espace de travail. 

Une réalité pour Victor qui n'a pas de cuisine depuis trois ans. "La cuisine commune a fermé, car elle était insalubre. De temps en temps, elle rouvre, mais referme rapidement. Je dois manger au Crous la semaine et me débrouiller le week-end", témoigne le jeune homme.

Même constat pour Marie, à Lyon, qui n'a jamais accédé aux espaces communs. "J'ai la chance d'avoir ma salle de bain et ma cuisine. On a une salle de travail et une salle de musique, mais on n'a jamais su me dire où c'était. Et il faut demander en début de semaine pour que notre badge soit autorisé à ouvrir la porte. C'est trop compliqué, je préfère aller à la bibliothèque universitaire juste à côté", explique l'étudiante en STAPS.

Une mauvaise insonorisation

Les étudiants relèvent aussi des problèmes d’insonorisation et d’isolation. "L’insonorisation est catastrophique, on entend tout ce qu'il se passe : quelqu’un qui prend sa douche, un autre qui écoute de la musique", explique Marie.

"J'entends les gens qui marchent, les portes qui claquent, les discussions", confirme Ludivine.

Même problématique pour Victor : "J'entends quand ma voisine passe des coups de fil. Il n'y a aucune intimité".

Un chauffage insuffisant

En plus de ces problématiques, certains étudiants en logement Crous souffrent du froid. Victor indique ainsi que l'an dernier, le chauffage a été allumé mi-décembre. "Je n’ai pas contacté le Crous, notamment parce que je ne veux pas me le mettre à dos. Cette année, on a eu de la chance, le chauffage a été allumé plus tôt", raconte le jeune homme.

Marie, elle, pointe une isolation très mauvaise dans son logement. "On a enfin le chauffage, mais on le sent à peine", précise-t-elle. D'autant que dans son appartement, deux chauffages sur trois sont cassés. "Le Crous me dit qu'ils sont passés voir, mais rien ne change. J'ai acheté un chauffage d'appoint pour la salle de bain".

En juin dernier, le gouvernement a annoncé que plus de 12.000 logements étudiants seront rénovés d'ici trois ans. Selon le ministère de l'Enseignement supérieur, 4.000 logements Crous sont déjà engagés dans des projets de rénovation et l'objectif est de lancer les chantiers des 8.700 autres logements étudiants d'ici la fin du quinquennat.

Sollicité pour une interview, le CNOUS n'a pas souhaité répondre. L'organisme devrait publier prochainement sa propre enquête de satisfaction, menée auprès des résidents.

* Prénom d'emprunt, l'étudiant a souhaité rester anonyme

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