Portrait

Prêtre et étudiant en infographie 3D : l’étonnant parcours de Pascal Tindano

Pascal Tindano est prêtre mais aussi étudiant en infographie 3D
Pascal Tindano est prêtre mais aussi étudiant en infographie 3D © Fournie par l'établissement
Par Séverine Mermilliod, publié le 28 juillet 2022
5 min

Avec sa double casquette de prêtre et de futur diplômé en infographie 3D, Pascal Tindano veut s’adresser à la jeunesse de son pays, le Burkina Faso, "cible du terrorisme".

Le 7 juillet 2022, Pascal Tindano a fêté ses dix ans de prêtrise. Mais il a une autre passion : à 40 ans, l’homme est aussi depuis deux ans étudiant en infographie 3D.

Tout a commencé par la rencontre, dans son village natal au Burkina Faso, d’un missionnaire français. "Ebloui", il prend le parcours du séminaire et est ordonné prêtre en 2012. Puis, le "fil conducteur" de son histoire se déroule : alors qu’un jumelage existe entre son diocèse et celui de Carcassonne, dans l’Aude, il est appelé en renfort pour s’occuper des jeunes. "Dans mon pays, j’avais déjà travaillé auprès de la jeunesse", raconte Pascal.

Sensibiliser les jeunes grâce à la 3D

Il s’installe donc dans la ville française en septembre 2019. Et cherche très vite une formation car il a une autre passion : l’image, pour faire passer des messages. "Dans mon pays, l’église est un appui aux institutions étatiques, dans le développement de l’éducation. Nous avons la radio, la presse écrite, mais j’ai pu remarquer que ça ne concerne qu’une cible infime et pas du tout la jeunesse, poursuit le prêtre-étudiant. Comment toucher cette partie importante de notre population ? C’est là que l’idée m’est venue : les jeunes, c’est l’écran, et donc le moyen le plus puissant de les atteindre, c’est l’image."

Une formation en infographie 3D financée par le diocèse

Pour pouvoir étudier en parallèle de son activité de prêtre, Pascal Tindano trouve un cursus 100% en ligne d’infographie 3D à l’institut Artline, qu’il suit maintenant depuis deux ans. Le projet intéresse son diocèse, qui finance ses études.

Mais combiner les deux n’est-il pas difficile ? "Vous ne croyez pas si bien dire !", s’amuse le prêtre, qui "s’accroche" mais estime avoir de la chance car la formation est adaptable et personnalisée. "La 3D c’est fabuleux ! On part de rien et on réalise des miracles, comme partir d’un cube pour réaliser un personnage, modéliser un objet… Puis il faut lui donner du réalisme, donc on apprend d’autres compétences, les textures…", détaille Pascal, que l’on devine passionné.

"J’aime ce que je fais, confirme-t-il, c’est toute une satisfaction, du plus petit objet au plus grand que je réalise." Il assure avoir toujours aimé le langage imagé. "J’ai toujours été 'prêtre-ciné', je dirai... j’ai mon vidéoprojecteur, mon matériel de sonorisation…"

Lutter contre le terrorisme au Burkina Faso

Avec ses études, son but n’est pas seulement de s’adresser aux jeunes ou aux chrétiens mais à tous ses compatriotes. "Mon projet s’inscrit dans une communication sociale", précise-t-il.

Au Burkina Faso, où 40% du territoire est "hors du contrôle de l’Etat", sa région d’origine est la deuxième plus touchée par le terrorisme. "Je vous parle avec émotion car ça ne fait qu’empirer", déplore Pascal, qui rappelle qu’il y a quelques semaines, un nouveau massacre a fait 86 morts dans un village.

"Alors comment s’adresser à la jeunesse dans la crise que nous connaissons ? Ils sont la principale cible du terrorisme, qui tire sur la ficelle de l’appartenance ethnique et religieuse. Donc il y a matière à sensibiliser sur la problématique de l'enrôlement et faire qu’il y ait une unité dans la pluralité ethnique, culturelle et religieuse", affirme le prêtre.

L'infographie 3D et les réseaux sociaux pour alerter

Grâce à l’infographie mais aussi aux réseaux sociaux, le prêtre souhaite alerter aussi sur la pauvreté ou encore l’éducation scolaire, notamment des filles. "Aujourd’hui, on a plus de 3.000 écoles fermées au Burkina Faso à cause du terrorisme, assure-t-il. Et l’orpaillage artisanal, une façon d’exploiter l’or de manière artisanale, fait mal au pays, déstructure l’école et jette beaucoup d’enfants issus de famille pauvres sur des sites en quête d’or."

Pascal devait rentrer dans son village natal cet été mais les attaques s’étant multipliées, et comme "en tant que prêtre c’est plus sensible encore", il n’a pas pu rentrer. Sa mission dans le diocèse de Carcassonne devrait bientôt prendre fin, mais il doit d’abord terminer sa formation d’infographiste 3D. "Il est plausible qu’à la fin de l’année je retourne chez moi, mais ce n’est pas décidé, car l’école doit durer encore l’année prochaine." Avec à la clé, son bachelor.

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