Écoles de journalisme : les formations non reconnues, moins sélectives mais plus coûteuses
Considérées parfois comme un choix par défaut, les écoles de journalisme privées non reconnues proposent des cursus professionnalisants et permettent de bénéficier d’un réseau. Mais leur coût est non négligeable.
ESJ Paris, IEJ, EDJ, ISFJ… Derrière ces sigles se cachent d’autres écoles proposant des formations en journalisme. Elles sont de statut privé et ne font pas partie des 14 cursus reconnus par la profession.
Regroupant souvent des larges spectres de formations, dans la communication, le numérique ou la vidéo, elles mettent en avant leur côté pratique et professionnel pour séduire leurs futurs étudiants. Qu'elles soient à Paris, Lyon, Montpellier, Bordeaux ou Nantes, chacune a sa formule et ses spécialisations. Avec tout de même quelques caractéristiques communes.
Des profils diversifiés
Les établissements privés non reconnus par la CPNEJ sont tout d’abord réputés moins sélectifs. S’ils ne sont concurrencés que par les petits flux de deux IUT reconnus en postbac, au niveau master, les étudiants peuvent les envisager comme une solution de secours.
compte tenu de mon état de stress et du travail que j’avais fourni", soupire Kessila, diplômée de l’ISFJ, à Paris, en 2013, qui travaille aujourd’hui pour des sociétés de production. "L’année dernière, plus de 900 candidats ont passé le concours de l’ESJ Lille. Or, seulement une cinquantaine a été retenue. Quid des autres ? Nous, nous nous leur donnons une chance", déclare Marie Boselli, directrice de l’EDJ Nice.
Les modalités d’admission varient en fonction de chaque école. Quand certaines proposent un simple entretien de motivation, d’autres organisent écrits et oraux, même s’ils demeurent peu sélectifs. "Je n’ai quasiment pas préparé le concours de l’IEJ Paris : j’ai suivi l’actualité une semaine avant et j’ai été accepté. Sur le coup, ça ne m’a pas paru compliqué", raconte Théo.
À l’ISJT à Toulouse, aucune note n’est prise en compte pour intégrer la prépa journalisme qui permettra de rejoindre la formation en trois ans. "Si les yeux de l’élève brillent quand il parle de journalisme, on l’accepte dans l’école sans problème", assure Guillaume Truilhé, son directeur. Autre avantage : ces établissements se veulent flexibles et accueillent des élèves souhaitant se réorienter à tous les niveaux.
Les formations non reconnues en résumé
Écoles |
Ville |
Diplôme |
Niveau d'entrée |
Durée des études |
Reconnaissance par l'État/Titre RNCP |
Frais de scolarité (première année) |
Alternance |
---|---|---|---|---|---|---|---|
3iS Paris |
Elancourt |
Cycle supérieur en cinéma et audiovisuel. Journaliste audiovisuel |
Bac |
3 ans |
Oui/Oui |
7.990 € |
Non |
American University of Paris |
Paris |
Bac |
3 à 4 ans |
Non/Non |
31.420 € |
Non |
|
EDJ |
Nice |
Bac |
3 ans |
Oui/Oui |
5.715 € |
Non |
|
Bac |
3 ans |
Oui/Oui |
5.715 € |
Non |
|||
Bac |
3 ans |
Oui/Oui |
6.015 € |
Non |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Oui/Non |
7.125 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Oui/Non |
7.415 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Oui/Non |
7.125 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Oui/Non |
7.415 € |
Oui |
|||
EFJ |
Levallois-Perret, Bordeaux |
Bac |
3 ans |
Non/Oui |
7.450 € pour Bordeaux ; 6.650 € pour Levallois-Perret |
Non |
|
ESJ Paris |
Paris |
Certificat de journaliste spécialisation télévision, radio, presse écrite, web |
Bac |
3 ans |
Non/Non |
6.000 € |
Non |
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
6.600 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
7.000 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
7.000 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
6.600 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
6.600 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
7.000 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
6.600 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
6.600 € |
Oui |
|||
ESTEN Sup'Edition |
Tours |
Bac+3 |
2 ans |
Non/Non |
6.900 € |
Non |
|
HEJ |
Montpellier, Lyon, Paris |
Bac |
3 ans |
Non/Non |
5.885 € |
Non |
|
IESCA |
Aix-en-Provence, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Lille, Lyon, Paris, Montpellier |
Bac+2 |
1 an |
Non/Non |
De 5.900 € à 6.000 € |
Non |
|
Bac+3 |
2 ans |
Non/Non |
De 6.500 € à 6.700 € |
Non |
|||
IEJ |
Paris, Strasbourg, Marseille |
Bac |
3 ans |
Non/Oui |
6.870 € pour Paris ; 6.800 € pour Strasbourg et Marseille |
Non |
|
Paris |
Bac+3 |
1 an |
Non/Non |
6.870 € |
Oui |
||
Bac+3 |
1 an |
Non/Non |
6.870 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
1 an |
Non/Non |
6.870 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
1 an |
Non/Non |
6.870 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
1 an |
Non/Non |
6.870 € |
Oui |
|||
Bac+3 |
1 an |
Non/Non |
6.870 € |
Oui |
|||
Marseille |
Bac+3 |
1 an |
Non/Non |
6.800 € |
Oui |
||
IICP |
Paris |
Bac |
4 ans |
Non/Oui |
6.800 € |
Oui |
|
Bac |
4 ans |
Non/Oui |
6.800 € |
Oui |
|||
Bac |
4 ans |
Non/Oui |
6.800 € |
Oui |
|||
Journalisme option journaliste blogueur mode, beauté et luxe |
Bac |
4 ans |
Non/Oui |
6.800 € |
Oui |
||
Bac |
4 ans |
Non/Oui |
6.800 € |
Oui |
|||
Bac+4 |
1 an |
Non/Non |
8.300 € |
Oui |
|||
ISCPA |
Paris, Lyon, Blagnac |
Bac |
3 ans |
Non/Oui |
6.900 € |
Non |
|
Paris, Lyon |
Mastère Journalisme d'investigation et innovation territoriale |
Bac+3 |
2 ans |
Non/Oui |
7.900 |
Oui |
|
ISFJ |
Paris |
Bac |
3 ans |
Oui/Oui |
De 6.200 € à 6.605 € |
Oui |
|
Bac+3 |
2 ans |
Oui/Oui |
De 6.200 € à 6.605 € |
Oui |
|||
Bac+4 |
1 an |
Oui/Oui |
De 7.200 € à 7.595 € |
Non |
|||
ISJT |
Toulouse |
Bac |
2 ans |
Non/Non |
De 4.000 € à 4.150 € |
Non |
|
Bac+2 |
3 ans |
Non/Non |
De 4.250 € à 4.400 € |
Non |
|||
Studio école de France |
Issy-les-Moulineaux |
Bac |
2 ans |
Non/Non |
7.700 € |
Non |
De 6.000 à 7.000 € par an
Mais attention, les frais de scolarité peuvent être élevés : ils vont de 4.250 € l’année (pour l’ISJT à Toulouse) à 31.400 € (pour le Bachelor of Arts in Journalism de l’American University of Paris). En moyenne, comptez de 6.000 à 7.000 € par an.
Pour justifier cette forte mise à contribution des élèves, les écoles insistent sur le coût de la masse salariale et du matériel à disposition. "Un fil AFP est hors de prix. Et en tant qu’école privée, nous avons un souci de rentabilité", souligne Marie Boselli. En effet, contrairement aux cursus publics et universitaires, les écoles privées doivent assumer leurs coûts de fonctionnement.
Privilégier une pédagogie de l’action
Pour attirer de futurs étudiants, ces établissements mettent en avant une formation pratique et professionnalisante, se dressant en alternative pour des journalistes en herbe réfractaires à l’université ou à la prépa. Comme Théo : "Après le bac, j’ai été accepté en licence de sociologie. Mais je n’avais pas envie de faire trois années de fac trop théoriques qui allaient vraisemblablement m’ennuyer." Théo s’est finalement tourné vers l’IEJ Paris, dont il est sorti en 2016, et travaille aujourd’hui pour France Inter et "So Foot".
Même constat pour Marine. Après une année de licence info-com, elle rejoint l’EDJ, à Nice, pour un Bachelor. "La fac n’était pas pour moi. J’avais besoin d’un cadre scolaire, ce qui n’était pas possible avec 700 élèves dans un amphi. À l’EDJ, nous sommes 25 par classe, donc nous profitons d’une correction personnalisée. Forcément, on s’améliore", estime-t-elle. Un encadrement en petit comité bienvenu pour progresser.
"Tous nos intervenants sont des professionnels en activité, dont des figures connues, comme Nathanaël de Rincquesen, présentateur au JT de France 2", ajoute Ludovic Place, directeur de l’ISFJ à Paris. De quoi faire rêver les élèves, qui se passionnent aussi pour les projets et le terrain. Les écoles l’ont bien compris. Comme l’ISCPA Paris, qui, chaque année, propose un exercice de simulation de reporter de guerre pendant onze jours, en partenariat avec l’École militaire. "Notre volonté est de privilégier une pédagogie de l’action", déclare Mireille Pallares, la directrice de l’institut.
Enfin, ces établissements accordent une place importante aux stages qui sont, pour elles, la principale porte d’entrée vers le marché du travail. "L’IEJ nous pousse au stage et c’est une bonne chose parce que le journalisme est un métier qui s’apprend sur le terrain", estime Mathieu, aujourd’hui en poste à Oui FM. Les cursus se concluent souvent par six mois de stage. Qui peuvent déboucher sur des CDD (contrat à durée déterminée) ou des piges, un premier pied dans le métier.
Une insertion compliquée dans les grands médias
Toutefois, l’insertion après ces formations peut être difficile, notamment dans certains grands médias, comme France Télévisions ou Radio France. La plupart des bourses et prix permettant d’y gagner un CDD sont réservés aux étudiants d’établissements reconnus. Et certains médias privilégient les diplômes renommés. "Des annonces de stage ou d’emploi stipulent clairement qu’il faut venir d’une école reconnue pour postuler, comme celles de France Télévisions, M6 ou TF1", soupire Mathilde, étudiante en dernière année en journalisme à 3iS.
Après trois ans à l’EFJ, à Levallois-Perret, Léa a estimé que sa formation était insuffisante pour devenir JRI (journaliste reporter d’images). “En deuxième et troisième année, l’EFJ a décidé de nous former au nouveau journalisme et nous devions filmer avec nos iPhone. Nous n’utilisions plus les caméras. J’ai fait un prêt étudiant de 22.000 € pour une formation qui n’était pas à la hauteur de mes espérances", affirme-t-elle, déçue. Léa choisit de poursuivre ses études en alternance, au CFPJ, et est ravie de son nouveau cursus : "C'est une grande chance pour moi, je suis en alternance pendant deux ans au pôle reportage de TF1. Je réalise tous les jours des sujets, sur le terrain. On me fait confiance et mon travail porte ses fruits".
Si la situation peut être délicate en sortie d’école, avec les années, le poids de la formation initiale se réduit, au fil de la carrière. "Les employeurs s’intéressent moins à l’école mais plutôt au profil et aux moyens que l’on se donne pour arriver à ses objectifs", estime Kessila, de l’ISFJ. "On ne recrute pas qu’en fonction de l’école, mais aussi de la personnalité", confirme Aymeric, diplômé de l’ESJ Paris, aujourd’hui journaliste à ‘20 Minutes’.
Entrer dans une école de journalisme, même non reconnue, permet donc d’accéder à un réseau et de côtoyer des professionnels en activité et une communauté de diplômés. Il faut cependant être prêt à être débrouillard et à faire ses preuves pour ses premiers postes. À voir si ce type de formation vous convient, selon votre profil et vos besoins de formation.
En apprentissage ou en contrat de professionnalisation, l’alternance est proposée par une partie des écoles de journalisme, qu’elles soient reconnues ou non par la profession. Elle dispense les étudiants des frais de scolarité, l’entreprise les prenant en charge. L’élève devient alors salarié et perçoit une rémunération chaque mois. Une formule qui permet de mettre un pied dans le milieu professionnel dès ses études.
La majorité des écoles peuvent aider leurs élèves à trouver une entreprise. "Nous avons une cellule relation entreprises qui se consacre à la recherche de contrats de professionnalisation et de stages", explique Ludovic Place, directeur de l’ISFJ. Contactez l’école que vous souhaitez intégrer pour en savoir plus.