Décryptage

Les grandes prépas recrutent-elles selon l'origine géographique ?

En 2023, le lycée Pierre de Fermat à Toulouse a acueilli dans ses prépas 20 à 30 élèves ayant préparé leur bac au sein de l'établissement.
En 2023, le lycée Pierre de Fermat à Toulouse a acueilli dans ses prépas 20 à 30 élèves ayant préparé leur bac au sein de l'établissement. © Lydie LECARPENTIER/REA
Par Oriane Raffin, publié le 06 février 2024
5 min

Henri IV, Louis Le Grand, le lycée du Parc à Lyon, Pierre de Fermat à Toulouse… Des établissements prestigieux qui font rêver bon nombre de lycéens. Mais peut-on y accéder si on vient d’une autre académie ou d’un autre lycée ? L’Etudiant a demandé aux proviseurs (et regardé les statistiques).

Il y a la théorie et les chiffres. Dans le cadre de Parcoursup, en tant qu’établissement sélectif, la localisation territoriale du candidat n’entre pas en ligne de compte pour la sélection en classe préparatoire.

Pourtant, les élèves de l’académie sont souvent surreprésentés au sein des établissements.

Des candidats en CPGE qui préfèrent la proximité géographique

C’est logique : à l’âge de 17/18 ans, parfois moins, ils peuvent préférer la proximité avec leurs familles. Une donnée prise en compte par les établissements. "Ce serait mentir que de dire qu’on n’a pas un regard sur l’origine géographique. A dossier égal, on va peut-être mettre celui qui est le plus proche géographiquement à la place du dessus dans le classement car on sait qu’il y a plus de probabilité qu’il dise oui sur Parcoursup et que l’accompagnement de la famille et sa proximité sont des facteurs de réussite", explique Manuel Neves, proviseur du lycée Champollion, à Grenoble (38).

Mais "la préférence territoriale, si elle existe, résulte du choix des candidats plutôt que du choix de l’établissement", souligne Maurice d’Angelo, proviseur du lycée Pierre de Fermat, à Toulouse (31). "En 2023, pour notre filière MPSI (mathématiques, physique et sciences de l'ingénieur), sur les 300 dossiers classés en premier à l’issue de la procédure via Parcoursup, seuls 35% provenaient de l’académie."

Avec le jeu des vœux multiples et des refus, à la rentrée, toute filière confondue, 60% des élèves venaient de l’académie de Toulouse. L’offre de CPGE sur le territoire fait qu’un bon élève n’aura pas à traverser la France pour accéder à un établissement sélectif.

Recruter les bons élèves "d'où qu'ils viennent"

Le lycée du Parc, à Lyon (69), accueille environ 720 élèves en première année de prépa. "Seulement 40 à 44% d’entre eux sont originaires de la grande région Auvergne-Rhône-Alpes, détaille son proviseur, François Beckrich. Entre 15 et 20% viennent de PACA, 30% des autres régions et 8 à 10% de l’étranger, de 29 pays différents."

Un rayonnement national, voire international qui laisse donc sa chance à chacun. "En résumé, nous voulons de bons élèves, d’où qu’ils viennent". De même, le proviseur accueille des élèves du public ou du privé. 

L’établissement d’origine - information dont disposent les commissions au moment de l’examen des vœux -, n’est pas utilisé comme critère de choix. "En aucun cas, être issu de mon établissement donnerait une espèce d’entrée gratuite pour accéder aux CPGE, tranche Maurice d’Angelo. C’est impensable, cela ne serait pas éthique. On ne va pas se priver d’un recrutement de qualité pour privilégier nos élèves."

Au lycée Pierre de Fermat, sur les 514 places mises sur Parcoursup l’an dernier, entre 20 et 30 ont été attribuées à des élèves ayant préparé leur bac au sein de l'établissement. "On est loin de compter sur eux pour remplir nos classes", poursuit le proviseur. En moyenne, les élèves de terminale des grands établissements de province ne représentent que 1 à 2% des élèves de CPGE.

Et Stéphanie Motta-Garcia, proviseure du lycée Henri IV à Paris (75) l'affirme : "On retrouve des élèves venant de lycées de province, grands et petits, privés sous contrat ou publics. Nous n’avons pas de frein. Ce qui fait la force de ces classes, c’est de mélanger ces pépites, ces talents en devenir qui viennent de partout".

Dans les prépas parisiennes, davantage d'élèves du même lycée

Pour autant, dans les grandes prépas parisiennes, les élèves issus de l’établissement sont souvent beaucoup plus nombreux. Selon les statistiques de 2023 fournies par Parcoursup, 35% des élèves en PCSI à Louis Le Grand avaient préparé le bac au sein du même établissement. À Henri IV, ils étaient 8% en MPSI et 31% en PCSI.

"L’an dernier, sur les 150 élèves de notre lycée qui ont demandé nos classes prépa, 60 ont été pris - soit moins de 40%. Ils sont traités comme les autres", nuance Stéphanie Motta-Garcia.

Pour expliquer ces chiffres, une raison principale : ces lycées, prestigieux, attirent les meilleurs élèves dès le lycée, et opèrent une sélection à l’entrée en 2de - via la procédure Affelnet.

De fait, les élèves brillants étant nombreux, ils ont statistiquement plus de chances d’entrer dans les CPGE les plus sélectives. "À partir du moment où les règles de Parcoursup sont suivies, il ne faudrait pas pénaliser un très bon élève qui le mérite. Là où c’est choquant, c’est quand on contourne les procédures", note Alain Joyeux, président de l’APHEC (Association des professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales).

Alors quelle que soit votre académie ou votre établissement d’origine, il ne faut pas hésiter à postuler. Sans oublier de mettre des établissements moins sélectifs parmi ses vœux, pour s’assurer une place.

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