LE PORTRAIT DE MERTEUIL
Le personnage de la marquise de Merteuil est sans doute le plus emblématique de l’œuvre de Laclos. Baudelaire la décrit ainsi : « Tartuffe femelle, Tartuffe de mœurs, Tartuffe du XVIIIe siècle », « chez qui tout ce qui est humain est calciné ». Quels sont les éléments qui la font être qualifiée de la sorte ?
Littérature – Bac L
Le portrait de Merteuil
Le personnage de la marquise de Merteuil est sans doute le plus emblématique de l’œuvre de Laclos. Baudelaire la décrit ainsi : « Tartuffe femelle, Tartuffe de mœurs, Tartuffe du XVIIIe siècle », « chez qui tout ce qui est humain est calciné ». Quels sont les éléments qui la font être qualifiée de la sorte ?
I- Merteuil, un Tartuffe
Aux yeux des autres, Merteuil est une femme bien considérée. Madame de Volanges salue sa vertu (9) et Tourvel la qualifie de « femme estimable ».
Elle se joue des autres parce qu’elle excelle en la matière et est passée maître dans l’art de la mise en scène (85)
Contrairement à Valmont, la Marquise est dans le déguisement le plus complet à l’égard d’une société qui ne la considère pas comme dangereuse. La révélation de son être profond n’en prendra que plus d’éclat.
II- Ce qu’elle pense des autres et son attitude
Ce sont tout d’abord les autres femmes qu’elle se permet de juger bien sévèrement. Cécile est « gauche » et même si elle a été tentée d’en faire l’éducation elle la range finalement dans la catégorie des « machines à plaisir » (106). Tourvel n’a « nulle expression » et bien qu’elle lui reconnaisse une certaine force, elle ne souffre pas la comparaison. C’est que Merteuil se pense unique en tant que femme : « ne me confondez plus avec les autres femmes » (85). D’ailleurs, elle opère une classification de celles-ci dans la fameuse lettre 81 et rares sont celles qui trouvent grâce à ses yeux puisque la marquise stigmatise toujours leur impuissance contrairement à elle qui est omnipotente.
A l’égard des hommes, elle n’est guère plus tendre. Elle dresse un tableau peu flatteur de Gercourt qui « n’est qu’un sot ». Le seul avantage de son mari a été son côté pratique qui lui a permis de se livrer à ses expérimentations. Chez Danceny, elle souligne la jeunesse et dit à Cécile que « c’est un de ces hommes qu’on a quand on veut et tant qu’on veut ». Il n’y a donc guère que Valmont qu’elle estime, du moins tant qu’il reste son complice.
Son mépris général à l’égard de l’humanité laisse entendre qu’elle veut diriger les autres en toute circonstance. Elle est en effet à l’origine de toutes les manipulations et aime particulièrement à dominer les hommes qui sont des cibles plus flatteuses. Ne se qualifie-t-elle pas de « Nouvelle Dalila » (81) et n’affirme-t-elle pas qu’elle a « pu avoir quelquefois la prétention de remplacer tout un sérail » (127) ? Elle cherche même à dicter sa conduite à Valmont et lui reproche son ton marital (152), revendiquant son absolue liberté.
III- Une femme révoltée
La marquise de Merteuil est finalement en lutte contre une société dont elle dénigre les valeurs.
C’est sa capacité à appréhender les comportements des autres et les incidences de ses actions qui l’ont construite. (81)
Elle multiplie les conquêtes et fait du vice un principe d’éducation, expliquant à Cécile que son mariage avec Gercourt ne l’empêchera en rien de prendre des amants, bien au contraire.
Elle remet en cause le silence du confesseur de Cécile et se prend pour une « Divinité ».
Outre l’exemple précédemment cité avec Gercourt on peut noter comme exemple qu’elle affiche un certain dédain à l’égard du couple de Tourvel dont le mari n’est pas un obstacle.
La marquise de Merteuil possède donc bien les caractéristiques d’un libertin dont le principe de vie est la liberté absolue.
Emmanuelle Colas