Portrait

Pablo Flye, le lycéen qui donne la priorité à son engagement

"Donner beaucoup de temps à mon engagement est un choix, quitte à consacrer un peu moins de temps à mes cours", avoue Pablo.
"Donner beaucoup de temps à mon engagement est un choix, quitte à consacrer un peu moins de temps à mes cours", avoue Pablo. © Thibaut Cojean
Par Thibaut Cojean, publié le 08 novembre 2021
6 min

GÉNÉRATION ENGAGÉE. Pablo Flye a consacré plusieurs dizaines d’heures par semaine à la primaire populaire, une initiative citoyenne qui devait désigner un candidat commun à la présidentielle. Pour cet élève de terminale qui n'avait pas encore le droit de voter en 2022, Parcoursup et le bac sont (presque) devenus secondaires.

Pablo Flye voyage beaucoup pour un lycéen. Ce samedi après-midi d’octobre, il vient d’arriver à Colombes (92), dans le nord de Paris, pour le congrès des jeunes du mouvement Génération.s. Le matin, il était avec les bénévoles de la primaire populaire à Joigny (89), à 160 kilomètres de là, de l’autre côté de la capitale. La veille, il était en cours au lycée Jacques Marquette de Pont-à-Mousson (54), petite ville située entre Metz et Nancy.

Marcheur pour le climat depuis la 3e

"Je suis militant", répète à l’envi ce grand gaillard de 17 ans débordant d’énergie. Un militant déjà expérimenté malgré son jeune âge. "J’ai fait mes premières marches pour le climat en 3e, à l’occasion du mouvement initié par Greta Thunberg, raconte-t-il. Cela m’a tout de suite plu car il y avait une énergie militante de gens qui partageaient ma conviction environnementale. Ça m’a plongé dans le militantisme, ça m’a montré qu’on avait les moyens de changer les choses, chacun et chacune à notre niveau."

Par la suite, Pablo rejoint la section jeunesse de Génération.s, fondé par Benoît Hamon après la présidentielle de 2017. Son engagement grandit en même temps que son assurance. Le jeune homme raconte aujourd’hui son expérience avec des mots réfléchis et une diction impeccable, qui trahissent une habitude de parler en public peu commune pour un élève de terminale.

"Créer les conditions d’un rassemblement à la présidentielle"

Un jour de juillet 2021, il est contacté par les bénévoles de la primaire populaire. "J’en entendais parler depuis quelque temps. Ils m’ont invité au premier week-end d’accueil des bénévoles à Paris et depuis je suis lancé." Dans un discours à la résonance politique, il définit la primaire populaire comme "un mouvement qui va permettre de créer les conditions d’un rassemblement à la présidentielle 2022".

Pour compléter, il s’agit d’une initiative citoyenne ayant pour but de proposer un ou une candidat(e) choisi(e) par des internautes et prônant une politique sociale, écologique et solidaire. À ce jour, cinq hommes et cinq femmes ont été désignées par 100.000 participants et pourraient s’affronter lors d’une primaire en janvier. Pour concrétiser ce projet, l’association cherche à remplir ses rangs, et compte notamment sur un puissant réseau de bénévoles.

"À 16 ans, on est en mesure de donner notre avis"

C’est ce à quoi Pablo consacre "plusieurs dizaines d’heures par semaine" : accueil des nouveaux bénévoles en ligne, réunions avec les ambassadeurs et ambassadrices jeunes, coordination d’un groupe local à Nancy. Une énergie d’autant plus inédite que Pablo n’aura pas encore 18 ans au moment de l’élection présidentielle, et donc pas le droit de voter. "Il y a une question qui doit se poser sur la place des jeunes dans la société et dans le débat démocratique, estime-t-il. À 16 ans, on est largement en mesure de donner notre avis, de nous exprimer sur la manière dont fonctionne la société."

Il sait pourtant qu’il incarne l’exception. Et s’il comprend le désintérêt des jeunes pour la politique, il voudrait "porter leur attention sur le fait qu’il existe des projets qui pourraient changer la donne, et qu’il est important de les soutenir".

De nouvelles compétences grâce au militantisme

Avec un programme aussi chargé, le lycéen a dû faire des choix. Ce sont les activités extrascolaires qui ont été sacrifiées : il a arrêté l’escalade et a réduit la musique, même s’il trouve encore le temps de prendre des cours de basse.

Sa scolarité n’en sort pas indemne pour autant. "Donner beaucoup de temps à mon engagement est un choix, quitte à consacrer un peu moins de temps à mes devoirs et à mes cours." Il admet sans mal que ses résultats scolaires, s’ils restent "satisfaisants", sont en baisse. "Si j’y passais plus de temps, je pourrais faire beaucoup mieux." Son engagement lui est tellement important qu’il a aussi réduit ses ambitions post-bac. Il rêvait de faire Sciences po, mais se prépare déjà à ne pas avoir les résultats suffisants.

Une fatalité qui ne lui fait pas perdre son sourire séducteur. D’autant qu’il semble tout de même avoir assuré ses arrières. "Les exigences pour entrer dans la vie active ne sont pas seulement des bonnes notes, mais aussi la capacité à être autonome, à gérer des projets, être persévérant, s’engager et s’investir dans des causes. Le fait d'avoir développé ces nouvelles compétences avec mon militantisme sera valorisé dans Parcoursup, même pour l’admission à Sciences po." En tout cas, "c’est ce que mes enseignants m’ont dit, j’espère que ça le sera, ça me paraîtrait logique".

Une chose est sûre, avec une telle capacité à partager sa verve et sa passion, on ne se fait pas de souci pour son grand oral.

"Génération engagée"
A l'occasion de l'élection présidentielle, l’Etudiant a donné la parole à des jeunes – lycéens, étudiants, etc. – engagés dans des projets citoyens, associatifs ou encore politique. Tout au long de la campagne, nous avons brossé le portrait de cette génération engagée. Une occasion de connaitre aussi leur vision de cette élection, des candidats et les enjeux qui leur sont chers.

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