Portrait

Camille Lakhlifi, lauréate de MT180 : "Vulgariser ce qu'on fait, ça fait partie du devoir des chercheurs"

Camille effectue des recherches sur les biais cognitifs qui peuvent survenir lorsque les médecins sont amenés à prendre une décision à l'hôpital.
Camille effectue des recherches sur les biais cognitifs qui peuvent survenir lorsque les médecins sont amenés à prendre une décision à l'hôpital. © Alliance Sorbonne - Paris Cité
Par Rachel Rodrigues, publié le 20 juin 2023
1 min

Camille, jeune doctorante en sciences comportementales à l'université Paris Cité, a remporté le premier prix du jury lors de la finale du concours "Ma thèse en 180 secondes". Après trois ans de recherche sur les biais cognitifs des médecins, elle revient sur son expérience et ses aspirations pour la suite.

"Pour notre santé, pratiquons une activité sceptique régulière." C'est ponctué de rires et de nombreux applaudissements que le public a accueilli la prestation de Camille Lakhlifi, le 8 juin dernier, à Rennes (35). La jeune doctorante de 26 ans, lauréate du premier prix du jury lors de la finale du concours "Ma thèse en 180 secondes", admet avoir misé sur l'humour. "La prise de décision des médecins, ça peut vite faire peur, explique-t-elle. J'ai voulu dédramatiser tout ça."

Depuis trois ans, Camille concentre ses recherches sur les biais cognitifs qui peuvent survenir lorsque les médecins sont amenés à prendre une décision à l'hôpital. L'intitulé exact ? "Capacités métacognitives des clinicien.ne.s : quels liens entre la justesse objective des choix des médecins et leurs jugements de confiance subjectifs dans leurs connaissances et décisions sous incertitude ?"

En d'autres termes : la doctorante cherche à évaluer l'adéquation entre le jugement de confiance des médecins et la justesse de leurs décisions, "dans un environnement de travail caractérisé par le stress et l'incertitude", précise-t-elle.

Devoir de vulgarisation

Les règles du jeu étaient posées. L'objectif ? Rendre intelligible une thèse réalisée sur trois années, en l'espace de trois minutes. Pour Camille, rien de nouveau : "Vulgariser ce qu'on fait, ça fait partie du devoir des chercheurs".

La jeune chercheuse a, à plusieurs reprises, entraîné son esprit de vulgarisation, à travers ses expériences professionnelles ou associatives. "Depuis mon master, j'ai organisé de nombreuses conférences à destination du grand public", étaye-t-elle.

Après son master, l'étudiante a ainsi travaillé à la Direction interministérielle de la transformation publique (DITP), pendant un an. Cette expérience professionnelle lui a permis de poursuivre cette démarche de vulgarisation scientifique.

"Mon poste consistait à diffuser les connaissances et méthodes liées aux sciences comportementales auprès des décideurs publics français qui ne connaissaient pas forcément cette approche", détaille la jeune femme.

"Comprendre pourquoi les êtres humains pensent comme ils pensent"

C'est donc sans surprise que Benjamin Rohaut, son directeur de thèse, a découvert sa prestation au concours. "Je l'ai entendue plusieurs fois présenter les travaux de recherche, ces dernières années. J'ai toujours été convaincu de sa capacité à synthétiser sa pensée", affirme le chercheur en neurosciences à l'Institut du cerveau.

Camille fait partie de ces étudiants qui ont su assez tôt ce qu'ils souhaitaient faire. "Pour moi, l'idée remonte à la fin du lycée", se remémore-t-elle. À l'époque, difficile pour elle de mettre un nom sur ce qu'elle veut faire. Mais"il était clair que je devais travailler à essayer de comprendre pourquoi les humains pensent comme ils pensent", explique la chercheuse.

Après une licence de biologie à Strasbourg (67) et le constat d'un intérêt plus marqué pour l'approche psychologique comportementale, elle décide de se diriger vers un master en sciences cognitives, qu'elle réalisera à Paris (75).

Avoir un impact sur la société

Après son expérience professionnelle au sein de la DITP, une thèse ne lui était pas indispensable. Mais c'est finalement par le biais de différentes discussions et de rencontres qu'elle décide de sauter le pas. "J'ai eu beaucoup de chance que la HAS (Haute autorité de santé) accepte de financer mon projet", raconte-t-elle.

Pour Benjamin Rohaut, cette détermination coïncide avec l'envie de Camille d'avoir un impact sur la société, un facteur "essentiel" à tout chercheur. "C'est cette motivation qui l'a aidée à surmonter les obstacles et à ne jamais abandonner les recherches", assure le neurologue.

À l'avenir, la doctorante aimerait mettre à profit ses connaissances dans des instances publiques, afin de contribuer par exemple à la protection des consommateurs, "un domaine qui (lui) tient à cœur". Mais avant, elle doit encore rédiger son manuscrit de thèse, qu'elle espère soutenir cet automne.

En octobre, Camille sera également au Maroc pour la finale internationale de "Ma thèse en 180 secondes", où elle affrontera une vingtaine de candidats venus de pays francophones.

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