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"Il faut harceler la fac" : à 10 jours de la rentrée, des étudiants sans master toujours en attente de réponse

Pour certains étudiants sans master, saisir le rectorat est la dernière chance d'obtenir une place dans une formation.
Pour certains étudiants sans master, saisir le rectorat est la dernière chance d'obtenir une place dans une formation. © Adobe Stock/hwanchai
Par Camille Bluteau, publié le 29 août 2023
5 min

Le droit est une des filières les plus sélectives en master. À quelques jours de la rentrée, beaucoup d’étudiants attendent une réponse de leur recteur et ne savent pas encore s’ils auront une place en master. Pour certains, l’angoisse monte.

Une attente interminable. "À tout moment, je suis censée trouver un logement à 500 km de chez moi du jour au lendemain." Léana, originaire du Mans (72), est toujours en attente d’une potentielle réponse du recteur pour son entrée en master à une dizaine de jours de la rentrée universitaire.

Une attente rendue encore plus stressante par la pause estivale

"J’ai fait les 15 demandes sur Mon master, en droit privé et droit pénal. J’ai reçu 14 réponses négatives et j’ai été placé 292e sur liste d’attente au Mans", témoigne-t-elle. Totalement démotivée et sans espoir, elle a décidé de saisir le recteur. Marie-Amélie, également étudiante en droit, a vu le recours comme "une réelle chance de pouvoir tout de même intégrer une formation cette année."

Mais voilà, problème pour ces nombreux étudiants qui ont saisi leur recteur : la pause estivale. Si certains ont pu envoyer leur dossier complet avant les vacances, Léana a pu l’envoyer seulement le 16 août.

En plus de cela, son recteur a fait des demandes pour les universités de Nantes, Lille, Strasbourg, Toulouse et Pau pour un master qu’elle aimerait et "à Angers et au Mans, dans le master opposé à mon projet". Claire*, qui souhaite devenir avocate, s’exaspère : "On nous demande de faire des saisines, mais tout le monde est en vacances".

"Quand je rentrais du travail, je pleurais"

Cloé vit la même situation que Léana, Marie-Amélie et Claire. Son stage dans le droit pénal et son job étudiant ne lui ont pas suffi pour être admise dans le master de ses rêves. "Je savais que c’était très sélectif, mais je ne pensais pas me retrouver sur le carreau."

Malgré ses deux redoublements, Rudy, lui, avait bon espoir. "L’un de nos profs nous avait prévenus du manque de places en master. Il avait également indiqué la difficulté supplémentaire pour les redoublants. Mais ayant des notes plutôt bonnes en droit privé, j'essayais de relativiser", raconte-t-il.

Tous les jours, Claire, qui se retrouve désemparée, scrolle ses mails dans l’espoir d’une possible réponse. "Heureusement que je suis en vacances, ça me permet de faire autre chose, même si je ne profite pas normalement."

L'étudiante ne décolère pas : "Aujourd’hui, il faut harceler la fac pour avoir un master". Pourtant, elle n’est pas inquiète pour la recherche de logement. "J’ai tellement envie d’être acceptée quelque part que la galère de la recherche de logement ne m'importe pas vraiment. J’ai eu une période, en juillet, où quand je rentrais du travail, je pleurais. Ma mère ne savait plus quoi faire."

Des problèmes de sommeil à cause du stress

Une situation stressante pour tous les étudiants. "Si jamais ça abouti, ça va être compliqué pour ensuite trouver un logement, s'organiser... Je vais arriver en cours d’année, après avoir loupé la rentrée", s’inquiète Cloé.

"Après, si je suis admise, j'ai des gens chez qui dormir le temps de trouver un logement, mais bon…", ajoute-t-elle.

Mêmes inquiétudes chez Marie-Amélie, qui "cumule beaucoup de stress" entre les questions de logement, de travail et le fait de ne pas savoir ce qu’elle fera à la rentrée.

"Ce stress m'a notamment provoqué des problèmes de sommeil qui commencent à se régler grâce à un médicament que mon médecin m'a prescrit. Je m'enferme beaucoup dans mon travail pour ne pas avoir à trop penser à la situation", précise celle qui est "complètement perdue en ce moment" et "ne sais pas trop sur quel pied danser".

"Pas de perspectives d’avenir"

Léana, elle, se dit "révoltée" contre le délaissement auquel font face les étudiants. "On se tue des années à enchaîner les journées d’école et le travail étudiant le soir, à s’en abîmer la santé tant mentale que physique pour rien puisqu’il n’y a pas de perspectives d’avenir par la suite."

"On nous a répétés : 'Faites des stages, engagez-vous dans l’associatif… C'est ce qu’on regarde dans la sélection", précise Claire, qui se demande comment son dossier a pu être refusé partout après avoir fait autant d’efforts.

"Nous avons été les cobayes de cette plateforme désorganisée"

"Nous avons clairement été les cobayes de cette plateforme désorganisée, entre les facultés qui bafouent les règlements de sélection, les listes d’acceptation erronées et refaites quelques jours plus tard, les listes d’attente qui n’en finissent plus et la réalité d’études qui s’achève beaucoup plus tôt qu’on ne l’imagine", enrage la jeune femme.

Rudy, qui s’est occupé de son père atteint d’une pathologie neurologique pendant sa licence, se questionne : "Est-ce que j’aurais dû encore plus travailler pour obtenir un master ? Peut-être". Et reproche à la sélection "la prise en compte des notes et non du dossier des élèves".

*Le prénom a été changé.

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