Portrait

Paul, élève en école de commerce et rappeur en construction

Paul souhaite allier études et sa passion pour la musique.
Paul souhaite allier études et sa passion pour la musique. © Agnès Millet
Par Agnès Millet, publié le 15 juillet 2022
5 min

Élève à l'Iéseg, Paul a cheminé plusieurs années pour trouver sa voie entre ses études en école de commerce et sa passion pour le rap. De Grenoble à Paris en passant par Lille, entre petits boulots et crise sanitaire, il nous raconte son parcours.

Attiré par la création depuis l'enfance, c'est vers la photo et la vidéo que Paul veut se diriger, en rêvant à la Fémis. Pour décrocher de meilleures notes et intégrer une prépa dédiée, il redouble sa première S.

L'essai n'est pas probant et, en terminale, le jeune Isérois passe les concours d'écoles de commerce et des IEP (Instituts d'études politiques). Il décroche une place en programme Grande école (PGE) post-bac à l'Iéseg, à Lille. "Le choix a été vite fait. Étant très créatif, j'avais besoin d'un cadre pour ne pas me perdre", explique-t-il.

Une école de commerce pour toucher à tout

Dans son école de commerce, Paul étudie la compta, le marketing et le droit… et explore d'autres voies. Il s'implique dans des associations, au Bureau des arts, organise des événements dont un concours d'éloquence et creuse son sillon musical.

"Depuis ma 3e, en 2014-2015, je créais des musiques instrumentales sur ordinateur, en me formant en autodidacte. Il suffit d'un ordinateur et d'un peu de patience. Pour composer, je regardais les 'Leçons de Stromae', un artiste vraiment complet pour moi."

Pour investir dans un ordinateur plus performant, il travaille deux étés et se fait la main via des books photos ou des clips qu'il réalise pour des amis ou des entreprises. "À l'Iéseg, j'ai pu bricoler de fausses émissions de radio, car je continuais d'apprendre le montage vidéo et le mixage son, de mon côté."

Faire passer la musique en premier

Il a ensuite le déclic qui place la musique au premier plan. En mars 2020, il rentre près de Grenoble, chez ses parents et suit les cours à distance. "Il a fallu être assez assidu" car le redoublement menace. Avec ses activités hors cursus, Paul admet n'avoir pas "été très focalisé sur le cœur des études."

"Le confinement a été le moment de prendre du recul. Soutenu par ma famille, j'ai la liberté de faire ce qui me plait. Mais pour beaucoup, la question 'qu'est-ce que j'ai envie de faire ?' est la plus difficile. Là, je me suis dit : 'En vrai, ce que tu as envie de faire, c'est de la musique'. J'en faisais tous les jours !"

Une chose le retient. "Je veux chanter depuis mes cinq ans mais je ne me sentais pas capable d'écrire des textes". Il se jette à l'eau et poste un morceau. Les premiers commentaires - positifs - l'encouragent.

Trouver la légitimité en tant que rappeur

À la rentrée 2020, les cours reprennent à distance et Paul continue la musique. Il gagne en visibilité grâce à des concours sur les réseaux sociaux. La marque Mentos le contacte. La proposition ? Créer une chanson avec un autre rappeur pour cibler les 15-20 ans, avec une expérience complète à la clef : un contrat comprenant un enregistrement studio, un clip, avec inscription à la Sacem…

Paul se lance, après avoir pesé sa décision. "Par rapport à certains potes rappeurs, je me rends compte que j'ai un bagage en plus. J'ai négocié un point qui ne me convenait pas dans le contrat et pour les réseaux sociaux, je sais qu'il faut se penser comme une marque. Les cours m'apportent cet esprit critique et cette culture générale."

Passionné et débrouillard, le jeune homme de 22 ans analyse l'expérience Mentos comme "la conversion du troubadour" en artiste professionnel.

Au point de tout plaquer ? Paul hésite à arrêter ses études. "Je ne me vois pas travailler dans le consulting, par exemple. Ce n'est pas ma voie. Mais je veux finir mon cursus : il me donne la légitimité d'être un artiste intelligent sur le long terme et de prendre des décisions censées. Et si la musique ne marche pas, j'aurais un plan B".

Monter un plan entre ses études et le rap

Sur Instagram, il enregistre 4.535 abonnés et son morceau Doliprane fonctionne bien (chanson à écouter ci-dessus, ndlr). "J'y raconte que la musique, c'est mon truc et que si je n'en fais pas, ça n'a pas de sens."

Revenu de six mois d'échange à Vilnius (Lituanie), Paul a "un plan en tête". Fraichement débarqué à Paris où il s'est dégoté une chambre de bonne jusqu'en décembre, il va allier études et rap. Le jour, il travaille son mémoire de dernière année sur l'industrie de la musique et le soir, il compose en studio. "Je veux retrouver le plaisir de l'écriture et je me suis fixé de sortir un morceau par mois."

Début 2023, il espère s'envoler en Italie ou en Espagne, pour valider son diplôme par un semestre de stage dans l'industrie du disque. "Je me donne un an pour être assez fort artistiquement et signer un contrat", précise le jeune rappeur. "J'ai des contacts, des compétences musicales et vidéos et mon cursus en école de commerce m'a armé. En ce moment, je suis un peu comme Aznavour au début de la chanson J'me voyais déjà : j'y crois ! Maintenant... il faut que j'écrive des morceaux !"

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