Décryptage

Comment le mentorat peut devenir un tremplin pour les étudiants

Le mentorat dure généralement un an.
Le mentorat dure généralement un an. © Adobe Stock/Konstantin
Par Yslande Bossé, publié le 03 janvier 2024
5 min

Né outre-Atlantique, le mentorat connaît un engouement au sein des universités françaises. Cette expérience d’accompagnement pratique permet à des professionnels expérimentés d’aider et soutenir bénévolement, durant plusieurs mois, des étudiants issus de tous les cursus dans leur projet d’études.

Au départ, Fanny Lehmann, inscrite en troisième année de thèse à Paris-Saclay, hésite à s’inscrire au programme de mentorat "Femmes et Sciences" déployé en 2018 pour les doctorantes de l’université. L’étudiante de 25 ans ne rencontre aucun problème avec ses encadrants et sa thèse se déroule bien.

Pourtant, en février 2023, elle intègre le programme en raison de "la problématique de la sous-représentation des femmes dans le milieu scientifique". Si elle n’a pas souvenir d’avoir subi des remarques liées à son genre le long de son parcours, Fanny constate "la disparition des femmes" lorsqu’elle rentre à l’ENS Paris-Saclay en 2017. "Nous étions 12%", souligne-t-elle.

"Le mentorat m’a appris à anticiper"

À Paris-Saclay (91), qui compte 21 écoles doctorales, le mentorat fonctionne. En moyenne, chaque année depuis 2018, 50 binômes mentor-mentoré se forment. "Il y a beaucoup de demandes, le besoin est très identifié", détaille Géraldine Liot, maîtresse de conférences à l’université Paris-Saclay et l’une des trois co-dirigeantes bénévoles du programme de mentorat.

Le mentorat se déroule sur une année civile. Pour Fanny, le programme, qui devrait se terminer au début de l’année 2024, se présente comme un bon moyen de s’informer sur "un certain nombre de choses dont elle n’a pas encore conscience" mais qui pourraient avoir un impact sur sa carrière.

Si elle doit retenir un conseil pratique du programme, ce serait d'anticiper ses choix futurs. "Cela n’est pas toujours facile quand on est dans la thèse, mais le mentorat m’a appris à le faire", résume la jeune femme.

Une relation de confiance entre mentor et mentoré

Sessions de recrutements, atelier de formation sur la confiance en soi, immersion professionnelle… De nombreux cas pratiques sont proposés aux étudiants intéressés par le dispositif, dont la force repose en grande partie sur la relation de confiance qui s’établit petit à petit entre le mentoré et son mentor.

Téri, étudiante de 19 ans, a intégré, en septembre 2022, la formation initiale au métier d’ingénieur de l’Insa Lyon (69). Bien qu’elle n’ait pas choisi elle-même ses deux mentors, l’étudiante apprécie la relation qu’elle entretient avec eux. "Le fait que mes mentors soient des ingénieurs qui sont passés par l’INSA et qu’ils m’aident dans mes études en me donnant leurs retours et leurs conseils est super bénéfique", souligne-t-elle.

De son côté, Gabin, 22 ans, qui suit des études de ressources humaines à l’IUT de Villetaneuse (93), a pu également compter durant deux années sur le soutien de mentors spécialisés dans sa filière. Notamment, pour trouver un stage et une alternance. Sur la plateforme de l’association Article 1, partenaire de son université et investie depuis 2004 dans l’orientation et l’insertion professionnelle des jeunes, en particulier ceux issus de milieux populaires, l’étudiant est invité à préciser ses besoins en matière d’accompagnement.

Rebondir avec le mentorat

Qu’ils soient insérés dans des cursus professionnalisants ou plus classiques, les étudiants qui participent aux programmes de mentorat se posent beaucoup de questions. En particulier, sur l’avenir professionnel ou le bien fondé de leurs études.

"Révèle-toi avec le mentorat" est un programme lancé en 2020 par le Club des entreprises de l’université Savoie Mont Blanc (73). Son ambition première est "d’aider des jeunes en situation d’échec" mais aussi de répondre à une demande de recrutement dans la région, explique Alain Hivet, vice-président du Club des entreprises.

Poser sa candidature pour ce programme en début d’année 2023 s’avèrera un déclic pour Camille, 23 ans. Après une sélection en master qui a été "assez rude" et un déménagement express à Chambéry, l’ancienne étudiante en droit à l’université Savoie Mont Blanc s’est sentie "complètement perdue" lors de son arrivée au cours du mois d’octobre 2022. À tel point qu'après des partiels de premier semestre "compliqués", elle se demande si elle veut vraiment continuer en master.

Sa rencontre avec Hélène Bigot, présidente du tribunal judiciaire de Chambéry, qui a accepté de devenir sa mentor, lui permet de relativiser les choses et même de prendre seule une grande décision : arrêter son master 1 pour chercher du travail malgré sa seule licence de droit en poche.

"Il y a d’autres façons d’entrer dans la justice que la voie du sacro-saint concours", tempère ainsi la magistrate pour qui le rôle de mentor consiste à rester pragmatique et "accompagner les étudiants en se mettant au service de leurs besoins".

Aujourd’hui, Camille travaille au service juridictionnel du tribunal judiciaire de Toulouse (31). Cet emploi, elle l’a trouvé sans l’aide de sa mentor. "Discuter avec elle a été très rassurant. Ça m’a aidé à faire le meilleur choix. Je ne regrette pas d’avoir arrêté mon master", confie l’étudiante, qui a su rebondir après son décrochage, grâce à une expérience de mentorat axée sur la bienveillance.

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