Enquête

Pédagogie : l'université innove aussi !

la pédagogie innove à l'université-ADOBE
A l'université, différents projets font évoluer le format des enseignements et les étudiants y gagnent en autonomie. © Deepol/Plainpicture
Par Amélie Petitdemange, publié le 11 novembre 2019
6 min

Les cours à l’université ne se déroulent plus forcément dans un amphi où des centaines d'étudiants sont assis et se contentent d'écouter un cours magistral. Certains établissements innovent dans leur pédagogie.

A l’Université de Picardie Jules-Verne, les étudiants en troisième année de licence de sciences sociales - parcours ethnologie - ont réalisé un web-documentaire interactif. Les entretiens sociologiques sont présentés sous forme de vidéos et accompagnés d’enquêtes de terrain filmées. Les étudiants ont ainsi travaillé sur une nouvelle façon de recueillir et de présenter leurs données. Pour l'occasion, ils ont été formés au montage vidéo.

Un web-documentaire à réaliser

Héloïse Mathieu, étudiante en troisième année de licence, ne s’attendait pas du tout à cette pédagogie en entrant à la fac. Elle a fait partie de la première promotion à réaliser un web-documentaire et ressort convaincue de cette expérience. "Les cours sont souvent théoriques à la fac, pouvoir y intégrer de la pratique m’a beaucoup apporté. Je poursuis d’ailleurs en master d’audiovisuel".

La petite promotion (dix élèves) a réalisé des recherches et des entretiens préparatoires avant d’aller sur leur terrain d’enquête, la Baie de Somme. "On s’est réparti les sujets par petits groupes. Des étudiants ont par exemple travaillé sur une famille de pêcheurs. Nous filmions les entretiens, les relations entre les différents acteurs du territoire, les gens en train de travailler…"

Maïté Boullosa-Joly, maître de conférences en anthropologie, et Sophie Chevalier, professeure en anthropologie, sont à l’origine de ce nouvel outil. "Réaliser des vidéos leur permet de mieux rendre compte de la réalité sociale qu’ils ont observée", affirment-elles.

Leur production peut ensuite servir lors d’entretiens professionnels car elle est disponible en ligne. Elle est également utilisée par les professeurs lors des cours. "On prend un entretien filmé et on l’analyse. Cela permet d’avoir des exemples très concrets et les étudiants s’identifient davantage car ce sont leurs camarades qui les ont réalisés", explique Sophie Chevalier.

Une pédagogie applicable à toutes les disciplines

L’université a reçu le prix PEPS "Passion Enseignement et Pédagogie dans le Supérieur" 2019 pour cette méthode d’enseignement innovante. Grâce au prix de 2.500 euros, le projet va être reproduit avec la promotion suivante. Les premiers étudiants à avoir participé au projet peuvent d’ailleurs devenir tuteurs. Ce projet pédagogique innovant a en effet un coût assez élevé, notamment en raison du déplacement sur le terrain et de l’embauche d’intervenants spécifiques.

Le web-documentaire peut être utilisé dans d’autres filières, mais nécessite donc un investissement et fonctionne mieux avec des effectifs réduits. "C’est un mode de pédagogie qui peut être utilisé en sciences humaines et sociales, mais aussi en géographie ou dans d’autres disciplines. Nous avons choisi la vidéo, mais cela peut aussi être des photos, des cartes, des schémas… Toutes les disciplines pourraient s’en emparer, même la chimie", assure Maïté Boullosa-Joly.

Ni cours, ni examens !

L’université de Picardie Jules_Verne recevra le prix PEPS en janvier aux côtés de plusieurs autres lauréats, dont l’Université Haute-Alsace pour son école du numérique UHA 4.0. Cette école délivre quatre diplômes universitaires en développement informatique avec une pédagogie innovante. Ni cours, ni examens, les compétences sont validées par des projets proposés par des entreprises.

Des formations qui ouvrent droit à une licence professionnelle "Développeur Informatique" et un master "Informatique Mobile" en postulant à un VAAP (validation des acquis professionnels et personnels).

"C’est un enseignement hybride, piloté par des projets et des cours en ligne. Nous donnons également des 'topos', c’est-à-dire des réunions en petits comités sur les points qui posent problème aux étudiants", explique Pierre-Alain Muller, vice-président de l’UHA 4.0.

Les étudiants doivent être présents 35 heures par semaine pour avancer sur leurs projets mais gèrent leurs emplois du temps librement, au contact des entreprises et de l’équipe pédagogique. Une organisation plus proche de l’entreprise que de l’université.

Des projets réels

Luc Ratelli, 20 ans, est en deuxième année à l’UHA 4.0. Il a quitté sa formation d’ingénieur où "les cours n’allaient pas nous servir en entreprise". "Les anciens élèves nous disaient que les entreprises les reformaient à 90%", affirme le jeune homme.

Les étudiants apprécient d’être tout de suite "dans le vif du sujet" et de travailler sur des projets réellement demandés par des entreprises. Ils ont aussi la possibilité de développer leurs propres projets, qui donnent parfois naissance à des entreprises.
Ce type de pédagogie s’adresse à des étudiants qui ont une appétence pour l’autonomie et une capacité à faire des recherches seuls. Les travaux de groupe sont cependant récurrents et mélangent les différents niveaux. Les étudiants peuvent ainsi apprendre les uns des autres.

Ces innovations pédagogiques se répandent de plus en plus dans l’enseignement supérieur, qui fait face à une concurrence internationale accrue. Une aubaine pour les étudiants en demande de programmes riches et exigeants.

Vous aimerez aussi

Contenus supplémentaires

Partagez sur les réseaux sociaux !