Décryptage

Crise sanitaire : comment les universités accompagnent les étudiants en détresse ?

Le service de santé universitaire SUMPPS de Sorbonne Université.
Le service de santé universitaire SUMPPS de Sorbonne Université. © Romain GAILLARD/REA
Par Corentin Parbaud, publié le 21 janvier 2021
5 min

Isolés depuis le début de la pandémie et privés de cours en présentiel, les étudiants français souffrent psychologiquement et financièrement. Les universités déploient des moyens pour leur venir en aide.

"On nous reproche tout mais on refuse de nous aider et de nous écouter". "On va MAL"… Sous le #etudiantsfantomes, en tendance Twitter depuis plusieurs jours, les étudiants font état de leur isolement depuis le début de la pandémie et s’ouvrent sur leur détresse psychologique, qui croît en même temps que leur précarité financière.

"À dix-neuf ans, j’ai l’impression d’être morte"

"À 19 ans, j’ai l’impression d’être morte." Voilà comment Heïdi Soupault a entamé sa lettre ouverte, publiée sur Facebook, à Emmanuel Macron. "C’est un mélange de perte d’enthousiasme et de monotonie, qui fait qu’on perd en estime de soi, confie l’étudiante en deuxième année à l’Institut d’études politiques de Strasbourg (67). Je compare mes semaines et elles se ressemblent toutes..."

Son sentiment est partagé par une grande partie de ses camarades, comme en témoigne une pétition lancée par les étudiants de l'université de Haute-Alsace (68)

, intitulée "Pour une considération des étudiant.e.s", qui a déjà recueilli 35.000 signatures. Ce mal-être a un impact sur la santé mentale des étudiants français. Une étude de la fédération des associations générales étudiantes (Fage), menée avec Ipsos en juin dernier, montrait que 23% d’entre eux ont eu des pensées suicidaires, tandis que 73% se sont dit affectés sur le plan psychologique. L’actualité est venue cruellement illustrer ces chiffres la semaine passée, avec le suicide de deux étudiants, à Lyon-3 (69) et à la Sorbonne (75).

Des consultations remboursées au BAPU

Pour les étudiants en situation de détresse psychologique à la recherche de soutien, des solutions sont tout de même proposées au sein de chaque université. Toutes possèdent un service de santé universitaire (SSU). Les consultations y sont gratuites sur présentation de la carte étudiante et les médecins sont habilités à répondre aux premières questions sur la santé mentale. Les villes les mieux loties disposent aussi d’un bureau d’aide psychologique universitaire (BAPU), chargés d’apporter un soutien aux étudiants qui le demandent, et dont les consultations sont remboursées par la sécurité sociale.

À l’heure actuelle, il existe 17 BAPU en France. Dans cette période trouble, ils croulent sous les demandes, "30% plus nombreuses" qu’à l’accoutumée selon Laurence Charmont-Parent, médecin coordinateur au BAPU de Clermont-Ferrand (63). "On ressent beaucoup de détresse, d’isolement, un très grand risque de décrochage, déplore-t-elle. On essaie de trouver des solutions pour que les étudiants se sentent moins seuls."

Des numéro verts disponibles même la nuit

Hors service universitaire, des initiatives, publiques et gratuites, existent également. Les centres médico-psychologiques (CMP), ouverts à tous, offrent des consultations gratuites, parfois même en urgence. Plus spécifiquement tournés vers les étudiants, les points accueil écoute jeune, les Maisons des adolescents ou les Espaces santé jeunes proposent des soutiens réguliers, eux aussi gratuits, pour les visiteurs jusqu’à 25 ans.

Le gouvernement a aussi mis en place des relais pour faciliter le premier pas vers une consultation. Outre le numéro d’urgence médical classique, le 15, le fil santé jeunes (0 800 23 52 36) permet d’avoir un interlocuteur tous les jours entre 9h et 23h, tandis que la Nightline, un service d’écoute tenu par des étudiants bénévoles (par téléphone ou par tchat), reste ouverte de 21h à 2h30.

Des initiatives solidaires locales

L’autre difficulté majeure rencontrée par les étudiants est d’ordre financière. Si le gouvernement a mis en place une aide automatique de 150 euros pour les boursiers et les bénéficiaires d’APL en octobre, elle peine à répondre à tous les besoins. Fin novembre, 45.000 jeunes avaient reçu une aide d’urgence du Crous.

"Le coût de la vie pour les jeunes a encore augmenté cette année, de près de 3%, notamment avec les achats de masques et les loyers qui flambent… Les aides ponctuelles sont utiles, mais ne résolvent pas le problème sur le long terme", confie Maryam Pougetoux, vice-présidente de l’union nationale des étudiants de France (UNEF). Des aides numériques, décernées au cas par cas pour l’achat de matériel informatique, viennent parfois combler les manques. Localement, des distributions de paniers repas sur les campus, organisées par des associations comme la Banque Alimentaire ou le Secours populaire, existent aussi pour les plus démunis.

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