Décryptage

Et si on formait tous les étudiants aux enjeux du climat ?

Pour Luc Abbadie, professeur en écologie à Sorbonne Université, "les jeunes sont des alliés pour faire la transition écologique"
Pour Luc Abbadie, professeur en écologie à Sorbonne Université, "les jeunes sont des alliés pour faire la transition écologique" © Adobe Stock/cristinn
Par Thibaut Cojean, publié le 28 février 2022
5 min

Quelques jours avant la publication du rapport du Giec, ce lundi 28 février, sur les impacts du réchauffement climatique et les mesures d'adaptation, un autre rapport a été remis par le climatologue Jean Jouzel à la ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal. Sa proposition : former 100% des étudiants de bac+2 à la transition écologique d'ici cinq ans.

"Préparer tous les citoyens à la transition écologique (…) relève des missions de l'enseignement supérieur." Alors que le GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) publie ce lundi la deuxième partie de son sixième rapport, une équipe d'universitaires et d'étudiants français menée par le climatologue Jean Jouzel appellent à "former 100% des étudiants de bac+2" à la transition écologique "d'ici cinq ans".

Un tronc commun adapté à chaque formation

L'équipe de Jean Jouzel a remis un rapport à Frédérique Vidal, la ministre de l'Enseignement supérieur, le 16 février dernier. Son message principal est la fixation d'un objectif ambitieux dans la lutte contre le changement climatique : "Faire en sorte que chacun dispose des connaissances et des compétences à même de lui permettre d'agir pour la transition écologique en tant que citoyen et en tant que professionnel."

Pour cela, les auteurs du rapport estiment qu'un tronc commun traitant du climat et de la transition écologique doit être intégré à la totalité des formations de bac+2. "Aujourd'hui, aucun secteur d'activité peut se dire que la transition écologique n'est pas son affaire", estime Jean Jouzel, premier scientifique à avoir prouvé le lien entre le taux de CO2 dans l'atmosphère et le réchauffement climatique, en 1987.

Le but de cet enseignement ne sera pas de créer des spécialistes du climat, mais de "faire en sorte que les gens aient compris l'image globale de ce qui est en train de se passer pour pouvoir contribuer, ou au moins comprendre les enjeux de la transition écologique", développe Nicolas Graves. En dernière année de cursus ingénieur à l'École nationale des ponts et chaussées, ce représentant du collectif "Pour un réveil écologique" a fait partie des quatre étudiants à avoir travaillé bénévolement sur le rapport.
Le climatologue Jean Jouzel.
Le climatologue Jean Jouzel. © Jean Claude MOSCHETTI/REA

Faire comprendre aux étudiants l'urgence climatique

Il explique que donner à chacun les clés pour "comprendre l'extrême urgence" de la situation leur permettrait de "contribuer au sein de leur métier ou de leur entreprise". Concrètement, "ce socle commun va s'adapter à chaque formation : l'ensemble minimal à acquérir sera abordé sous la forme de compétences et de connaissances" propres à chaque secteur et chaque métier, détaille Nicolas Graves.

Ainsi, ce tronc commun ne sera par exemple pas le même pour les étudiants en BUT technologique que pour ceux en BTS dans les services. Il y aura toutefois une base en sciences du climat indispensable à la compréhension des enjeux, mais qui s'adaptera au niveau de chacun.

Pas de panique pour les derniers de la classe en SVT, "complexe ne veut pas dire compliqué", rassure Luc Abbadie, professeur en écologie à Sorbonne Université et co-auteur du rapport. "Ce sont des connaissances que tout le monde peut acquérir, confirme Jean Jouzel. On peut donner des notions simples et faciles à adapter au niveau des personnes qu'on a en face de nous."

Compter sur l'enthousiasme des jeunes

Cela ne se fera évidemment pas du jour au lendemain : le rapport prévoie la formation des enseignants et des futurs professeurs des écoles, des collèges et des lycées. Il appelle également au "renforcement" des équipes et des moyens de l'enseignement supérieur, notamment de l'université.

Si rien n'assure pour le moment que ces recommandations seront suivies, "ce rapport peut provoquer un engagement, une discussion", prédit Luc Abbadie. "Notre but est aussi de faire adhérer", souligne Jean Jouzel, qui applaudit par ailleurs les progrès observés dans les programmes du lycée. "Il y a une dizaine d'années, on n'en parlait pas du tout !"

Pour pousser l'enseignement supérieur à prendre en main ces questions climatiques, le climatologue compte beaucoup sur "l'enthousiasme des jeunes" comme Nicolas Graves. "Les jeunes sont des alliés pour faire cette transition, confirme Luc Abbadie. On doit faire en sorte de mieux les intégrer. D'ailleurs, c'est ce qu'ils demandent."

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