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"Comme pour une chanson, je voulais partager ces diverses émotions"

publié le 21 janvier 2008

4 min

Dans votre journal, vous confiez une part de votre histoire. Pourquoi avoir voulu le publier ?
"C'est vrai que j'y livre des moments très personnels, mais qui voisinent aussi avec des hallucinations, des rêves... Comme pour une chanson, je voulais partager ces diverses émotions, et je pense que les gens peuvent s'y retrouver facilement. Je voulais aussi que ce soit un bouquin du quotidien, facile à picorer, à lire dans les cabinets. Ce livre est en fait l'histoire d'une grande solitude, d'un être seul qui parle à un autre être seul."

Vous y évoquez cette opération au coeur que vous avez subie à huit ans. Quels souvenirs en gardez-vous ?
"Suite à l'opération, je suis resté trois jours en réanimation, trois jours de pur bonheur grâce aux drogues. Je suis nostalgique de ces paradis artificiels. J'ai plané à 20 milles pendant soixante-douze heures. Après l'hôpital, je suis allé dans le jardin de mes parents et j'ai retourné la terre sans raison. Aujourd'hui, je comprends mieux cette réaction. C'était une deuxième naissance."

Ado, vous faites croire à vos amis, entre autres, que votre père est "pétomane", qu'il peut chanter "la Marseillaise par le cul". Vous aimiez amuser la foule ?
"J'étais un enfant rêveur, un peu à côté de la plaque, mais pas triste. J'aimais me créer une vie fictionnelle, raconter des petites histoires à mes copains. Je me suis aperçu très vite que ça plaisait.  Je n'ai  donc jamais démenti tous ces propos."

Vous étiez très sportif à l'époque. Vous avez été sélectionné dans l'équipe départementale de basket-ball de Vendée...
"Le sport est une terre de réflexion très stimulante. J'appréciais beaucoup cet esprit de groupe. Je suis toujours à la recherche de cela. L'une de mes plus belles émotions cinématographiques est le film de Capra, La vie est belle, où tout le monde se met à construire quelque chose. L'action individuelle me provoque de l'indifférence."

Quelles études avez-vous suivies ?
"Après le bac, je me suis inscrit à la fac d'arts plastiques, à Rennes. J'allais en cours de temps en temps, sans chercher à avoir un papier. Je ne suis donc pas diplômé. Durant cette époque, j'ai surtout découvert, entre autres, Andy Warhol, qui a changé ma perception des choses : ce que je pensais être vrai s'est révélé éventuellement faux. Cela a été un grand bouleversement."

A l'adolescence, vous montez des groupes. Et un jour, vous achetez un magnétophone quatre pistes, et c'est le déclic...
"J'ai découvert qu'avec trois bouts de ficelle, je pouvais faire des chansons tout seul, dans ma chambre, construire des arrangements sans aucune méthode, sans aucun apprentissage. J'étais capable d'aller jusqu'au bout d'une idée sans avoir affaire à des professionnels. C'était une vraie révolution pour moi."

Vous avez multiplié les boulots : projectionniste, employé aux abattoirs de Saint-Fulgent... Vous en gardez de bons souvenirs ?
"J'ai beaucoup appris, et notamment aux abattoirs de Saint-Fulgent, avec ce rythme à la chaîne, rigoureux et permanent. J'improvisais avec les barquettes de poulet qui m'arrivaient : une bonne école de musique. Quand j'ai fait des chansons, c'était avec des boîtes à rythme qui évoquaient ce travail à la chaîne."

Vous avez fêté vos 39 ans. La quarantaine vous réussit-elle ?
"Je me sens beaucoup mieux qu'à 20 ans. Je commence à réunir les fils tout doucement , à créer du lien dans ma propre vie. Je suis surtout moins aveugle et sourd."