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Enquête

Non, les filles n’ont pas moins de capacité en mathématiques

C'est en classe de CP que les premiers écarts de niveaux en maths apparaissent.
C'est en classe de CP que les premiers écarts de niveaux en maths apparaissent. © Daniel / Adobe Stock
Par Charlotte Mauger, publié le 25 juin 2024
4 min

Si des études ont rapporté que dès le primaire, les filles ont de moins bons résultats en maths que les garçons, il est faux de dire qu'elles sont moins "faites" pour cette matière. En réalité, ce sont les biais de genre qui, très tôt, freinent leur réussite.

Les filles seraient-elles moins performantes en mathématiques que les garçons ? Plusieurs analyses du niveau scolaire en mathématiques indiquent qu’en CE1, en CM1 ou en seconde, les filles ont en moyenne de moins bons résultats que les garçons.

Mais comment expliquer ces écarts ?

Pas de différence biologique

Déjà, on peut rejeter immédiatement une première tentative d’explication : non, les filles ne sont pas biologiquement ou génétiquement moins bonnes en mathématiques.

Une simple et bonne raison à cela : à l’entrée en CP il n’y a aucun écart entre filles et garçons. "Si jamais les écarts de niveaux étaient innés, on s'attendrait à ce qu’ils soient présents dès le début du primaire", explique Thomas Breda, chercheur à l'École d'Économie de Paris, qui a travaillé sur ces enquêtes.

Autre preuve, des chercheurs ont montré que ce n'étaient pas les compétences des filles en maths qui limitaient leur réussite, mais tout simplement l’appellation "mathématiques".

Ils ont donné le même exercice à deux groupes de filles, sous le nom "exercice de géométrie" pour l'un et "exercice de dessin" pour l'autre. Résultat : quand l’exercice était pris pour du dessin, les filles le réussissaient mieux.

Entouré de stéréotypes de genre

L’explication est donc à chercher ailleurs, dans quelque chose de moins concret : les stéréotypes de genre, c'est-à-dire les idées reçues sur les capacités des filles et des garçons.

Sans qu’on s’en rende compte, notre vie quotidienne influence notre perception des choses. Prenons l’exemple des maths. Peu de femmes sont représentées dans le domaine, dans les manuels scolaires il y a plus de garçons que de filles, les jeux mobilisant la logique sont souvent rangés au rayon garçons.

Nos parents et professeurs ont eux-mêmes des stéréotypes qu’ils peuvent nous transmettre de manière inconsciente.

Peu à peu, l’idée fausse que les mathématiques sont pour les garçons infuse dans nos têtes.

Le CP, une classe avec beaucoup de changements

Or c’est en CP, justement, que les êtres humains commencent à intégrer ces représentations biaisées. "Des chercheurs ont demandé à des élèves de 5 puis de 6 ans de dessiner une personne intelligente. À 5 ans, les enfants dessinent autant des hommes que des femmes. À 6 ans, filles et garçons ont tendance à représenter plus d’hommes que de femmes", rapporte Joyce Sultan, chercheuse à l’Institut des politiques publiques.

Mais il se passe autre chose d’important en CP : les mathématiques deviennent une discipline bien identifiée, non plus comme en maternelle. "En même temps qu'on commence à se dire que ce sont des maths, l’idée que cette matière n'est pas faite pour les filles commence à influencer les élèves", ajoute Thomas Breda.

Voilà pourquoi c'est durant l'année de CP que les premiers écarts de niveaux apparaissent.

Les biais de genre affectent la confiance en soi

Il reste un point à éclaircir : pourquoi ces biais de genre affectent la réussite des élèves ? "Les stéréotypes influencent la capacité des enfants à mobiliser leur connaissance. Une fille qui a intégré l’idée que les filles sont moins bonnes en maths ne va pas utiliser ses compétences aussi bien pendant un exercice", répond Manuela Spinelli, chercheuse à l’Université Rennes 2.

Car la confiance est une clé pour mobiliser ses connaissances au mieux. "Et puis si des filles reçoivent des signaux comme quoi les mathématiques ne sont pas pour elles, elles risquent de moins s'investir dedans", complète Thomas Breda.

Moins de confiance et moins d’implication dans la matière, et voilà que des écarts apparaissent dans les notes.

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