Nathan, étudiant à Sciences po Lille : "En junior-entreprise, nous évoluons en situation réelle"
Si la majorité des juniors-entreprises se trouvent en école d'ingénieurs, les IEP aussi proposent aux étudiants de se frotter au monde du conseil pour mettre un pied dans la vie professionnelle. Nathan, président de la junior-entreprise de Sciences po Lille, nous raconte son expérience.
Pas de doute, Nathan, étudiant en M1 à Sciences po Lille (59) est un convaincu. Président de la junior-entreprise de l'IEP lillois depuis la rentrée dernière, c'est avec enthousiasme qu'il nous explique les atouts de ces structures présentes aussi à Sciences po Paris, Rennes, Bordeaux, Toulouse et Lyon.
Les junior-entreprises, des associations bien rôdées
Petit rappel : une junior-entreprise est une structure bien définie, avec un cadre réglementé. Au sein d'un établissement d'enseignement supérieur, l'association fonctionne comme une mini-entreprise et propose des prestations à des clients. En 2021, 200 structures se répartissaient à 57% dans les écoles d'ingénieurs, 17% dans les écoles de commerce, 16% à l'université et 10% en écoles spécialisées, dont les IEP.
"À l'IEP de Lille, nous avons des compétences un peu moins classiques, en lien avec les enseignements de l'école. Nous proposons quatre prestations : enquête sociologique et citoyenne, rapport d’expertise et de synthèse, analyse stratégique et de la communication", explique l'étudiant en double master management responsable des entreprises de Sciences po Lille et gouvernance européenne et internationale à la Westfälische Wilhelms-Universität de Münster (Allemagne).
Et les 23 membres actifs, organisés en différents pôles, font bien fonctionner la machine. Après la prospection de clients, le devis et la validation du projet, la junior-entreprise publie des annonces sur les réseaux sociaux, auxquelles les étudiants – surtout en 1re et 2e années – postulent.
"Les junior-entreprises veulent faire monter en compétences les étudiants"
Les candidats retenus participent au projet dans un cadre professionnel : avec un objectif, des délais, des exigences du client et… un salaire. "Les junior-entreprises veulent faire monter en compétences les étudiants, en appliquant leurs cours. Un lycéen qui souhaite se lancer dans une école "théorique" doit savoir qu'il y a cette possibilité de mise en pratique. Renseignez-vous !" lance Nathan.
À Sciences po Lille, la majorité des clients sont des structures publiques comme le ministère des Sports, la région Hauts de France, la métropole d'Amiens ou le Louvre-Lens… Un exemple de mission ? Pour le Palais des Beaux-Arts de Lille, la junior entreprise de l'IEP a organisé un workshop sur le thème de l'inclusion dans les musées. Il sera suivi de la rédaction d'un rapport de près de 60 pages.
Une mini-entreprise
Fondée en 2008, la junior-entreprise affiche un joli bilan et bat son record de chiffre d'affaires en 2021 avec 50.000 euros. Cette année, une dizaine de missions ont été menées. Elles peuvent durer quelques jours ou s'étaler sur plusieurs mandats.
"Nos camarades nous perçoivent parfois comme des capitalistes. Mais l'association n'a pas pour but de faire des profits. Au contraire, on se met au service des étudiants en leur permettant d'avoir des missions intéressantes en lien avec leur projet professionnel, en gagnant jusqu'à un smic net [soit 1.353 euros, NDLR] pour 15 jours", précise le président qui rappelle que les membres actifs, eux, sont bénévoles.
Un engagement qui demande de l'implication et du temps
L'engagement de Nathan lui prend en moyenne 35 à 40 heures par semaine. "Pour un responsable de pôle, c'est autour de 25 heures", ajoute-t-il.
Sans oublier les cours … "Il faut de la discipline. Ce n'est pas fait pour tout le monde. Par exemple, je dois rendre un mémoire en mai. Eh bien, je l'ai fini début mars, car je sais que l'activité de la junior-entreprise s'intensifie en avril. Et si je dois manquer un cours, je dialogue avec l'IEP."
Nathan a de ce fait un agenda de ministre. "Je participe à des rendez-vous avec des clients, je mène des négociations, mais je dois aussi élaborer et conduire une stratégie. Ce poste est complet : on est dans l'opérationnel et dans la prise de recul."
"Cette expérience me plait beaucoup : les horizons s'élargissent. On met les pieds là où un "simple" étudiant ne peut pas aller. Et, au sein d'une junior-entreprise, les fonctions sont variées : RH, communication, comptabilité… Cela permet de confirmer une orientation professionnelle."
Une expérience appréciée des entreprises
Et cette expérience est un vrai atout pour les étudiants. "Nous évoluons en situation réelle, ce qui nous rend plus serein pour notre insertion. Car on gagne beaucoup : montée en compétences, expérience valorisable et création d'un réseau", explique Nathan.
Un engagement payant. "Lors de ma recherche de stages pour cet été, cela a fait la différence. J'ai reçu des propositions d'embauche à des postes intéressants alors que je ne serai diplômé que dans deux ans !"
À la rentrée prochaine, Nathan retourne étudier en Allemagne. Il devra passer la main. Pour une junior-entreprise, "c'est un enjeu crucial". Imaginez ! Ce serait un peu comme si une PME changeait de directeur et d'équipe chaque année. En mars, le processus de "RFP" (recrutement-formation-passation) entame donc sa première phase. Avis aux amateurs…