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Plus de 80% des internes continuent de travailler plus de 48 heures par semaine

Plus de 80% des internes dépassent en effet le temps de travail hebdomadaire maximum autorisé, soit 48 heures par semaine.
Plus de 80% des internes dépassent en effet le temps de travail hebdomadaire maximum autorisé, soit 48 heures par semaine. © joyfotoliakid /Adobe Stock
Par Pauline Bluteau, publié le 11 mars 2024
1 min

Les enquêtes sur le temps de travail des internes se suivent… et se ressemblent. Plus de 80% des internes en médecine, pharmacie et odontologie travailleraient plus de 48 heures par semaine. D'après les chiffres publiés par les fédérations étudiantes, les spécialités chirurgicales sont les plus chronophages. Seul point positif : le repos de sécurité semble mieux respecté qu'avant.

Le constat est bien connu mais reste toujours aussi alarmant. Plus de 80% des internes dépassent en effet le temps de travail hebdomadaire maximum autorisé, soit 48 heures par semaine. C'est ce qu'affirment les quatre syndicats d'internes en médecine, pharmacie et odontologie dans leur enquête conjointe publiée le 1er mars*.

Si les chiffres précédemment diffusés pouvaient éventuellement être biaisés par le Covid-19, il n'en est rien : "Il faut se rendre à l'évidence, crise sanitaire ou non : les hôpitaux mettent les internes en situation de dépassement du temps de travail", martèlent les représentants étudiants.

Pendant l'internat, 59 heures de travail par semaine

En réalité, les internes ne semblent pas compter leurs heures. Au total, ils affirment travailler en moyenne 59 heures par semaine. Mais pour 10% d'entre eux, c'est bien plus : le temps de travail dépasserait même les 80 heures hebdomadaires.

"Affligeant", selon les syndicats d'internes qui avaient pourtant déjà porté plainte contre 28 CHU pour non-respect du temps de travail en novembre 2022.

Et il y a tout juste un an, un décret était publié "pour renforcer le contrôle" et pénaliser financièrement les hôpitaux. Des avancées qui n'ont "pas d'impacts significatifs" à l'heure actuelle, souligne le président de l'ISNI (InterSyndicale nationale des internes), Guillaume Bailly. Les médiations sont encore en cours et avancent lentement.

Du non-stop dans les spécialités chirurgicales

Et les chiffres révèlent aussi une hétérogénéité selon les disciplines. Si la plupart des spécialités dites médicales tournent déjà autour de 58 heures par semaine, on passe de 50 heures hebdomadaires pour les futurs médecins généralistes (spécialité qui compte le plus grand nombre d'internes) à 75 heures par semaine en moyenne pour les spécialités chirurgicales.

"Cet état des lieux permet de montrer que seulement trois spécialités peuvent dire que leur temps de travail est respecté" : il s'agit de la médecine et santé au travail, la médecine nucléaire et la santé publique.

Du temps passé à l'hôpital mais pas toujours auprès des patients

"Mais ce qui m'a le plus interpellé, c'est de voir que ce sont les tâches extra-médicales qui alourdissent le plus le quotidien des internes", admet Guillaume Bailly. À côté des patients, les internes passent 41% de leur journée à tenir "les dossiers médicaux des patients, rédiger des courriers, prendre des rendez-vous et organiser la sortie, récupérer des documents, enregistrer les prélèvements, etc.".

"On travaille corps et âme mais ce qui change c'est que l'on n'accepte pas de travailler pour autre chose que de la médecine. Les internes ne se retrouvent plus dans le métier qu'ils ont choisi", analyse le président de l'ISNI. Selon lui, cette donnée pourrait être un "levier" important pour changer la donne puisque des "outils existent pour alléger le quotidien".

Le repos de sécurité respecté mais des gardes toujours trop longues

Seule avancée : le respect du repos de sécurité. Après leur garde, les internes ont le droit à un "repos de 11 heures suivant la fin de leur travail de nuit". Obligatoire depuis 2002, ce repos semble commencer à réellement s'appliquer. Selon l'enquête, 84% des internes déclarent en bénéficier systématiquement. Pour 6% des internes encore, ce repos de sécurité n'est que parfois voire jamais respecté.

Mais en plus des repos de sécurité, pris immédiatement, les internes ont droit à des repos compensateurs. Il s'agit d'une récupération de leur temps de travail lorsqu'ils cumulent plus de huit demi-journées de travail par semaine. Or, ce planning doit être enregistré dans un tableau de service pointant le temps de travail des internes. Cependant, la moitié des répondants à l'enquête n'en a jamais vu la couleur. Aussi, 57% des internes affirment ne jamais prendre leur repos compensateur au cours du trimestre.

Autre point de vigilance, la durée des gardes. "Le travail de 24 heures consécutives doit cesser, afin de sécuriser les internes et les patients. Nous demandons la possibilité pour chaque interne, de pouvoir prendre une demi-journée de repos pré-garde, avant la réalisation d’un travail de nuit", revendiquent les représentants des internes. Il reste encore du chemin donc.

*L'enquête a été réalisée par le SNIO (syndicat national des internes en odontologie), la FNSIP-BM (fédération nationale des syndicats d'internes en pharmacie et biologie médicale), l'ISNAR-IMG (Intersyndicale nationale autonome représentative des internes en médecine générale) et l'ISNI (Intersyndicale nationale des internes).

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