Reportage

Ecologie : une jeunesse volontaire mais en demande d'accompagnement

Lors du CNR organisé lundi 23 janvier 2023, jeunes et membres du gouvernement ont pu échanger autour des sujets liés à l'écologie.
Lors du CNR organisé lundi 23 janvier 2023, jeunes et membres du gouvernement ont pu échanger autour des sujets liés à l'écologie. © Thibaut Cojean
Par Thibaut Cojean, publié le 25 janvier 2023
7 min

Formation, engagement, services publics... Lors du CNR jeunesse consacré à l'écologie organisé ce lundi 23 janvier, les propositions des jeunes ont été accueillies chaudement par les ministres présents, mais se sont heurtées à une vision différente des efforts à faire.

Les échanges duraient depuis 45 minutes lorsque Bertrand, 30 ans, a demandé à se lever. "La jeunesse est déjà debout", a-t-il justifié. Mais "cette jeunesse a besoin que vous la souteniez, de manière fréquente et répétée", a ensuite insisté le jeune homme à l'attention de la Première ministre.

Avec Elisabeth Borne, cinq ministres assistaient, lundi 23 janvier 2023, à cette réunion du CNR (conseil national de la refondation) consacrée à la jeunesse et à l'écologie : Pap Ndiaye (Éducation nationale), Sarah El Haïry (Jeunesse), Sylvie Retailleau (Enseignement supérieur), Christophe Béchu (Transition écologique) et Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique).

L'intervention de Bertrand, très applaudie, trahissait la crainte de la quarantaine de jeunes présents ce soir-là : celle de ne pas être entendus. Car si les propositions concrètes n'ont pas manqué, ce que les jeunes ont réellement demandé au gouvernement, c'est un accompagnement dans leur engagement face au changement climatique.

"Donner aux jeunes les moyens de rêver"

Lutter contre l'éco-anxiété passe notamment par l'action. Mais les graphiques de Pour un réveil écologique ont montré qu'une une grande partie de la jeunesse souhaite s'engager sans savoir comment.

"C'est important de donner aux jeunes les moyens de rêver", souligne Maud, entrepreneuse qui a créé la banque responsable Green-Got. Si cette proposition vise notamment la communication (publicités, culture, influenceurs), créer un "récit national" permettant de rendre la transition écologique "désirable" passera également par des mesures concrètes.

Des propositions concrètes pour agir formulées par les jeunes

Invités par le gouvernement en raison de leur engagement ou de leurs actions, les jeunes n'ont pas manqué de propositions. En plus de la formation aux enjeux de la transition écologique, citée à presque toutes les interventions, la mise en place d'un chèque alimentation et la rénovation énergétique des universités ont aussi été demandées plusieurs fois.

Ryan, en terminale, voudrait "mettre les lycées en lien avec des associations" pour que les actions des éco-délégués ne soient pas isolées à l'échelle d'un établissement. Yann, étudiant en BTS, aimerait quant à lui valoriser les métiers verts peu connus tandis que Marie-Julie, infirmière de 23 ans, veut "mettre fin à la fermeture des lycées pros". Feris, 20 ans, propose de créer un "Toefl de l'écologie" pour permettre aux jeunes déscolarisés de se former.

Au niveau des services, Yoa, 23 ans, imagine une plateforme en ligne pour informer les jeunes sur leurs droits. Son amie Charlotte ose même demander des billets de train gratuits.

De quoi contenter Elisabeth Borne, qui rappelait en préambule l'objectif du CNR : "Bâtir une feuille de route pour la jeunesse, avec des mesures très concrètes et un impact rapide sur la vie quotidienne". Si les conclusions des rencontres ne seront rendues qu'au printemps, la Première ministre a promis de retenir plusieurs propositions dans sa réflexion.

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Les participants au CNR avec la Première ministre Elisabeth Borne, les ministres de l'Éducation nationale, Pap Ndiaye, de l'Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, de la Transition écologique Christophe Béchu, et la secrétaire d'État chargée de la Jeunesse, Sara El Haïry. / ©Thibaut Cojean.

Le chantier de la formation à la transition écologique engagé

Les ministres présents ont profité des échanges pour promouvoir leurs actions. Sylvie Retailleau a confirmé que tous les étudiants de premier cycle (jusqu'à bac+3) seront formés à la transition écologique d'ici 2025, et que les ateliers pour mettre en place ce projet sont lancés.

Pap Ndiaye a lui rappelé que les programmes du scolaire sont en cours de révision afin de leur donner "une vision plus globale et structurée" des enjeux de climat et de biodiversité. Il a également annoncé vouloir mettre en avant le statut d'éco-délégué, déjà assumé par 250.000 élèves.

Gouvernement, jeunesse : deux visions différentes de l'avenir

Les jeunes restent cependant sur leur faim. Car si la mise en place d'un récit national a grandement séduit les membres du gouvernement, et si Elisabeth Borne a assuré aux jeunes qu'ils seront "associés" à ce travail, la vision à donner à ce récit diffère.

"Décroissance, sobriété, ce sont des mots qu'on devrait entendre", a ainsi lancé Violette. De son côté, la Première ministre assume une "divergence sur la décroissance" et vise "une société neutre en carbone, respectueuse du vivant et qui préserve notre système social".

Autre point de divergence : alors que les jeunes ont tous montré une vision systémique et globale des enjeux, laissant de côté les comportements individuels, Elisabeth Borne a valorisé dans sa conclusion les "petits gestes" qui "peuvent permettre de faire des bonds considérables".

L'"écoterrorisme", symbole des divisions

Enfin, un dernier point de rupture a été soulevé par Soliane, 24 ans, qui estime contradictoire de "valoriser" l'engagement d'un côté et de le "criminaliser" de l'autre. Elle a dénoncé l'utilisation par le gouvernement du terme 'écoterrorisme', qui vise, selon elle, "à faire passer les militants pour des gens dangereux".

La référence à Gérald Darmanin, absent, a valu une courte réponse de la Première ministre. Signe que les discussions ne sont peut-être pas si ouvertes qu'annoncées, elle a pris la défense de son ministre de l'Intérieur. La seule intervention de la soirée à ne pas avoir été ponctuée d'applaudissements.

CNR jeunesse : trois autres rencontres prévues

Le CNR jeunesse a été lancé en décembre 2022. À l'issue de la première rencontre, quatre thématiques ont été dégagées et feront l'objet des prochaines réunions. En plus de l'écologie, les jeunes échangeront autour de la vie quotidienne, de l'avenir professionnel et de l'engagement citoyen.

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