Témoignage

"Nous, on veut pouvoir vivre de notre métier" : des lycéens agricoles réagissent à la mobilisation des agriculteurs

Erine, élève en STAV au lycée agricole de Blanquefort.
Erine, élève en STAV au lycée agricole de Blanquefort. © Photo fournie par le témoin
Par Raphaëlle Orenbuch, publié le 14 février 2024
1 min

Alors que la mobilisation des dernières semaines a mis sur le devant de la scène les défis qui se présentent au monde agricole, quatre élèves en lycée agricole reviennent sur leurs inquiétudes, leurs attentes et leurs espoirs en l’avenir.

Ils n’ont pas encore 20 ans et sont tous les quatre élèves en lycée agricole. Erine, Laura, Corentin et Eliot ont suivi de près les mobilisations des agriculteurs français en ce début 2024.

Comment les futurs agriculteurs perçoivent-ils cette crise ? Comment envisagent-ils leur avenir ? L’Etudiant leur a posé la question.

Des lycéens et déjà concernés par les mobilisations...

Dans le lycée Hector Serres de Dax (40), les lycéens ont organisé un blocage en soutien aux manifestants. "On a mobilisé une grande partie du lycée sur toute une journée", raconte Corentin, lycéen en STAV (sciences et technologies de l’agronomie et du vivant) dans cet établissement des Landes. "C’est notre avenir et ce n’est pas toujours évident de savoir où l’on va."

Erine, élève en STAV au lycée agricole de Blanquefort (33), partage ces inquiétudes. "Ma mère est éleveuse bovine et maraichère donc forcément, je me suis sentie concernée par les mobilisations", explique-t-elle.

... Et en quête de meilleures conditions de travail

Pour la jeune femme de 17 ans, pas question de s’installer dans les mêmes conditions que sa mère, qui "se rémunère seulement 1.000 euros tous les quatre mois".

Erine espère réussir à vivre correctement de son métier et ne pas dépendre de son conjoint pour gagner sa vie. Pour elle, il faudrait "simplifier les démarches administratives et mieux rémunérer les agriculteurs qui, aujourd’hui, survivent grâce aux aides".

Corentin, lui aussi fils d’agriculteurs, a peur de ne pas pouvoir travailler comme il l’entend. "Les normes sont très strictes et très coûteuses, c’est impossible à respecter dans les petites exploitations", explique-t-il.

Eliot, 19 ans, étudiant en BTS agronomie et production végétale au lycée agricole Hector Serres, aimerait lui aussi "un assouplissement des normes sur les produits phytosanitaires, mais aussi sur l’abattage ou le curage des fossés". Ses deux grands-pères étaient agriculteurs et Eliot ambitionne de reprendre une petite exploitation pour devenir lui-même agriculteur à temps plein.

Eliot, étudiant en BTS agronomie et production végétale au lycée agricole Hector Serres.
Eliot, étudiant en BTS agronomie et production végétale au lycée agricole Hector Serres. © Photo fournie par le témoin

Des annonces qui ont du mal à convaincre

"Le problème, c'est que les personnes qui imaginent les normes ne sont pas sur le terrain, développe le jeune Landais, et ce sont surtout les petits agriculteurs qui en payent le prix."

Les récentes annonces du Premier ministre, Gabriel Attal, pour répondre aux revendications des agriculteurs ont du mal à convaincre. Sur la rémunération et la revalorisation du statut, les lycéens sont sceptiques. "On attend de voir ce qu’ils vont mettre en place, comment cet argent va être redistribué concrètement", analyse Corentin.

"Nous, on veut pouvoir vivre de notre métier, on veut une bonne rémunération. "Il faut faire de l’agriculture durable, oui, mais aussi avec des revenus durables !" martèle Eliot.

Pour Erine, dont la mère travaille en agriculture biologique, "on devrait plutôt désubventionner l’élevage intensif et subventionner le maraîchage". Quant aux mesures sur les pesticides, la jeune lycéenne est formelle : "Il ne faut pas de retour en arrière et ne surtout pas les réautoriser !"

Vers une agriculture plus résiliente

Conscients des enjeux qui les attendent, les futurs agriculteurs croient tous en un modèle plus respectueux de l’environnement. Et tous se disent bien accompagnés par leurs professeurs pour mieux saisir les défis du métier.

"Au lycée, on apprend par exemple la rotation des cultures et ses bénéfices. Les profs nous apprennent à pratiquer une agriculture plus résiliente", témoigne Laura, en terminale au lycée agricole de Blanquefort (33).

Pour Eliot, "le lycée agricole permet aussi de développer l’esprit critique et l’entraide entre jeunes attachés à la terre". Pour encourager une agriculture plus vertueuse, Erine croit en l’importance d’une prise de conscience chez les consommateurs. "À notre niveau, on ne peut pas faire grand-chose pour améliorer la situation, la démarche doit venir du consommateur", développe la lycéenne.

Eliot se dit confiant en l’avenir car "80% des Français nous soutiennent". Et Corentin de conclure : "On sait très bien que sans agriculteurs, il n’y a pas de vie, pour moi, c'est un devoir de continuer à exercer ce métier passion".

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