Portrait

Métiers du sport : “Mon parcours de monitrice d'équitation”

Sarah, monitrice d'équitation // © Thomas Louapre/Divergence pour l'Etudiant
Passionnée d'équitation depuis l'enfance, Sarah a tout mis en œuvre pour en faire son métier. © Thomas Louapre/Divergence pour l'Etudiant
Par Dominique Perez, publié le 15 septembre 2015
7 min

Sarah a déjà à son actif un beau palmarès dans le monde de la compétition équestre. À 21 ans, elle a franchi tous les obstacles pour vivre de sa passion et l’enseigner.

Dans la maison de ses parents, à Château-Thébaud (44), au cœur du vignoble nantais, Sarah s'offre une courte pause entre les entraînements, les champs de course et son activité de monitrice d'équitation, qu'elle exerce à temps plein depuis 1 an dans un club équestre à Saint-Sébastien-sur-Loire (44). Derrière la sérénité et le sourire de la jeune femme de 21 ans, on sent une détermination sans faille, qui lui a permis d'aller au bout, toute jeune, d'une vocation professionnelle chevillée au corps.

"J'ai commencé l'équitation à 10 ans"

La source de cette assurance est à chercher pas loin dans le temps, environ 7 ans auparavant, quand elle a dû surmonter une dure épreuve. À 14 ans, on annonce à la jeune fille et à ses parents, avec une brutalité qui l'a marquée, qu'elle est atteinte d'un cancer : "On m'a dit que je n'avais plus beaucoup de temps à vivre, que c'était incurable."

Sans s'attarder sur l'énorme choc auquel elle a dû faire face, Sarah passe vite à la suite, en racontant comment elle est remontée en selle pour aller au bout de son rêve. En raison de sa maladie, elle doit rester chez elle, mais s'accroche, poursuivant sa scolarité tant bien que mal, trouvant des alliés parmi ses professeurs. "Ils sont venus me donner des cours à la maison, et j'ai pu ainsi obtenir mon brevet, c'était vraiment sympa, ils n'étaient pas obligés..."

Ensuite, pendant 2 ans, elle prend des cours par correspondance et câline le poney qu'on aperçoit toujours dans le jardin de ses parents, "une aide précieuse"», reconnaît-elle.

Depuis toute petite, sans être née dans un univers équin, qui aurait pu expliquer cette vocation, Sarah a en effet la passion du cheval : "J'ai commencé à faire de l'équitation sur poney à 10 ans, mais je ne brillais pas spécialement. C'est quand je suis passée au cheval que j'ai commencé à avoir des résultats." 10 ans, c'était assez tard pour une cavalière aujourd'hui professionnelle. "Mes parents avaient un peu peur, mais j'étais déjà sportive, je pratiquais plein d'autres sports, comme le patinage."

Elle commence pourtant la compétition vers 12 ans, à double poney (grand poney), avec ce qu'elle définit alors comme un handicap : "Ma principale difficulté était le stress." Un stress toujours présent, mais qu'elle a su dompter. Elle prépare ainsi à la course Quasual de Puychety, le cheval que ses parents lui offrent "à la rémission du cancer", sourit-elle.

"Je voulais avant tout être dehors, avec les chevaux"

Ce cheval va l'accompagner dans la suite de son parcours, qu'elle scinde en deux : "Dans ma vie, il y a eu un avant et un après", analyse-t-elle aujourd'hui. Elle ne lâche pas sa scolarité "classique" immédiatement et s'engage même dans une première S au lycée La Herdrie, à Basse-Goulaine (44). Mais elle regarde ailleurs, comprenant que sa vision de l'avenir ne s'accordera pas avec le cursus auquel elle aurait pu prétendre. C'est-à-dire "entrer dans un bon lycée nantais", et tenter l'école vétérinaire.

"J'ai 'basculé' en filière technologique, pour des raisons sportives, et me suis inscrite en première STG (actuelle STMG, sciences et technologies du management et de la gestion), dans le même lycée... Cela me semblait presque futile de viser des études longues alors que mon désir était d'être dehors, avec les chevaux, et de transmettre cette passion aux autres." Et puis, elle n'avait plus vraiment le temps de se consacrer à ses études... car elle progressait dans la compétition, domptant son stress.

"J'ai postulé à Saumur, mais je n'ai pas été prise"

En 2012, Sarah est sélectionnée comme "réserviste" aux championnats d'Europe juniors d'équitation puis, en 2013, aux championnats d'Europe jeunes cavaliers. "Malheureusement, je n'ai pas pu concourir, Quasual s'était blessé juste avant l'épreuve..."

La même année, elle obtient une dixième place au concours complet international de Bazoges-en-Pareds (85). C'est l'année du bac, mais Sarah décide de prendre définitivement le virage qui lui permettra de poursuivre l'entraînement et surtout de transmettre sa pratique...

Il lui faut un diplôme : elle choisit le BPJEPS (brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport) équitation et postule à la prestigieuse École nationale d'équitation de Saumur (49) : "Ils prenaient 3 candidats, j'étais la quatrième... et personne ne s'est désisté !"

C'est alors qu'elle se tourne vers France Cheval Formation à Bouguenais (44) pour passer les épreuves de sélection du BPJEPS... "J'ai retenu ce cursus parce qu'il correspondait à ma volonté d'enseigner, de transmettre et d'échanger avec un public assez large. La France est l'un des derniers pays où il faut être diplômé pour pouvoir enseigner. Il y a aussi des certificats de qualification professionnelle, plus spécialisés, notamment pour travailler en animation avec des jeunes enfants, mais cela me convenait moins."

"J'ai travaillé avec des enfants qui ont des troubles sévères du comportement"

Son futur métier, Sarah s'y est préparée pendant sa formation, qu'elle a suivie en alternance durant 11 mois, à raison de 710 heures de formation en centre et 812 heures en entreprise. Elle a ainsi travaillé aux Écuries du Clos, un centre équestre à Bouguenais (44), avec un tuteur, et a découvert la réalité du métier.

"Le tuteur nous laissait mener des cours, en nous encadrant. On préparait avec lui, en moyenne, 5 cours par semaine. C'était intéressant de diversifier les publics." Ce travail lui offre ainsi la possibilité d'aider des publics handicapés, une voie qu'elle envisage peut-être de creuser par la suite. "Le métier d'éducatrice spécialisée m'intéresse aussi : avec l'équitation, on a les moyens de voir les personnes progresser. J'ai travaillé avec des enfants qui ont des troubles sévères du comportement ; j'y ai pris beaucoup de plaisir."

Elle obtient son BPJEPS en 2014 et enchaîne avec le DEJEPS (diplôme d'État de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport), dans le même centre équestre, tout en commençant à chercher un emploi. Démarche pas forcément aisée dans un milieu dans lequel les filles doivent encore faire leur place.

"S'occuper des chevaux, même quand on enseigne l'équitation, c'est aussi nettoyer les boxes, conduire des engins agricoles, des tâches que certains dirigeants de club sont réticents à confier aux femmes. Cela évolue, mais reste encore un obstacle."

Sarah doit encore passer 4 épreuves avant de valider son DEJEPS. Elle va ainsi pouvoir mettre en œuvre professionnellement ce qu'elle a commencé à faire pendant sa formation : accompagner des "couples" homme ou femme et cheval pour les préparer notamment aux concours amateurs, mais aussi se perfectionner dans l'organisation d'épreuves tout en continuant, bien sûr, à "sortir" en compétition : en parallèle de l'enseignement, Sarah prépare son cheval pour les concours auxquels ils participent tous les deux.

Les diplômes d'équitation
Le BPJEPS (brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport), niveau bac, proposé par le ministère de la Jeunesse et des Sports, prépare aux métiers d'animateur dans une quinzaine de spécialités. La formation peut se préparer par la voie initiale ou continue, ou en alternance et permet d'obtenir l'équivalent d'un bac professionnel.

Le DEJEPS (diplôme d'État de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport), niveau bac+2, permet de se former au métier d'animateur coordonnateur responsable de structure (centre socioculturel, hospitalier, associations...) ou d'entraîneur sportif dans la spécialité choisie.

Le parcours de Sarah en 5 dates
2006 - Début de la compétition à double poney.
2012 - Entre en première S au lycée La Herdrie, à Bouguenais ; change de filière pour une première STG (actuelle STMG).
2013 - Sélectionnée aux championnats d'Europe jeunes cavaliers.
2014 - Prépare et obtient le BPJEPS.
2015 - Premier emploi d'animatrice dans un club. En attente de validation de son DEJEPS.

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