Interview

Philippe Scialom, psychologue et psychanalyste : “Il n’est jamais trop tard pour apprendre à se concentrer”

Philippe Scialom - concentration
Pour Philippe Scialom, "apprendre à se concentrer nécessite de mettre en place un cadre de travail dont on extrait ce qui divertit". © Photo fournie par le témoin
Par Isabelle Dautresme, mis à jour le 09 février 2016
3 min

Philippe Scialom est psychologue et psychanalyste. Il est l’auteur de “Psycho-Ados : lâchez-moi mais ne me laissez pas tomber (L’Archipel, 2005) et de Les difficultés scolaires ? Solutions au cas par cas (Hachette 2011). À l'écouter, souffrir d'un manque de concentration n'est pas une fatalité. Être attentif, cela s'apprend !

Constatez-vous une augmentation des difficultés de concentration chez les collégiens ?

"On assiste à une forte augmentation de ce type de problèmes chez les jeunes aujourd'hui. Le phénomène s'est même accéléré au cours des cinq dernières années. C'est vrai à tous les âges, y compris chez les étudiants. Les causes sont multiples. Parmi elles, il y a évidemment la difficulté à limiter les écrans, notamment le soir. Or, ces derniers sont très excitants. Les adolescents s'endorment de plus en plus tard, manquent de sommeil ce qui a un effet immédiat sur leur concentration."

Quel est l'impact de ces nouvelles technologies sur les apprentissages scolaires ?

"Aujourd'hui, l'accès au savoir est immédiat. Les jeunes n'ont donc plus besoin de retenir les mêmes choses qu'avant. Conséquence : leur mémoire immédiate, celle mobilisée pour les devoirs, est nettement moins performante.

Autre problème, le travail scolaire s'inscrit dans un temps long, ce qui implique d'être en capacité de se concentrer plus de cinq minutes sur une seule et même tâche. Or, les nouvelles générations sont celles du zapping. Les jeunes passent sans cesse d'une activité à l'autre. Leur attention s'en trouve fragmentée ce qui rend difficile tout effort soutenu de concentration."

N'existe-t-il pas d'autres facteurs explicatifs aux difficultés de concentration des adolescents ?

"Au moment de la puberté, on assiste à une excitation psychique et corporelle couplée à une volonté de s'affirmer qui accentuent mécaniquement les difficultés de concentration. Celles-ci seront d'autant plus criantes au moment de l'adolescence que, depuis son plus jeune âge, l'enfant n'a pas vraiment appris à rester attentif et concentré. De plus, aujourd'hui, les adultes ont du mal à leur dire non, à leur fixer des limites."

Peut-on apprendre à se concentrer ?

couv Livre Philippe Scialom - concentration

"Bien sûr. Cela passe par des choses très simples, comme faire un planning, s'astreindre à travailler tous les soirs, écouter en classe, se forcer à lever la main une fois par cours, ce qui oblige à être attentif. En fait, apprendre à se concentrer nécessite de mettre en place un cadre de travail dont on extrait ce qui divertit : portable, ordinateur… Il faut également avoir à l'esprit que le plaisir vient après le travail et non l'inverse.

Tout ceci relève du bon sens mais ce message n'est plus suffisamment dit et expliqué par les parents et les professeurs."

Les parents peuvent-ils aider les adolescents à se concentrer ?

"Les parents peuvent aider leurs enfants à hiérarchiser les tâches. Les jeunes ont parfois l'impression que ce qu'on leur demande est monumental, cela les paralyse. Les parents sont là pour les guider mais surtout pas pour faire à leur place. Chaque adolescent doit trouver son propre cadre et sa propre organisation. Il faut l'amener à trouver celle qui lui convient le mieux."

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