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Accès en master : les candidats d'origine maghrébine davantage pénalisés dans leurs démarches

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discrimination master © peopleimages.com / Adobe Stock
Par Malika Butzbach, publié le 15 mars 2023
4 min

La demande d'information d'un candidat ayant un patronyme d'origine maghrébine reçoit moins de réponses que celle du candidat dont le nom a une consonance française. C'est ce que montre la deuxième étude sur les masters de l'Observatoire national des discriminations et de l'égalité dans le supérieur (Ondes). En revanche, il n'y a pas de différence du taux de réponse selon le genre.

C'est une étude qui "rend visible l'invisible, mais aussi l'impensable", estime Philippe Liotard, président de la commission permanente des chargés de mission égalité et diversité dans les universités. Jeudi 9 mars, l'Observatoire national des discriminations et de l'égalité dans le supérieur (Ondes) dévoilait sa deuxième enquête sur l'accès aux masters.

Les chercheurs ont effectué un testing sur plus de 2.000 masters dans 84 établissements du supérieur. Le constat est sans appel : les candidats avec un nom à consonance maghrébine ont moins de chances de recevoir une réponse à leur demande d'informations que les étudiants ayant un nom à consonance française.

Ces résultats viennent conforter ceux du premier volet de l'étude, menée en 2021 sur 600 masters, démontrant ainsi une discrimination "structurelle".

Un candidat d'origine nord-africaine a 11,2% de chances en moins d'obtenir une réponse

Pour cette campagne de testing, quatre e-mails de demande d'informations sur les modalités de candidature ont été envoyés à chaque responsable de master.

Le message est identique, seul le faux nom change : il y a Thomas Bernard et Valérie Leroy, étudiant et étudiante ayant un prénom et un nom à consonance française. Puis Mohamed Messaoudi et Rachida Saïdi, qui ont un prénom et un nom à consonance maghrébine. Valérie et Thomas obtiennent un taux de réponse de 68%, contre 61% et 60% pour Mohamed et Rachida.

"L'écart moyen absolu est de 7,7 points de pourcentage. Un niveau très proche de celui obtenu lors de la première vague de test où il était de 8,6 points", commente l'un des auteurs de l'étude, Yannick L'Horty, enseignant-chercheur en économie à l'université Gustave-Eiffel.

Pour ces candidats imaginaires avec un nom d'origine nord-africaine, cela représente 11,2% de chances en moins d'obtenir une réponse à leur mail.

Les masters attractifs sont les plus discriminants

Tous les masters ne sont pas touchés de la même manière : l'étude montre que la discrimination selon l'origine est particulièrement forte dans les domaines droit/économie/gestion et sciences/technologie/santé. Dans ces disciplines, Rachida Saïdi et Mohamed Messaoudi ont 15% de chance en moins d'avoir une réponse à leur mail.

Les masters les plus discriminants sont également les plus attractifs : ils comptabilisent 12 candidats pour une place (contre 9 dans les autres cursus) et présentent des capacités d'accueil plus réduite (en moyenne 30 places contre 38). Les masters juridiques et les masters en gestion apparaissent "les plus souvent discriminants".

Toutefois, il semble y avoir moins de variations dans la discrimination en fonction de la localisation de l'université, souligne l'étude. Les formations qui ignorent le plus fréquemment les mails des étudiants d'origine maghrébine sont celles offrant "des débouchés professionnels de meilleure qualité", observe Yannick L'Horty.

De fait, "les candidats discriminés doivent produire plus d'efforts pour atteindre des masters de qualité, ce qui signifie que le rendement de leur investissement éducatif est pénalisé par leur origine", regrette l'économiste.

Pas de différence significative entre les genres

Contrairement au premier volet, cette deuxième étude inclut un critère de genre. "Alors que les femmes sont sur-représentées dans certaines filières, notamment les domaines de SHS, langues et lettres, nous voulions vérifier l'hypothèse d'une sélection par le genre au niveau des masters, explique l'économiste Yannick L'Horty. Ce n'est pas le cas : le taux de réponse entre les femmes et les hommes n'étant pas significatif."

L'inégale répartition des étudiants et des étudiantes au sein des différents cursus ne peut s'expliquer par les comportements de sélection des responsables de formation eux-mêmes.

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