Reportage

A Strasbourg, les étudiants européens repensent l’Europe

Réunis à Strasbourg, 275 jeunes, venant de toute l'Europe, ont donné leurs propositions au députés européens.
Réunis à Strasbourg, 275 jeunes, venant de toute l'Europe, ont donné leurs propositions au députés européens. © Paul-Adrien Montacié
Par Paul-Adrien Montacié, publié le 11 mars 2022
6 min

Le vendredi 4 mars 2022 se tenait au Palais universitaire de Strasbourg l’assemblée des étudiants européens. Le but de la journée ? Proposer au Parlement européen des axes de réflexion sur dix thèmes comme l’économie, l’agriculture ou même la cybersécurité. L'aboutissement de plusieurs mois de travail que n'a pas éclipsés la guerre en Ukraine.

L’ambiance est studieuse, ce vendredi 4 mars, entre les colonnes du Palais universitaire de Strasbourg. L’assemblée, composée de 275 étudiants venus de toute l'Union européenne, est réunie pour proposer au Parlement européen des propositions sur dix sujets politiques, allant de l’économie à la cybersécurité.

Un évènement préparé avec sérieux par les participants : "Cela fait des mois que nous sommes dessus, ce n’est pas à prendre à la légère", confie une étudiante allemande lors de la collation, où des jeunes de toutes nationalités se mélangent et se rencontrent. "Nous savons que nous serons entendus", complète un de ses camarades entre deux gorgées de café.

Faire entendre la voix des étudiants européens

La table ronde s’ouvre avec une question : "Comment répondre au besoin de démocratie participative ?", interroge Jean-Paul Jacqué, professeur à l’Université de Strasbourg et membre du Conseil de l’Europe. Il y répond lui-même : "Ce doit être le début d’une participation des citoyens à l’Europe, une réflexion de démocratie participative. Nous connaissons les critiques adressées au fonctionnement de l’Europe, à vous de montrer la voie."

Giulia, étudiante italienne en affaires européennes pour le numérique, coordonne le groupe de propositions sur la cybersécurité. Comme les autres, elle s'est portée volontaire pour prendre part à cette réflexion. "Nous allons soumettre à la fin de la journée un rapport d’environ vingt pages au Parlement européen, qui étudiera nos propositions", explique-t-elle.

Cela ne se fera évidemment pas dans la journée : les étudiants étaient chargés de préparer leurs conclusions depuis plusieurs mois. "Nous avons contacté des experts et des professeurs pour fournir le meilleur travail possible, mais aussi des politiques", détaille Nils, étudiant français en école d’ingénieurs à Grenoble.

Des propositions "réalistes" pour faire avancer l'Europe

Le député européen Christophe Grudler suit les discussions. L’élu se félicite de l’opportunité que représente cette journée : "Il faut que les jeunes se saisissent de cette occasion." L'emploi du terme "jeunes" n'est pas anodin, comme le souligne Antonio Argenziano, étudiant italien et président des Jeunes fédéralistes européens. "Nous avons la chance d’être étudiants. Nous avons accès à ces débats, ce qui n’est pas le cas de jeunes actifs ou sans emploi. A nous de sortir de notre bulle et de tirer le meilleur parti de ce privilège !", affirme-t-il sous les applaudissements de la salle.

Mais selon lui, ce n'est pas suffisant. "Des idées, c’est bien, maintenant il faut du concret, lance le représentant fédéraliste. Soyez réalistes dans vos propositions. Pour être écoutées, vos idées doivent être applicables." C’est dans cette logique que les participants se sont saisis d’enjeux habituels, comme l’économie ou l’agriculture, mais aussi de problématiques plus contemporaines comme la cybersécurité.

En groupe de travail, chacun a détaillé le fruit de sa réflexion et de ses recherches pour aboutir à des propositions concrètes que détaille Giulia : "Nous avons travaillé sur la formation et la sensibilisation des étudiants aux questions de cybersécurité, et nous avons pensé à créer des structures en coopération européenne pour avoir des infrastructures solides qui puissent faire face aux soucis qui vont des réseaux sociaux au système bancaire." Un enjeu très actuel, au vu de la guerre en Ukraine. "Nous n’avons pas attendu cette crise pour travailler sur ces questions", affirme néanmoins Giulia avec le sourire.

L'Ukraine en toile de fond

Inévitablement, la crise ukrainienne est un sujet important de la journée. Si l’assemblée veille à ce qu'elle n'éclipse pas le travail mené par les étudiants au cours des derniers mois, elle est consciente de ses impacts. "Cet évènement sera le plus unifiant pour l’Europe", assure par exemple Christophe Grudler. De son côté, Antonio Argenziano insiste : "Nous redécouvrons le sens de la guerre, car nous avons oublié le sens du mot paix. L’intégration européenne n’est pas assez poussée pour répondre aux enjeux contemporains, à nous de faire les propositions pour progresser !" Malgré le contexte incertain, la motivation des étudiants européens à construire l’Union, elle, reste inébranlable.

Et il le faut, en cette année européenne de la jeunesse. Depuis janvier, en plus de cette assemblée, d’autres évènements ont déjà célébré l’implication des jeunes en Europe. La conférence européenne de la jeunesse, qui se tenait au Parlement européen à Strasbourg du 24 au 26 janvier 2022, en est un bon exemple. Les représentants étudiants avaient aussi pu défendre leurs idées avec comme symbole un mégaphone, signe que la jeunesse est bel et bien présente.

A cette occasion, Sarah El Haïry, secrétaire d’Etat à la Jeunesse, n'avait pas manqué de saluer leur implication en leur proposant de s'investir encore davantage dans les décisions européennes. "La jeunesse doit pouvoir s'exprimer sur les enjeux de la société et pas seulement sur ceux qui concernent directement la jeunesse. Ils sont les bâtisseurs du futur et les citoyens du présent." L’assemblée du 4 mars prouve que les jeunes peuvent se saisir du futur de l’Europe. Pour eux, pas question de subir un Youth Washing !

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