Décryptage

Plus le taux de chômage est élevé, plus les jeunes sont enclins à faire un service civique

Depuis la création du service civique en 2010, environ 700.000 jeunes ont réalisé une mission.
Depuis la création du service civique en 2010, environ 700.000 jeunes ont réalisé une mission. © Arthur HERVE/REA
Par Amélie Petitdemange, publié le 19 mars 2024
5 min

Dans sa dernière étude sur le service civique - menée sur la cohorte 2022 - l'Injep révèle que le profil des volontaires et le type de mission varient selon les départements. Particularité : plus le taux de chômage est élevé, plus les jeunes sont enclins à réaliser une mission. C'est notamment le cas dans les territoires d'Outre-mer.

Depuis la création du service civique en 2010, environ 700.000 jeunes ont réalisé une mission. Le nombre de missions va en s'accroissant d'année en année.

En 2022, 10% des 16-25 ans ont réalisé un service civique. Mais cette moyenne cache de grandes disparités selon les départements. C'est ce qui ressort de la dernière étude de l'Injep (Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire).

Recours inégal au service civique

La probabilité de réaliser un service civique est très différente selon le département dans lequel l'on vit. La part de jeunes qui réalisent un service civique s'élève ainsi à plus de 18% dans l'Aisne, mais à 3% en Savoie.

La différence est flagrante entre la métropole et les DROM, où le recours au service civique est particulièrement répandu. Il est en effet de 9,5% en moyenne dans l'Hexagone, contre 27,4% en Outre-mer. En Guadeloupe, le taux de recours au service civique atteint même 36%.

"Un moyen d'insertion" pour les jeunes au chômage

L'Injep observe dans cette étude une très forte corrélation entre le nombre de missions de service civique et la part de jeunes au chômage. Plus le taux de chômage est élevé, plus les jeunes sont enclins à réaliser une mission.

Ainsi, à la Réunion, où la part de jeunes au chômage ou inactifs atteint quasiment 35%, près de 20% des 16-25 ans ont réalisé un service civique. A contrario, en Haute-Savoie, où moins de 15% des jeunes sont au chômage ou inactifs, ils sont environ 2,5% à avoir réalisé un service civique.

En moyenne, une hausse d’un point de la part des jeunes au chômage ou inactifs est associée à une augmentation de 0,6 point de la part d’une génération réalisant le service civique dans le département.

"Bien que le service civique ait été conçu comme un engagement, les volontaires y voient souvent une activité qui s'insère dans leur parcours professionnel ou un moyen de subsistance. Dans les territoires fortement touchés par le chômage des jeunes, le service civique est d'ailleurs utilisé comme un moyen d'insertion", explique Thomas Venet, chargé d'études à l'Injep, lors de la présentation de l'étude.

Les missions dans le service public en hausse

Le service civique peut être réalisé au sein d’une association ou dans le secteur public au sens large, c’est-à dire dans une collectivité territoriale, un établissement public ou un service de l’État. Si les missions associatives ont longtemps été majoritaires, les missions dans le service public prennent de plus en plus d’ampleur.

Depuis 2015, la part des missions réalisées dans le service public a presque triplé, passant de 12% en 2014 à 35% en 2022. Cette augmentation globale varie cependant selon les territoires. Les spécificités économiques et territoriales influent en effet sur les demandes des jeunes et les besoins des services locaux en missions.

Des missions qui varient selon les territoires

Les territoires dans lesquels le chômage des jeunes est élevé connaissent aussi une autre particularité : les missions réalisées le sont davantage dans le service public.

C'est notamment le cas en Guadeloupe ou en Guyane, où environ quatre missions sur cinq sont réalisées dans le service public. Dans les Pyrénées-Orientales, le Jura, le Cher, la Corse et l’Indre, plus d’une mission sur deux prend place dans le service public. Au contraire, à Paris, dans les Bouches-du-Rhône et l’Oise, cela représente moins d’une mission sur cinq.

"La jeunesse n'est pas un bloc uniforme, on a donc des formes très différentes de service civique. D'un côté, il y a des diplômés du supérieur qui veulent s'engager dans une mission d'intérêt collectif. Ces jeunes vont plutôt vers des associations culturelles et des missions internationales. De l'autre, on a des jeunes peu ou pas diplômés qui sont dirigés vers le service civique public pour faciliter leur insertion et leur apporter un petit revenu", explique Thomas Venet.

Différences de profils

L'enquête de l'Injep souligne également de fortes variations entre les profils des jeunes qui réalisent un service civique. Au niveau national, un tiers des volontaires sont étudiants, mais ils sont seulement 12% à Mayotte, contre 53% à Paris.

Par ailleurs, en moyenne, près d'un tiers des volontaires sont diplômés du supérieur. Pourtant, cette proportion varie de 11% en Guyane à 60% à Paris. De même, si en moyenne deux volontaires sur dix n'ont aucun diplôme, c'est le cas de seulement 9% des volontaires à Paris mais 36% dans l'Yonne.

Ces différences de profils ont un lien avec les écarts de chance de réalisation d'un service civique. Ainsi, les taux de réalisation sont les plus élevés dans les départements dans lesquels les volontaires sont le moins diplômés.

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