Métiers de la mer : des parcours qui ne manquent pas de sel !

Concarneau a toujours été connu pour sa pêche, favorisée par sa position privilégiée à l’entrée de la baie de la Forêt. Mais au-delà de cette activité, l’ancienne cité fortifiée recèle une grande variété de métiers. Du technicien en chaudronnerie à la chercheuse en biologie, zoom sur six professionnels, qui ont en commun la passion du grand large.
Le technicien en chaudronnerie : de l'assemblage pièce par pièce
Le navire sur lequel travaille Thomas est destiné à la Marine nationale. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Technicien en chaudronnerie après une licence pro métiers industriels de la construction navale à l'IUT (institut universitaire de technologie) de Lorient et Pontivy, Thomas, 23 ans, exerce chez Piriou depuis trois ans. Ce constructeur naval produit tout type de navires, dont certains à vocation militaire, comme celui-ci, destiné à la Marine nationale. Thomas découpe de l'acier profilé et l'assemble par soudure, ici pour réaliser le parquet-machines.
Thomas découpe puis soude les pièces d'acier profilé pour construire chaque partie du navire. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
"On vit avec le navire le temps de sa construction. Tantôt en atelier, tantôt dans le navire, à l'extérieur ou à flot ! J'aime ce travail en équipe." Sa plus grande fierté ? "Avoir travaillé sur le Yersin, un navire d'exploration de 77 mètres. L'aménagement intérieur était au niveau de celui d'un yacht ! Quand je le vois passer à la télé, cela me fait plaisir !"
La chercheuse en biologie : compilation et interprétation des données
Solène parcourt les bassins extérieurs, datant de 1859, autrefois utilisés comme viviers pour les poissons étudiés. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Travailler dans un lieu historique, c'est la chance de Solène, 27 ans, chercheuse en biologie, passionnée de génétique. Elle a intégré, il y a trois ans, la station de biologie marine du Muséum national d'histoire naturelle, à Concarneau, en CDD (contrat à durée déterminée), pour y réaliser sa thèse. Cette station marine, la plus ancienne au monde, a été fondée en 1859, à la pointe est du port, dominant la mer. Du bâtiment d'origine, il ne reste que ces grands bassins extérieurs, qui se remplissent au rythme de la marée. "Auparavant, ils étaient utilisés comme viviers pour les poissons étudiés, mais ils sont obsolètes", raconte la jeune femme.
Solène a choisi d'étudier pour sa thèse la dorade royale. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
En plus de son laboratoire de recherche, la station contient un marinarium, un aquarium grand public où l'on peut admirer, notamment, la dorade royale. C'est précisément cet animal qu'étudie Solène. Elle observe son mode de vie et tente de démontrer que son déplacement vers le nord serait lié au réchauffement climatique. "Les éleveurs de moules et d'huîtres voyaient leurs élevages se faire attaquer, il y a trois ou quatre ans. La dorade royale, présente normalement plus au sud, était suspectée d'être la prédatrice. La Région Bretagne a débloqué des fonds pour effectuer des recherches sur le sujet." Solène collecte ainsi des données sur le cycle de croissance, la génétique, ainsi que sur le régime alimentaire de cette espèce.
D'après Solène, pour exercer ce métier, il faut être passionné. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Solène conserve des estomacs de dorades dans des bocaux pour les étudier. L'essentiel de son travail s'effectue au laboratoire (analyses d'ADN, chimiques...), et devant son ordinateur, pour compiler et interpréter les données recueillies. Pour valider sa thèse, elle doit avoir publié au moins une fois dans une revue scientifique. "Mon article a été accepté après la troisième tentative. Je suis soulagée !", souligne la jeune femme. "Ce métier manque de reconnaissance. On ne peut pas tenir, si on n'est pas passionné !" ajoute-t-elle.
L'électricien marin : installation et maintenance sur tous les bateaux
Dès 8 heures du matin, Guillaume effectue des réparations électriques sur les bateaux. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Il est 17 heures, le "War Raog IV", bateau fabriqué il y a dix ans par Piriou, constructeur naval, est en passe de prendre la mer pour une nuit de pêche à la sardine. En bleu de travail depuis 8 heures du matin, l'électricien Guillaume, 28 ans, est appelé pour une petite vérification de routine sur les projecteurs. C'est son entreprise, Le Gall, PME d'électricité marine, filiale du groupe Vinci, qui a réalisé toute l'installation du navire.
Thomas apprécie la variété de ses missions. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Les tournevis, les pinces coupantes, à dénuder, à sertir, et autres pinces Colson n'ont plus de secret pour ce natif de Concarneau qui avoue ne jamais s'ennuyer ! "Je ne fais jamais la même chose, chaque bateau est différent." Que ce soit sur un chantier au long cours ou lors de petites interventions, pour des installations complètes ou de la maintenance, il apprécie l'ambiance de cette entreprise à taille humaine. "Je connais tout le monde", déclare-t-il.
La responsable qualité et R&D : création et test de nouvelles recettes
Adeline, responsable qualité et R&D, en plein contrôle de la chaîne de sardines. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Tous les matins, Adeline enfile sa charlotte, sa blouse et ses sabots de protection, direction l'atelier après lavage de mains et brossage des chaussures réglementaires. "C'est comme cela dans tout l'agroalimentaire", explique la jeune femme de 24 ans, responsable qualité et R&D (recherche et développement) à la conserverie Gonidec, entreprise familiale qui produit poissons et crustacés en conserve et rillettes de la mer depuis 1959. Ce matin, ce sont près de quatre tonnes de sardinettes, qui seront évidées à la main par une quinzaine d'ouvrières, avant d'être frites et séchées. Le tout dans un bruit assourdissant, causé par l'immense séchoir qui fonctionne à plein régime. Passant au fil de la journée de l'atelier à la paillasse du laboratoire, Adeline est également chargée de créer et tester de nouvelles recettes de rillettes de poisson.
Adeline utilise un vacuomètre pour vérifier la mise sous vide des verrines. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Au quotidien, elle utilise un robot-mixeur, un pH-mètre, une balance de précision, des tubes mesureurs, une étuve, ou encore ici le vacuomètre, qui sert à vérifier la mise sous vide d'une verrine. Titulaire d'un master 2 ingénierie de la santé, spécialité produits innovants, obtenu à l'ISSBA (Institut supérieur de la santé et des bioproduits d'Angers), Adeline veille à la qualité de la production sur ligne. "Il peut y avoir des changements de température ambiante, des modifications des matières premières en fonction de la saison : par exemple, le goût des coquilles Saint-Jacques n'est pas constant toute l'année... Il faut parfois que j'intervienne très rapidement.
Adeline goûte chaque jour la production de la veille. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Côté management, ce n'est pas toujours facile de débarquer aussi jeune, face à une équipe de femmes qui travaillent ici depuis trente ans. Mais cet aspect de mon travail me plaît : au final, cela se passe bien !" Passage obligé, la dégustation des produits ! "On goûte tous les matins ce qui a été produit la veille, et l'élaboration d'une nouvelle recette exige, elle aussi, cette phase cruciale ! On vérifie l'odeur, l'aspect, le goût, la texture, la sauce..."
Le responsable d'affaires : gestion des contrats et supervision des projets
Fabien supervise les projets du devis à leur réalisation. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
À 27 ans, Fabien est responsable d'affaires chez Le Gall, PME d'électricité marine, basée à Concarneau. Son job ? Gérer les contrats et les devis envoyés aux clients : la définition technique, le budget, l'organisation du chantier et du travail, l'approvisionnement en matières premières, la relation avec les autres corps de métier, le suivi de chantier sur place...
La société qui emploie Fabien travaille sur tous les types de bateaux. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Ses responsabilités sont variées ! Fabien supervise quatre projets : une vedette de surveillance, un patrouilleur, un navire de transport passager et un yacht !
L'architecte navale : passion et innovation
La passion de Salomé pour les bateaux l'a poussée à devenir architecte navale. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Ce matin, Salomé, 29 ans, s'attèle aux premiers dessins de vedettes hydrographiques, des petites embarcations qui permettent aux scientifiques de dessiner la carte des fonds marins sur les zones côtières... Diplômée de la prestigieuse École des arts et métiers ParisTech, la jeune architecte navale fait partie de l'équipe "projet" du bureau d'études de Piriou, constructeur naval, où travaillent d'autres ingénieurs – uniquement des hommes.
Salomé commence par tracer les premières lignes en 2D. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Son rôle ? Dessiner les premiers éléments de l'architecture de bateaux en tout genre, dans le cadre d'appels à projets auxquels son entreprise répond. "Pour commencer, je trace les premières lignes en 2D. Je me base sur l'existant : si des bateaux de ce genre ont déjà été conçus ici, je me sers de ces plans comme référence. Aujourd'hui, je vais imaginer où placer le moteur, les sondeurs, et je vais aménager la cabine du bateau de façon à ce que le navigant, le mécano et le scientifique puissent avoir, chacun, leur place."
Lire aussi : Comment je suis devenu ingénieur composite naval
Salomé passe la majeure partie de son temps sur ordinateur. // © Thomas Louapre / Divergence pour l'Etudiant
Salariée de Piriou depuis presque cinq ans, Salomé est passionnée de bateaux. "J'aimais le nautisme et la course au large. Mais j'ai découvert, lors de mon année d'études à Rio, au Brésil, que je préférais les pompes et les moteurs, bref, dessiner des bateaux de travail !" Son open-space est tapissé de plans de précisions, qui évoluent au fil de son travail. Salomé travaille principalement sur ordinateur, avec des logiciels de pointe : de dessins 3D et de simulation (par exemple, pour vérifier la stabilité du futur navire).