Reportage

Réforme du bac : pour leurs spécialités, ils ont choisi l’enseignement à distance

De gauche à droite : Hugo, Anaïs et Lyna suivent les enseignements de spécialités à distance au lycée Jean XXIII de Montigny-lès-Metz.
De gauche à droite : Hugo, Anaïs et Lyna suivent les enseignements de spécialités à distance au lycée Jean XXIII de Montigny-lès-Metz. © Thibaut Cojean
Par Thibaut Cojean, publié le 29 novembre 2019
7 min

Episode 3/5. Tout au long de l’année, l’Etudiant vous emmène dans différents lycées de France pour comprendre comment le nouveau bac est mis en place. Pour ce 3e épisode, rendez-vous dans un grand lycée privé de la région de Metz. Ici, les rares spécialités qui ne sont pas proposées en présentiel peuvent être suivies à distance. Une solution qui offre des libertés aux élèves, mais demande aussi de l’autonomie.

Au lycée Jean XXIII de Montigny-lès-Metz (57), il n’est pas rare de croiser des lycéens seuls au CDI, les écouteurs dans les oreilles, le regard concentré sur leur ordinateur portable. Ils ne sont pas en train de réviser ou de préparer un exposé : ils sont en cours. Et pour certains comme Lyna, Hugo ou Anaïs, il ne s’agit pas de n’importe quels cours, mais de leurs enseignements de spécialités.

Une liberté dans les horaires

Dans ce grand lycée privé de la banlieue de Metz, presque toutes les spécialités sont proposées en classe de première. Quelques-unes, comme la LLCE espagnol, manquent toutefois à l’appel. Pas de problème pour Hugo et Lyna, qui ont pu s’y inscrire, à condition de la suivre à distance.
Cela ne signifie pas que le cours se fait par écran interposé. "Notre professeure d’espagnol n’est pas en face de nous, explique Lyna. On se connecte à une plate-forme, avec toutes les ressources : documents audios, films, textes. Le dimanche ou le lundi, la professeure met en ligne des questionnaires ou des devoirs et on doit y répondre dans la semaine."
C’est donc aux élèves de s’organiser, selon les créneaux qu’ils ont choisis : deux heures le lundi et deux heures le mardi pour Lyna, trois heures le lundi et une heure le jeudi pour Hugo. Si cette organisation exige d’être autonome, elle permet également une certaine forme de souplesse, notamment sur les horaires. "On peut profiter de trous dans notre emploi du temps et venir hors des créneaux prévus", explique Hugo.

"Seuls", mais "mieux concentrés"

Autre avantage, celui d’avancer à son rythme. "Si on a terminé en trois heures au lieu de quatre, tant mieux", se réjouit le lycéen. "À l’inverse, si on n’a pas réussi à terminer quelque chose, les profs sont assez indulgents et on peut demander une ou deux heures de plus", renchérit Anaïs.

Pour elle, la situation est un peu différente. À la suite d’un problème d’emploi du temps, deux de ses spécialités tombaient sur le même créneau. Plutôt que de renoncer à l’une d’elles, elle a choisi de suivre histoire-géo, géopolitique et sciences politiques (HGGSP) à distance. Elle s’installe donc au CDI pendant deux heures le lundi et deux heures le mercredi et suit le même système. "C’est un peu triste d’être toute seule, mais ça permet de mieux se concentrer", relativise-t-elle.

Ce travail à distance permet aussi de suivre les cours à la maison, même si pour Lyna, cela arrive parfois par contrainte : "Une fois, la professeure a mis en ligne les devoirs à rendre le mercredi, mais comme j’avais déjà utilisé mes deux créneaux, j’ai dû travailler depuis la maison pour les rendre le dimanche".
Le lycée Jean XXIII à Montigny-lès-Metz.
Le lycée Jean XXIII à Montigny-lès-Metz. © Thibaut Cojean

145 élèves de première inscrits sur le réseau

L’enseignement à distance n’est pas une nouveauté. Michel Larrory, le directeur du lycée Jean XXIII, l’a imaginé en 1998, dans son établissement précédent. "Pour que ce système fonctionne, il faut trois composantes, détaille Patick Trimbur, son directeur-adjoint actuel. Un professeur à distance rigoureux, des élèves autonomes et un professeur référent au lycée pour suivre les élèves."
Désormais bien rodé, ce système met en relation 28 établissements privés de la région. Une trentaine de disciplines sont enseignées à distance, de la 5e au post-bac. En première, cela concerne sept spécialités du nouveau bac, permettant à 145 lycéens d’avoir plus de choix.
Du côté des professeurs aussi, cela demande une organisation différente. "Je fournis le lundi matin à 8 h du travail pour quatre heures", précise David Schalk, professeur de HGGSP. En plus des cours normaux donnés dans son lycée de Thionville, il enseigne à 13 autres élèves : une à Montigny-lès-Metz (à 31 km), 3 à Saint-Dié (à 150 km) et 9 à Forbach (à 65 km).

Moins d’échanges avec les profs

Dans un de ces lycées, il est relayé par des professeurs sur place, dans les autres, non. "Je demande un rendu chaque semaine. Par exemple : une vidéo, une revue de presse, un TP, des exercices divers, etc." Pour chaque devoir, il note ses élèves selon son propre barème. En espagnol, la notation est différente : "Toutes les semaines, on rend plusieurs exercices et on ne sait pas lesquels seront notés", témoignent Hugo et Lyna. Quant aux épreuves, les élèves les passeront directement dans leur lycée.
S’il offre plus de choix et de libertés, l’enseignement à distance a aussi ses limites, notamment au niveau de la communication. Lyna trouve ainsi "dommage de ne pas pouvoir parler avec un prof, surtout dans les langues".
Malgré la messagerie mise à disposition sur la plate-forme, une interaction en réel n’est en effet pas possible. Pour y palier, David Schalk privilégie l’échange par email. "Je reçois les emails des élèves directement sur mon téléphone ou ma tablette, et j’essaie d’y répondre dès que possible."
Avec le temps, une relation de confiance finit par s'installer entre les élèves et le professeur, même si des suspicions peuvent persister. "L’autre jour, une élève ne m’a pas rendu un devoir parce qu’elle a eu un bug. Je n’ai pas eu d’autre choix que de la croire."

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