Décryptage

Stage en 2de : une mise en œuvre qui s’annonce compliquée

Le stage en 2de devrait se dérouler du 17 au 28 juin 2024.
Le stage en 2de devrait se dérouler du 17 au 28 juin 2024. © Valerii Honcharuk / Adobe Stock
Par Marine Ilario, publié le 22 novembre 2023
5 min

Dès 2024, les élèves de 2de pourraient avoir à réaliser un stage au mois de juin. Les entreprises se disent "mobilisées", mais peuvent-elles accueillir 550.000 élèves en 10 jours ? Pour l'heure, les règles de mises en place manquent de concret.

C'était l'annonce surprise de la rentrée, faite par le nouveau ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, fin août : les élèves de 2de devront désormais faire un stage en entreprise au mois de juin.

Mais cette "séquence d’observation en milieu professionnel", qui vise à reconquérir le mois de juin, suscite des interrogations. Le stage sera-t-il obligatoire ? Faudra-t-il rendre un rapport ? Comment faire si on ne trouve pas d’entreprises ? Stage d’observation ou stage pratique ? Autant de questions qui restent encore en suspens et qui font douter de sa bonne mise en œuvre d’ici la fin de l’année scolaire.

"Découvrir le monde de l’entreprise et affiner un projet d’orientation"

Cette proposition d'un stage en juin pour les élèves de 2de a été bien reçue par le milieu professionnel. Pour Stéphane Heit, vice-président national de la CPME (confédérations des petites et moyennes entreprises), "c’est une bonne opportunité de continuer à découvrir le monde de l’entreprise et d’affiner un projet d’orientation".

Même chose pour Virginie Salmen, co-fondatrice de l’association Viens voir mon taf, qui émet toutefois un bémol. "C’est une bonne chose de multiplier les expériences en entreprise à partir du moment où les stages sont de qualité." C'est-à-dire que les élèves auront la possibilité de bien choisir leur stage.

Y aura-t-il assez de stages pour tout le monde ?

C'est notamment la question du choix qui soulève des doutes. L’association, qui vient en aide aux élèves de 3e des quartiers défavorisés pour trouver leur stage, sait d’expérience qu’il faut du temps pour que les entreprises assimilent l’existence d’un stage obligatoire et proposent massivement l’accueil de stagiaires. Si bien que trouver un stage de qualité pour l’ensemble des 550.000 élèves de 2de générale et technologique s'annonce comme "un véritable tour de force", selon Virginie Salmen.

Le 14 novembre dernier, Gabriel Attal a présenté ce projet devant le Medef et a reçu un accueil très positif du syndicat des patrons. La CPME se dit elle aussi "mobilisée", mais toujours dans l’attente des précisions de mise en œuvre. "On ne peut pas engager les entreprises sans informations concrètes. Fin juin va arriver très vite, donc on espère que les pouvoirs publics vont rapidement préciser les modalités de ces stages", indique Stéphane Heit, qui table sur des précisions d’ici les vacances de Noël.

Et que se passera-t-il pour les élèves qui ne trouveront pas de stage ? Selon nos informations, le ministère a annoncé devant le CSE (conseil supérieur de l’éducation) la possibilité de revenir au lycée. "Mais on ne sait pas ce qui sera proposé, sachant que sur cette période, les enseignants seront bien occupés avec les épreuves du bac", prévient Claire Guéville, secrétaire nationale lycée au Snes-FSU (syndicat national des enseignements de second degré).

Assurer un accès équitable aux stages

La question de l'égalité d'accès au stage se pose également. "Avec un stage obligatoire, il y a un vrai risque que les élèves les plus fragiles, habitant dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, mais aussi dans les territoires ruraux par exemple, aient plus de difficultés à trouver, redoute Virginie Salmen. Nous savons que le gouvernement a ce sujet bien en tête, cinq ans après la mise en place du dispositif 'Mon stage de 3e''.

Un dispositif qui devrait d'ailleurs servir de modèle à une nouvelle plateforme promise par Gabriel Attal pour accompagner la recherche de stage de ces élèves.

Tel que présenté au départ, le stage semblait en effet obligatoire pour tous les élèves de 2de sur une période de 10 jours, du 17 au 28 juin. Pourtant, quelques exceptions sont d’ores et déjà prévues : si vous envisagez un séjour linguistique ou de prendre un job d’été, vous en serez exemptés.

Le choix entre le stage et le SNU

Vous aurez également le choix entre faire un SNU (service national universel) et un stage. Par SNU comprenez un séjour de cohésion dont la durée est identique à celle du stage ; et si vous avez déjà réalisé ce séjour, vous pourrez choisir d’effectuer une mission d’intérêt général, toujours dans le cadre du SNU.

Une modalité qui ne convainc pas le Snalc (syndicat national des lycées, collèges, écoles et du supérieur). "Il n’est pas du rôle de l’éducation nationale de promouvoir le SNU. Si les élèves veulent en faire un, très bien, mais il ne faut pas que cela se fasse sur le temps scolaire", martèle Sébastien Vieille, secrétaire national chargé de la pédagogie.

Face à ces nombreuses incertitudes, le CSE (Conseil supérieur de l'Éducation) rendu un avis négatif sur l’arrêté qui vise à mettre en place le stage de seconde avec 58 votes contre, 8 pour et 3 abstentions, le 16 novembre dernier. Une note de service devrait venir clarifier les nombreuses zones d’ombre dans les jours qui viennent.

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