Ecoles d'art : au cœur d'un cours de modélisme à l'heure du Covid-19
Comme la plupart des étudiants en art, les élèves de l'Institut supérieur des arts appliqués (LISAA) continuent de suivre certains de leurs travaux pratiques en présentiel. Et ce, malgré le reconfinement. L'Etudiant est donc parti à leur rencontre, l'occasion d'en savoir un peu plus sur leur ressenti.
À LISAA, la salle de classe est studieuse : les explications de l’enseignante s’enchainent, les étudiants, debout autour du tableau, prennent des notes. Pendant ce cours de modélisme, les étudiants doivent apprendre, pas à pas, à confectionner une jupe droite. Ce jour-là, ils s’attellent à la couture d’un zip. "Ça n’a pas l’air difficile quand on suit bien toutes les étapes mais une fois qu’on est devant la machine à coudre, ça se complique", estime Mélinda, 18 ans.
Un cours presque comme un autre
À première vue, le cours ressemble à ce qu’il y a de plus classique. Seuls la présence des masques, du gel hydroalcoolique et des affiches indiquant les capacités maximales d’accueil à respecter rappellent bien la crise sanitaire. Autant de consignes qui ne semblent même plus perturber le déroulement du cours.
À un détail près… Au bout de quelques minutes, les étudiants rejoignent leur machine à coudre. De son côté, la professeure, Solène Barrière, semble s'adresser directement à son écran d'ordinateur : "Est-ce que vous voyez le tableau ? Est-ce que vous avez des questions ?" Une autre conséquence de la crise sanitaire : parmi les 27 élèves de première année de bachelor Stylisme, six sont à distance. "Soit parce qu’ils ont préféré retourner chez leurs parents pour le confinement, soit parce qu’ils sont cas contact ou malades, précise l’enseignante. On s’adapte à toutes les situations !"
Trouver son rythme entre le présentiel et le distanciel
De l'adaptation, il en faut ! Un mois et demi après leur rentrée et depuis le reconfinement, les étudiants en première année ne viennent plus qu’une seule journée par semaine à LISAA. Assise au fond de la classe à côté d'une autre étudiante, bouts de tissus à la main, Léïna, 18 ans l'admet : revenir en cours pendant le confinement est indispensable. "Déjà pour se voir entre nous mais aussi pour pouvoir échanger avec les profs."
L’étudiante, qui a déjà passé une partie de son année de terminale à distance, enchaine sa première année d’études supérieures dans des conditions une fois de plus particulières. "J’ai l’impression d’avoir passé mon année à la maison, s’exclame-t-elle, avec un sourire qui laisse vite place à l'agacement. Pour le bac, c’était gérable mais là, je trouve ça plus compliqué. Tout est nouveau, on a tout à apprendre. Je n’arrive pas trouver mon nouveau rythme de travail parce qu’il y a beaucoup de rendus et je ne sais pas comment je dois m’organiser."
Un sentiment qui semble partagé par la plupart des étudiants. Dans une formation où la pratique occupe une place prépondérante, difficile d’apprendre les bases loin de leurs enseignants. "On a des cours qui durent trois ou quatre heures d’affilée, je n’arrive pas du tout à rester concentré derrière mon ordinateur", avoue David, 20 ans, entre deux coups de machine à coudre. Aujourd’hui, seul le cours de modélisme s’effectue en présentiel. Le reste (infographie, stylisme, textile, marketing, anglais…) se passe par écrans interposés.
Mélinda, très concentrée sur la couture de son zip, se dit elle aussi perplexe face à cette organisation. "La plupart du temps, le prof nous montre et on doit coudre en même temps à distance. Mais c’est difficile de suivre et de savoir si on a la bonne technique, si on a bien suivi les consignes parce qu’on ne peut pas vraiment montrer l’avancée de nos travaux." L’étudiante profite donc de sa seule journée en présentiel pour ramener tous ses projets et faire le point. "La semaine dernière, avant de passer à la découpe d’une de mes pièces, j’ai ramené mes patrons et la prof a pu m’expliquer directement les erreurs que j’avais fait. Cela évite de devoir tout recommencer."
Autonomie et adaptabilité
Malgré tout, cette entraide n'est pas toujours suffisante. Selon Léïna, cette façon de travailler à ses limites : "J’ai la sensation que le gouvernement a oublié les étudiants en art… À l’inverse des étudiants à l’université, on a besoin d'être davantage en classe pour progresser. Il faut espérer que la crise ne s’éternise pas…"
Trêve de bavardages, après une heure de cours, tous les étudiants ont plus ou moins bien avancé sur leur zip. Retour au tableau pour attaquer une partie plus technique : la ceinture de la jupe. "Vous verrez quand vous aurez le tissu entre vos mains, ce serait plus évident, au travail !", conclut l’enseignante.
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