Décryptage

Études d’orthophonie : le couac sur le nombre de places ouvertes en première année

Plusieurs centres de formation universitaires en orthophonie (CFUO) ont décidé de ne pas appliquer l’arrêté pour cette rentrée 2021.
Plusieurs centres de formation universitaires en orthophonie (CFUO) ont décidé de ne pas appliquer l’arrêté pour cette rentrée 2021. © Pixel-Shot / Adobe Stock
Par Pauline Bluteau, publié le 18 octobre 2021
6 min

Ce ne sont pas 912 ni 958 places mais 936 places qui ont finalement été attribuées aux étudiants en première année d’orthophonie pour la rentrée 2021. Des chiffres qui n’ont l’air de rien mais qui pointent un manque de communication entre le ministère de l’Enseignement supérieur, les centres de formation et les étudiants.

Silence radio : c’est ainsi que l’on pourrait résumer la réponse du ministère de l’Enseignement supérieur face à l’incompréhension des Centres de formation universitaires en orthophonie (CFUO). Depuis la publication, en juillet dernier, de l’arrêté définissant le nombre de places ouvertes pour les élèves en première année à la rentrée 2021, les établissements tout comme les étudiants sont dans le flou.

Pour bien comprendre, il faut remonter au mois de juin. Le ministère prévoyait alors l’ouverture de 912 places avant de rectifier l’arrêté en juillet pour indiquer 958 places ouvertes. Une augmentation demandée en partie par la FNEO, la Fédération nationale des étudiants en orthophonie. À la rentrée, force est de constater que 936 places ont finalement été pourvues par les étudiants en première année.

Des erreurs sur les capacités d'accueil en orthophonie

Où sont donc passées les 22 places supplémentaires ? Elles n’auraient en fait peut-être jamais vraiment existé. À Amiens, depuis la création du département d'orthophonie, 30 places étaient ouvertes chaque année. En 2020, la capacité d'accueil est passée à 35. En raison de la crise sanitaire, le centre de formation a ajouté deux places supplémentaires pour faire face aux demandes.

Une exception, selon Corinne Adamkiewicz, responsable pédagogique du département orthophonie à l’université Picardie Jules Verne : "Nous avons toujours annoncé que nous voulions revenir à 35 places cette année, nous augmenterons quand nous déménagerons nos locaux et que nous aurons plus d’espace, pour l’instant ce n’est pas envisageable."

Même son de cloche à Lille. La directrice du département orthophonie, Mai Tran, est aussi secrétaire du CCFUO (collège des CFUO) où l'on défend une erreur dans l’arrêté. "Chaque centre de formation doit faire remonter ses capacités d’accueil chaque année, or, dans l’arrêté, ils ont dû se baser sur les chiffres de 2020-2021 qui avaient été revus exceptionnellement à la hausse lors de la première admission via Parcoursup.

Le ministère avait à cette époque demandé aux CFUO d'accueillir plus d’étudiants en promettant des financements supplémentaires. Financements que tous les établissements n’ont pas obtenus d’où, entre autres, les réticences pour cette année. Nous avons écrit au ministère pour indiquer les erreurs sur les capacités d’accueil mais nous n’avons eu aucune réponse." Contacté également à plusieurs reprises par l’Etudiant, le ministère n’a pas donné suite non plus.

Accueillir les étudiants dans de bonnes conditions

Car si accueillir un ou deux élèves en plus n’a l’air de rien, pour les centres de formation cela relève parfois d’un vrai casse-tête. "Les locaux ne sont pas extensibles, il y a des raisons de sécurité mais s’ajoute aussi l’accueil des étudiants dans de bonnes conditions de formation (lieux de stages en nombre suffisant et enseignants) car c’est de notre responsabilité", estime Mai Tran.

Pointée du doigt également : la difficulté de trouver des stages pour tous les étudiants. "Les déplacements pour se rendre en stage, contrairement à la plupart des formations en santé, ne sont pas indemnisés donc on peut comprendre que les étudiants ne puissent pas faire des dizaines de kilomètres tous les jours pour s'y rendre. Pour certains centres de formation, il y a aussi un manque de professionnels sur le territoire pour accueillir les stagiaires", complète la responsable amiénoise.

Un manque de moyens qui touche les étudiants

Le nerf de la guerre reste donc le même : difficile d’accueillir plus d’étudiants en orthophonie sans moyens financiers et ressources humaines. Plusieurs CFUO ont donc fait le choix délibéré de ne pas appliquer l’arrêté pour cette rentrée. "Il y a eu des dysfonctionnements sur les arrêtés mais nous ne pouvions pas augmenter notre capacité d’accueil. On ne peut pas pousser les murs !", affirme Corinne Adamkiewicz.

Mais les conséquences se retrouvent directement sur les étudiants chez qui le message ne passe pas. "Il y a des candidats qui étaient encore en attente de réponse alors que toutes les places étaient prises, regrette Sophie Heulle, présidente de la FNEO. Il y a eu un manque de communication et aucune consultation."

De son côté, la secrétaire du CCFUO entend poursuivre l'information faite aux candidats "en apportant les éclaircissements à son niveau". Elle assure aussi que "les CFUO continueront de plaider en faveur de moyens leur permettant d'assurer une formation en orthophonie de qualité." La FNEO espère aussi une augmentation des capacités d'accueil pour la rentrée 2022 accompagnée de financements "à la hauteur des besoins" des CFUO.

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