Reportage

Égalité des chances : un stage à l'INA pour oser se lancer dans un cursus sélectif

Ce stage à l'INA permet aux élèves de découvrir les métiers de l'audiovisuel
Ce stage à l'INA permet aux élèves de découvrir les métiers de l'audiovisuel © Simon Mauvieux
Par Simon Mauvieux, publié le 03 mars 2023
6 min

À l’INA, une dizaine d’élèves issus de milieux modestes ont pu découvrir le temps d’une semaine les métiers de l’audiovisuel. Un dispositif qui tente d’améliorer la mixité sociale dans les grandes écoles de la culture, encore très inégalitaires.

C’est une salle de classe des plus banales, mais il règne ici une ambiance plus détenue que d’habitude. On y parle concours, recherche d’alternance, bourses d’études, on s’encourage et on se rassure. Nous sommes à l’Institut national de l’audiovisuel (INA), une prestigieuse école à l’ouest de Paris. Ici, l’admission est difficile, et l’école, comme beaucoup d’autres, souffre d’un manque de mixité sociale. Seuls 10% de jeunes issus de milieux modestes fréquentent les bancs des grandes écoles.

Pour tenter de pallier ce problème, la fondation Culture et diversité organise depuis 15 ans des stages de présentation des filières culturelles sélectives à destination d’élèves issus de quartiers populaires ou de zones rurales. Depuis, 2.500 jeunes ont participé à ces 12 stages annuels et la moitié ont intégré de prestigieuses écoles de la culture, comme l’école du Louvre, la Fémis, des écoles d’architectures ou l’INA.

Un stage pour en finir avec l'auto-censure

Et justement, pendant une semaine, du 20 au 24 février 2023, une dizaine de jeunes venus de toute la France ont découvert les métiers de l’audiovisuel. Son, montage, production, l'institut propose 16 diplômes professionnalisant pour les métiers de l’audiovisuel. En plus d’entrer dans les détails de ces formations, le stage permet de rencontrer des professionnels et même de visiter des studios de radio ou de télévision.

"Le but est de renforcer la confiance des élèves, certains arrivent en se censurant, disant qu’ils vont candidater seulement dans les écoles près de chez eux. Ces stages leur ouvrent des horizons grâce notamment à l’accompagnement financier", témoigne Thomas Meugnot, coordinateur et responsable des programmes égalité des chances de la fondation Culture et diversité.

Et à écouter les élèves, c’est un pari qui semble gagné : "Avant le stage, je me disais que si je postule, je ne serais jamais pris. Mais en parlant avec des professionnels ou des étudiants, on a vu qu’il y avait beaucoup de métiers différents et beaucoup d’opportunités, alors ça donne confiance, on sait qu’on peut être accompagné pour atteindre un but professionnel, ça aide beaucoup", témoigne Ilyes, 21 ans, originaire de Lyon.

Prendre confiance grâce aux rencontres

Les élèves ont pu participer à des ateliers de préparation aux entretiens individuels, un passage redouté mais indispensable dans le processus d’admission. Baptiste est venu de Clermont-Ferrand pour participer au stage. Il a déjà tenté d'intégrer les BTS audiovisuel de l'INA il y a un an, sans succès. "J’ai appris à être plus à l’aise lorsque je parle de moi, de mon parcours et de mes motivations, explique-t-il. J’ai un peu plus confiance, même si je vais être stressé pour les concours, ça m’a beaucoup aidé", ajoute le jeune homme, qui compte bien retenter sa chance cette année pour intégrer l’INA.

Au-delà des rencontres avec les professionnels du milieu de l’audiovisuel, ce qui a le plus marqué les élèves, ce sont les discussions avec d’anciens étudiants de l’INA, passés eux aussi par ce dispositif et devenus mentors le temps du stage. "Ca m’a beaucoup rassuré, témoigne Ilyes. Il y a toujours le stress de trouver une alternance mais en échangeant avec eux, j’ai vu que c’était possible, ça m’a donné beaucoup de force et ça m’a encouragé à poursuivre dans cette voie. Si eux l’ont fait, pourquoi pas nous !", lance-t-il avec le sourire.
Un constat partagé par Clara, 19 ans, étudiante en prépa audiovisuelle dans un lycée de Corbeil-Essonnes (91) : "Ces échanges nous ont donné beaucoup d’outils pour savoir dans quoi on s’engageait, ça a confirmé ma motivation à postuler à l’INA."
Baptiste, Clara et Ilyes ont apprécié cette semaine à l'INA.
Baptiste, Clara et Ilyes ont apprécié cette semaine à l'INA. © Simon Mauvieux

L'audiovisuel, une réalité peu connue

Durant cette semaine, les élèves ont également pu découvrir les réalités des différents métiers de l’audiovisuel en visitant le studio de l’émission d’Arte 28 minutes et les locaux de Radio France. "On a été au cœur du milieu pour voir comment ça fonctionne concrètement. L’audiovisuel, on connait ça de loin, mais là, ça permet d’avoir un pied dedans, ça motive énormément", soutient Clara.

Des étoiles plein les yeux et avec la profonde envie de poursuivre dans cette voie, les participants ont quitté le stage boostés par ces rencontres et ces visites. Si en 15 ans, la fondation a permis à près de 1.200 jeunes boursiers d’intégrer de prestigieuses écoles, la part d’élèves issus de milieux modestes reste encore très faible dans ces formations sélectives. "Il faut continuer de renforcer les moyens et de susciter les vocations, affirme Thomas Meugnot. On intervient dès le lycée, c’est un moment clé pour que les pratiques artistiques ou culturelles passent d’un hobby à un projet d’orientation professionnel. Mais il faudrait toucher ces jeunes encore plus tôt", soulève-t-il.

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