Enquête

Sens, salaire, conditions de travail, ce qu'attendent les jeunes diplômés et étudiants des entreprises

La rémunération reste un critère important pour les étudiants et jeunes diplômés.
La rémunération reste un critère important pour les étudiants et jeunes diplômés. © LIGHTFIELD STUDIOS / Adobe Stock
Par Etienne Gless, publié le 14 octobre 2021
10 min

Formés en partie à distance, ayant connu des difficultés pour trouver leur stage ou leur premier emploi, étudiants et jeunes diplômés de 2020 et 2021 expriment de nouvelles attentes vis-à-vis de l'entreprise. Quels sont leurs critères de choix et comment évoluent-ils ? Entre témoignages et enquête, l'Etudiant fait le point à l'appui du sondage mené en partenariat avec Harris Interactive et Epoka.

"J’attends d’une entreprise qu’elle fasse sens, qu'elle m’offre de belles missions et que je m’épanouisse. Par 'belle boîte' j’entends une entreprise en croissance, innovante et qui prend soin de ses salariés, qui ait à cœur de créer une culture d’entreprise. Cela peut être un grand groupe, une entreprise de taille intermédiaire, une PME comme une start-up." Olivier, 24 ans, fraîchement diplômé 2021 du programme Grande école (PGE) de l’emlyon n'est pas inquiet pour son insertion professionnelle. En cet automne 2021, il écume les salons de l'emploi, les sessions de job dating pour choisir l'entreprise de ses rêves.

Critère n°1 : un métier qui a du sens, un impact positif sur le monde

"J’aimerais bien travailler dans l’agroalimentaire et dans l’idéal dans des entreprises certifiées B-Corp (un label accordé à des entreprises commerciales ayant des pratiques responsables sur le plan social et environnemental, NDLR) comme Lea Nature ou Valrhona", témoigne Clémence, 24 ans, diplômée de l'école d'ingénieurs de l'Université technologique de Compiègne et d'un mastère spécialisé de l'emlyon. "J'aimerais avoir un impact sur l'alimentation demain."

Pour une majorité de jeunes comme Clémence, la recherche de sens et d'impact sur le monde sont des critères de première importance dans le choix d'une entreprise. Travailler sur des sujets à gros enjeux (41%) et exercer un métier qui a du sens (37%) arrivent en tête de leurs critères prioritaires selon l'enquête menée par Harris Interactive au printemps 2021 auprès de 5.500 étudiants et néo-diplômés. Le classement 2021-2022 des entreprises préférées des étudiants et jeunes diplômés publié par l'Etudiant, a été réalisé en partenariat avec Harris Interactive et Epoka sur la base de ce sondage.

"La politique RSE (responsabilité sociétale des entreprises) de la 'boîte' est mon critère de choix numéro 2 après le secteur d'activité", observe Cyprien, 22 ans, apprenti ingénieur chez ISAE-Supméca. "Attention pas la politique RSE affichée mais celle qu'elle pratique réellement", prévient-il.

La rémunération reste un critère important pour les jeunes

"Mon troisième critère prioritaire pour rejoindre une entreprise sera la rémunération et les avantages proposés : 13e mois, intéressement, participation..." confie encore Clémence. "Ils me paient au lance-pierres, je ne vais pas faire des heures sup' ! A salaire minimum, investissement minimum", lâche de son côté Ludivine, 22 ans diplômée d'un bachelor en marketing digital qui a fait des concessions pour trouver son premier poste l'an passé.

L'argent ça compte ! "Le salaire n'est pas prioritaire mais c'est important. Ne serait-ce parce que j'ai un prêt étudiant à rembourser !", sourit Olivier, le diplômé de l'emlyon. Pour d'autres, le niveau de salaire reste prioritaire : "Le salaire sera mon premier critère de recherche d'emploi en début de carrière avec ensuite un job utile puis une bonne ambiance de travail", énumère Hicham, 20 ans, diplômé d'un DUT Mesures physiques et en recherche d'une alternance pour préparer son titre d'ingénieur au groupe Cesi, campus de Nanterre.

Pour une majorité absolue de personnes interrogées, pas question de choisir entre un bon salaire et la qualité de vie au travail : les deux sont aussi importants pour 55% des étudiants et jeunes diplômés en écoles d'ingénieurs et même 68% pour leurs camarades en écoles de management ou à l'université.

Prestige et notoriété des entreprises un plus sur le CV

"En travaillant dans une grande entreprise je pourrais davantage évoluer, c’est pour moi un critère très important", témoigne Rayan, 20 ans, diplômé d’un BTS Électrotechnique d’un lycée polyvalent de l’Essonne, actuellement étudiant au CFA AFORP où il prépare une licence professionnelle et en quête d'une alternance.

"Mes critères de choix d’une entreprise c'est d'abord un secteur en rapport avec ma formation -l'électrotechnique- et tout de suite après une grande entreprise renommée : EDF, Enedis c’est beaucoup mieux pour ma carrière qu’un petit artisan électricien", ajoute Rayan.

"Je compte débuter ma carrière dans une grande entreprise car un grand groupe apporte du confort, une solidité financière et la possibilité d’évoluer et d’apprendre encore", prévoit de son côté Cyprien, le futur ingénieur. "Mais ensuite je compte aller en PME pour affronter de plus gros défis voire si j’en ai le courage et si je trouve les bons associés créer mon entreprise".

Flexibilité des horaires et bonnes conditions de travail

"Pour moi le télétravail et la possibilité de choisir ses horaires afin de travailler plus efficacement est indispensable", juge Clémence. De la souplesse dans les horaires (63%) et de bonnes conditions de travail (64%) : depuis la crise sanitaire, ces deux critères d'attractivité grimpent en flèche pour près des deux tiers des étudiants et jeunes diplômés interrogés.

Le télétravail n'est plus une option pour les jeunes

"Je ne cherche pas un job à 100% en télétravail mais deux à trois jours de télétravail par semaine me plairait bien", confie Olivier. "De nombreuses tâches n’exigent pas qu’on se rende sur place. Le retour au travail à 100% en présentiel cinq jours sur cinq à mon sens c’est fini", affirme-t-il.

La crise sanitaire a poussé à l'hybridation du travail. Difficile de revenir en arrière pour les métiers qui peuvent s'effectuer en partie à distance. Pourtant certains ne s'imaginent pas télétravailler : "J'aime bien le contact humain. Je préférerais un job qui ne soit pas à distance", témoigne ainsi Arnelle Rakotomalala, 24 ans, étudiante en M2 d'ingénierie mécanique à l'université d'Evry.

Des processus de recrutement jugés trop lourds

Faire plus simple ! Près de 51% des personnes interrogées rêvent d'un processus de recrutement avec peu d'entretiens ou des entrevues rapprochés pour aller plus vite. Ils plaident également pour un accès direct aux offres d'emploi sans avoir à créer de compte (50%) et rencontrer très vite les managers opérationnels (45%).

"Ce qui me fatigue avec les grandes entreprises c’est le processus très répétitif pour candidater", se désole Cyprien. "Il faut s’inscrire sur leur site emploi-carrière. J'ai ainsi dû remplir une centaine de formulaires pour obtenir dix réponses dont une seule positive. Ensuite certaines entreprises exigent quatre à cinq entretiens de 40 minutes chacun avec des responsables différents et jamais le même jour !"

Chronophage, énergivore et au total décourageant. Autre reproche récurent chez les jeunes interrogés, des offres d’emploi pas toujours mises à jour sur le site emploi carrière des entreprises. "Ce n’est pas harmonisé, on peut rater des opportunités", pointe aussi Cyprien.

Un écart entre communication marque employeur et réalité du recrutement

"Ma recherche d'emploi est compliquée. Quand je postule à distance sur les sites web des entreprises, je reçois des réponses automatiques. Il est difficile de contacter directement les recruteurs", remarque Arnelle qui cherche un poste en alternance depuis début juillet. "Sur un salon de l'emploi à Paris, les entreprises présentes m'ont demandé d'aller sur leur site web pour y déposer mon CV ! Je suis consternée."

"Il existe un grand écart entre la communication des entreprises sur leur marque employeur et la réalité ", déplore-t-elle. Son cas n'est pas exceptionnel. D'ailleurs, seuls 36% des jeunes interrogés par Harris interactive jugent que les entreprises ont communiqué sur les bons sujets et su répondre à leurs préoccupations durant la crise sanitaire. Une urgence s'agissant des processus de recrutement se fait ainsi jour : les numériser c'est bien, les ré-humaniser ce serait mieux !

Les réseaux sociaux changent la donne pour la communication RH

85% des étudiants et néo-diplômés utilisent les réseaux sociaux en particulier LinkedIn. Beaucoup consultent aussi les sites de notation des employeurs pour avoir des avis de l'intérieur de la part d'anciens salariés. 51% des jeunes sondés les trouvent fiables.

"Il est difficile de connaître la véritable culture de l'entreprise sans être à l'intérieur", constate un brin fataliste Cyprien. Pourtant la mauvaise réputation en matière de politique environnementale ou sociale finit par se savoir : "Dans mon secteur je suis le compte Instagram #Balancetastartup pour avoir des retours de stagiaires, jeunes diplômés qui y travaillent, explique Clémence. "Il y a des start-up connues très fortes en communication dont les pratiques ne collent pas du tout avec les conditions qu’elles prétendent offrir !"

Ce n'est pas tant la communication sur la marque employeur qu'il s'agit de changer que les pratiques réelles de l'organisation et du management !

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