Nouveau bac : à Die, les conditions d’enseignement font oublier le manque de spécialités

Episode 4/4. Tout au long de l’année, l’Etudiant vous emmène dans différents lycées de France pour comprendre comment le nouveau bac est mis en place. Aujourd’hui, rendez-vous au pied des Alpes, à Die, dans la Drôme, où un petit lycée isolé qui ne pouvait pas proposer toutes les spécialités a perdu quelques élèves. Mais ceux qui sont restés bénéficient d’un cadre de travail exceptionnel.
Alors que le soleil peine à percer l’épais brouillard de décembre, le froid et le silence se rencontrent, aussi poignants l’un que l’autre, à chaque croisement de cette petite ville de moyenne montagne. Nous sommes à Die, dans la Drôme (26). Un village, rendu célèbre par la Clairette, sa pétillante boisson alcoolisée, mais pourtant assez isolé des grands axes.
71 élèves en première et 7 spécialités
: un établissement où les élèves du collège côtoient ceux du BTS. Ici, comme dans tous les autres lycées de France, la réforme du bac a été appliquée. Mais ici, comme dans beaucoup d’autres lycées de petite taille, toutes les spécialités ne sont pas disponibles.
"Le lycée propose les sept spécialités principales", confirme Max Barel, le proviseur-adjoint. À la fin de la seconde, les élèves ont donc le choix entre maths, physique-chimie, SVT, SES, histoire-géo, géopolitique et sciences politiques (HGGSP), humanités, littérature et philosophie (HLP), et anglais. Le lycée le plus proche est à Crest, à 45 minutes de voiture. Mutualiser les enseignements n’est donc pas possible.

Des élèves partis vers de plus grandes villes
De fait, ceux qui étaient attirés par d’autres spécialités ont été contraints de s’éloigner. Ainsi, 71 élèves sont inscrits en première cette année, alors que d’habitude, "c’est plutôt autour de 90", observe Max Barel. "Une quinzaine d’élèves sont partis entre la seconde et la première", appuie Sébastien Julian, professeur de maths. Un effet de la réforme ? "Pas sûr, estime-t-il, ce sera à confirmer l’an prochain."
Le lycée est en effet habitué à voir partir des élèves après la seconde. Notamment ceux qui veulent suivre un bac technologique ou professionnel, qui ne sont pas disponibles ici. Des cas spécifiques semblent pourtant montrer une amplification de la situation. "Un élève a commencé sa première ici et a finalement eu la spécialité sciences de l’ingénieur à Montélimar. Il a quitté le lycée fin septembre", raconte Laurence Arnaud, professeur de HGGSP.
Ce changement de lycée n’est pas anodin : Montélimar se trouve à plus d’une heure de route. C’est aussi le cas de Valence et de Grenoble. "Plusieurs de nos anciens élèves ont demandé des spécialités à Valence, et ont donc dû s’y inscrire en internat", note Max Barel.
Excellentes conditions d’apprentissage

Ce dédoublement se retrouve dans les matières les plus demandées : deux classes de 24 et 22 élèves en SVT, de 16 et 18 en TP de physique-chimie. Mais pas en HGGSP, où Laurence Arnaud doit faire cours à une classe de 35 élèves. "Pour travailler l’oral, c’est un peu compliqué." Tout l’inverse de la spécialité anglais : 17 élèves au total en première. "Un gros avantage pour l’oral", explique la professeur Sylvie Hamm.
Un "rapport affectif" entre profs et élèves
Comme dans les lycées des grandes villes, les élèves ont choisi leurs spécialités selon deux critères principaux : leurs préférences et, quand ils en ont une idée, leur orientation. Mais un autre facteur, propre aux petits établissements, est entré en compte. "On savait plus ou moins quels profs on allait avoir, explique Agathe. Comme j’hésitais entre deux spécialités, ça a influencé mes choix."
Une proximité dont les professeurs ont pleinement conscience. "Dans les petits lycées, il y a un rapport affectif avec les profs", explique Laurence Arnaud. "On est proches de nos élèves, c’est assez familial", confirme Stéphane Julian. La plupart d’entre eux, passés par des lycées de centre-ville, préfèrent ce format plus humain. "Ici, les élèves sont moins stressés, note Isabelle Roche, prof de SVT. On en connaît la plupart et on peut suivre leur progression."
Entraide à l’internat
Des élèves qui se connaissent également très bien. Sur les 300 inscrits au lycée, 90 sont à l’internat. Certains parce qu’ils viennent de loin pour suivre l’option sport nature, d’autres parce qu’ils viennent d’un village mal desservi par les transports. "C’est beaucoup dire qu’on est une famille, mais on se côtoie tout le temps", résume Agathe.

"En seconde, on passait les heures d’études à jouer aux cartes, se souvient Baptistin. Ça a changé." Cette proximité donne même envie à certains externes. "Je voulais être interne, mais je ne suis pas prioritaire comme j’habite à Die", regrette Angelo.
Heureusement, il peut profiter de l’ambiance en dehors des cours : le lycée est en pleine nature et les élèves profitent de chaque pause pour aller faire du sport, se balader ou se baigner dans la Drôme. "En été, ils reviennent après déjeuner avec les cheveux mouillés", s’amuse la prof d’anglais.
Des options rares pour attirer des élèves
Les élèves peuvent être sereins. Même si la réforme du bac a fait baisser les effectifs en classe de première, le lycée n’est pas menacé dans l’immédiat. C’est en effet le seul établissement de la région à proposer l’option sport nature, qui attire des jeunes de Lyon, Grenoble ou Perpignan. "Cette option est un atout. Sans elle on serait en manque d’élèves", reconnaît le proviseur adjoint. L’année prochaine, le lycée ouvrira d’ailleurs la spécialité arts du cirque en première, comptant ainsi consolider encore un peu son avenir.

Direction et professeurs restent tout de même attentifs, et espèrent qu’une spécialité non suivie ou la fermeture d’une option ne serait pas préjudiciable. Des questions qui n’inquiètent pas les élèves, dont l’esprit est tourné vers des problèmes beaucoup plus concrets : "On finit à 13h le mercredi. À cette heure-là, la navette pour aller skier sera passée !"